Petit laid
Chapitre 11
Pour la première fois depuis que je l’ai rencontrée – je n’ose pas dire « depuis que je la connais » -, Carine semble contrariée. Elle n’a apparemment pas apprécié mon honnêteté et ma franchise. Je ne comprends pas. On m’a toujours appris à dire ce que je pensais.
Sur le trajet du retour, l’autoradio avale goulument Balavoine et lâche un rot sonore. Je le regarde avec émotion, j’en ai les larmes aux yeux. Enfin quelqu’un qui me comprend, sans que je n’ai eu besoin de dire un mot ! Une vrai communion d’esprit.
Le reste du voyage se fait donc en silence.
Je me sens bien.
J’ai réussi à toucher Carine, à la faire réagir. J’ai eu peur un moment d’avoir trouvé quelqu’un de plus froid et insensible que moi. Elle est en réalité dans une bonne moyenne, ce qui n’est déjà pas si mal.
Il fait nuit. Je le sais parce que les voitures que nous croisons ont allumé leurs phares. A chaque fois qu’un véhicule arrive en sens inverse, j’ai l’impression qu’il va se jeter sur nous. Que nous sommes la proie. Que des yeux attendent avidement un faux pas de notre part. Pour nous empêcher de rentrer chez nous.
« Chez nous ».
Je ne peux réprimer un sourire.
Carine, évidemment, ne comprend pas.