" Il est en effet largement admis que les contes, les fables, voire les récits mythiques présentent certains caractères d'universalité ; non seulement compréhensibles par un public étranger (à certains détails près) ils lui sont aussi familiers, du fait de leur recours à un petit nombre de schèmes récurrents, de leur organisation interne en séquences parfois permutables mais souvent contraignantes dans leur ordonnance, et de leur emploi de thèmes ou motifs déjà recensés pour la plupart. " C'est sur cettecitation peu connue de Lallemand que l'auteur du tout nouveau recueil de contes intitulé Lézard et Caméléon, Les Contes Dii (Cameroun) entame son tout premier ouvrage du genre. Denis Djoulde, dont les travaux universitaires ont jusqu'ici prêté une attention particulière à la littérature orale, et notamment les contes Dii vient ici de concrétiser un rêve vieux de près de cinq années de travail. Car lorsqu'il soutenait son mémoire de maîtrise sur Les contes dii et la morale chrétienne : le cas des publications du Centre de Littérature Dii (C.L.D.) de Mbé, puis sonDiplôme d'Etudes Approfondies toujours sur le campus de Ngaoundéré sur la Littérature orale et éducation chez les Dii du Cameroun en 2004, ce jeune chercheur avait sans doute des visées définies qui viennent de connaître l'une des nombreuses apothéoses que l'auteur compte mettre au service de sa région d'origine.
Avec le nouveau recueil de 34 contes, aussi attrayants les uns que les autres, Denis Djoulde vient rappeler à bien de monde " ces soirées au cours desquelles nos ainés nous content des histoires inoubliables, plein de sens, de loufoqueries, mais surtout de conseils et leçons ". Estimant sans doute l'abandon de cette tradition séculaire qu'est le conte, le jeune doctorant en littérature orale, vient ainsi présenter des traductions originales de contes que lui-même dit avoir repris de ses grands-parents et parents, afin que nul n'oublie qu'ils font partie de notre culture. " C'est ma modeste contribution à la sauvegarde de ce que je considère comme faisant partie de notre patrimoine culturel, en ces temps où tout le monde est tourné vers la mondialisation et ce qui va avec. Je pense que cette mondialisation est la somme des apports des peuples divers ", explique-t-il.
Tortue réclame sa viande, Zigila Dayee et ses femmes, Le chasseur Kelensa, Le cochon trompé, ... sont autant d'histoires que le lecteur peut découvrir au fil des pages de cette œuvre, la première du genre pour Denis Djoulde. L'auteur, si tant il est vrai qu'il est fier du travail accompli, ne manque pas d'évoquer les difficultés que lui et son entourage ont connus pour voir naître ce recueil. Il aura en effet fallu plusieurs années d'enquête de terrain, et dont de dépenses financières énormes pour aboutir à une telle compilation. De même qu'il évoque également la difficulté qu'il a eu à traduire fidèlement les mots et expressions de la langue Dii vers le français.
David Wanedam,
in L'Oeil du Sahel du 24 janvier 2010