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André Glucksmann : « Vous avez dit "philosophe" » ? ! »

Publié le 25 janvier 2011 par Raoul Sabas

Patong Beach, le 25 janvier 2011

Objet :

« Vous avez dit "philosophe" » ? ! »

Monsieur André Glucksmann

Le Monde

80, boulevard Auguste Blanqui

75013 Paris

Monsieur,

Votre article publié le 27 dernier dans le quotidien Le Monde, sous l’intitulé « Cessons de diaboliser roulottes et mosquées ! », et portant en signature votre patronyme suivi du qualificatif « philosophe », me donne, non seulement une excellente occasion de vous rappeler mes lettres des 4 février 2002 et 26 juillet 2005, toujours sans réponse à ce jour, mais surtout de vous récuser, une fois de plus, le statut usurpé de « philosophe » pour les raisons déjà avancées dans l’abondant courrier antérieur ainsi que pour la teneur superstitieuse de l’écrit dénoncé aujourd’hui.

Certes, vous n’êtes pas la seule des soi-disant « élites » de l’époque, tous milieux confondus [Médias, personnel politique, intelligentsia (prétendus intellectuels ou pseudo-philosophes) et associations moralisatrices à sens unique], à fonctionner, pour votre plus grand profit, sur les mensonges et les « croyances au miracle » du penser superstitieux humain dans ses divers modes d’expression : religion, métaphysique matérialiste, ou scientisme, et idéaliste, ou pseudo-spiritualisme, idéologie et moralisme – sauf à vous-même ou à quiconque, et notamment la centaine de faiseurs d’opinion dénoncée depuis plus de dix ans, d’établir le contraire, comme je l’attends vainement depuis lors.

Ainsi, à en juger par cet article et votre parcours idéologique hétéroclite, passant du maoïsme au soutien de Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle de 2007, vous ne semblez échapper à aucune des formes du penser superstitieux.

Vous l’affichez en volant au secours de la superstition musulmane, au prétexte d’ « islamophobie », ou « stigmatisation de l’islam », porteuses de vos condamnations moralisatrices partisanes. En effet, sans le démontrer une fois de plus ici, mais comme je l’ai établi more geometrico dans mes lettres accusatrices sans ambiguïté adressées notamment au Parti socialiste, à Bernard-Henri Lévy et au MRAP, j’affirme qu’un philosophe, ou prétendu tel, qui vole au secours de la superstition religieuse en général et de la superstition musulmane en particulier, c’est tout sauf un philosophe, c’est un « philosopheur » , qui a tout à apprendre de la philosophie, de la « vraie » philosophie : celle démontrée par Spinoza notamment pour établir que LA Vérité ne peut-être qu’UNE, Unique. Et ceci suffit à invalider toutes les croyances superstitieuses en la possible coexistence de « deux » absolus, à savoir notre monde ET un Dieu ou un principe créateurs (primus motor, Premier agent et big-bang, entre autres), puisque c’est une impossibilité absolue par définition - mais il est ne vous est pas interdit, évidemment, de démontrer le contraire !

D’ici-là (?!), j’en viens à vos condamnations moralisatrices partisanes, puisque visant à dédouaner l’islam, en oubliant des réalités toujours bien concrètes aujourd’hui, et qui le rendent incompatible avec le catéchisme soi-disant universel contemporain, ou Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948, à travers ses pratiques de la charia, véritable atteinte au principe d’égalité, et de la fatwa, qui ne vise pas moins à limiter la liberté d’expression.

C’est précisément parce qu’il se fonde uniquement sur des fictions que je parle de catéchisme ou de religion des droits de l’homme, puisqu’il vise à décréter le Bien et le Mal absolus sur Terre. Dans un monde où TOUT est relatif, où tout comporte du pour et du contre, du positif et du négatif, des avantages et des inconvénients, entre lesquels tranchent seulement les intérêts égoïstes contradictoires, individuels et collectifs, des uns et des autres, certains « vertueux autoproclamés » aient cru pouvoir transposer l’Absolu dans le relatif, l’Idéal dans le quotidien. Étonnez-vous, après cela, que ce catéchisme ainsi que tout autre (religieux ou idéologique) se caractérise surtout, et seulement, par son inobservation universelle, et ce jusqu’à la fin des temps – sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire !

Une autre des fictions du moralisme, de la superstition moraliste [Morale et condamnations moralisatrices au nom de LA Morale : LAQUELLE ?], qui fonde vos anathèmes partisans, est la prétendue division par nature des humains en deux catégories : les bons, les gentils, les « vertueux », nous, et les mauvais, les méchants, les « salauds », eux. Or cette fable a été dénoncée sans ambiguïté, voici bientôt deux millénaires, par l’un des grands diseurs universels de LA Vérité éternelle absolue. La preuve, elle est toujours d’actualité, mais vous, les « vertueux », censeurs autoproclamés et donneurs de leçons de morale aux Autres, vous avez deux mille ans de retard sur la pensée du Christ – sauf, évidemment, à vous-même ou à quiconque de justifier le contraire !

Je passe rapidement sur la troisième fiction de la superstition moraliste, à savoir notre soi-disant « libre arbitre », cette prétendue libre volonté, en vertu de laquelle il nous suffirait de vouloir pour pouvoir, le « Yes, we can » d’Obama par exemple, dont lui-même a pu récemment vérifier que la méthode Coué n’avait rien d’efficace, à moins que la « nécessité » spinoziste ne vienne à son secours, car il arrive, évidemment, que les faits soient conformes à nos vœux.

Or, vous les vertueux, vous utilisez cette fiction de « libre arbitre » au domaine moral pour en conclure que puisque notre volonté est libre, paraît-il, nous avons le choix de faire librement le Bien ; et donc, à défaut, si nous agissons mal, ceci est dû uniquement à notre volonté de faire le mal – fut-ce, en cas de danger de mort, ou de tout autre intérêt égoïste de première importance !

A SUIVRE…


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