Iran - La coiffeuse qui fait lire une ville

Par Benard

Elle a transformé son salon de beauté en une bibliothèque et un lieu d’échanges. Des Iraniennes s’y retrouvent pour étancher leur soif d’apprendre.

Par Delphine Minoui | Photos : Newsha Tavakolian

Publié dansChâtelainede février 2011 | © Les Éditions Rogers ltée

Farkhondeh a fait sortir les Iraniennes de leur cuisine.

Ici, elles entrent sans rendez-vous. Femmes au foyer en tchador noir, adolescentes aux mèches dépassant du foulard, étudiantes sans le sou, elles sont des dizaines à se presser chaque jour devant la porte de Farkhondeh Gohari à Shahr-e Rey, ville populaire du sud de Téhéran. Avec une seule requête : quel livre emprunter cette semaine? « Il y en a pour tous les goûts : des livres de cuisine, des romans de Dostoïevski, des essais de Jean-Paul Sartre, des méthodes d’anglais, des poèmes persans. Quoi qu’on lise, la lecture libère l’esprit », dit-elle.

Farkhondeh Gohari, habillée d’un voile clair et d’un manteau informe, n’est pas une rebelle. Rien à voir avec les filles du nord de la capitale qui narguent les gardiens de la morale islamique en arborant des foulards très colorés. Ni avec certaines féministes qui finissent au cachot pour avoir dénoncé le régime et sa discrimination envers les femmes. Pourtant, 32 ans après la révolution islamique de son pays, ce petit bout de femme tout en rondeurs bataille, sans faire de bruit, en faveur d’une plus grande émancipation des Iraniennes. Avec pour seules armes quelques livres empilés sur de modestes étagères en bois.

Voilà 17 ans déjà que, par un beau matin de mars, cette quinquagénaire au caractère bien trempé, mère de quatre enfants, a décidé, sur un coup de tête, de transformer son salon de beauté en un salon de lecture. Un pari fou, couronné de succès. « Ça a commencé avec 50 livres d’occasion. Aujourd’hui, j’ai une sélection de plus de 7 000 ouvrages! » se félicite-t-elle.

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