Deux nouveautés américaines testées en moins d'une semaine, cela faisait longtemps que cela n'était pas arrivé (voire jamais, sur ce blog). Mais j'avoue conserver un certain faible pour USA Network, même s'il est rare que ses séries me fidélisent bien longtemps. J'aime retrouver cette sorte de cachet "friendly" qui accompagne ses productions. Ces dernières n'ont d'autre objet que celui de proposer un divertissement confortable, cependant elles le font généralement avec une conviction des plus communicatives.
A défaut de surprendre, cela donne quand même envie de leur laisser une chance. C'est pourquoi c'est sans attente particulière, mais avec une pointe de curiosité, que je me suis installée devant le pilote de Fairly Legal, une nouvelle série qui a débuté jeudi dernier aux Etats-Unis. Et c'est face à une nouveauté aussi pétillante qu'excessivement calibrée pour correspondre à l'image de la chaîne que je me suis retrouvée. Un premier épisode qui semble donc remplir sa part du contrat.
S'inscrivant dans la tendance d'USA Network à féminiser des héros encore très masculins, Fairly Legal est dotée d'une figure centrale de charme et de poigne en la personne de Kate Reed, une ancienne avocate désormais reconvertie dans un rôle de médiatrice qui convient mieux à sa volonté de promouvoir une justice qui ne serait pas déshumanisée et réduite uniquement à des textes de lois désincarnés. Pour autant, la jeune femme n'a pas quitté le milieu du droit, puisqu'elle officie à ce poste au sein du cabinet familial Reed & Reed. Dans ce pilote, nous la découvrons malheureusement reprendre le travail après un douloureux deuil, son père est en effet décédé une semaine plus tôt. Si les deux avaient un fort caractère et des conceptions très différentes du droit, sa mort a profondément affecté Kate qui a encore du chemin à faire pour l'accepter.
Cependant, les affaires continuent. Sa belle-mère, désormais veuve et patronne, n'a d'ailleurs elle pas pris le temps de pleurer son époux, alors que les cabinets concurrents démarchent ouvertement leurs gros clients. Ce premier épisode balaie quelques journées-type pour Kate, proposant un aperçu d'un quotidien assurément mouvementé et qui se mène tambour-battant sur un rythme effréné. L'énergique jeune femme navigue en effet entre clients du cabinet à choyer et affaires judiciaires confiées par des juges réglant certains comptes, tout en y immisçant et en jonglant avec une vie personnelle qui se complique d'un ex-mari travaillant au bureau du procureur, avec lequel la nature de leurs relations demeure relativement floue.
Sans être un legal drama au sens traditionnel du terme, Fairly Legal en reprend tant son parfum que ses codes narratifs, tout en y ajoutant un twist. Car si Kate Reed a quitté la profession d'avocat, c'est qu'elle se refuse d'analyser les affaires qui lui sont soumises avec une vision purement légaliste. Elle veut prendre en compte la spécificité et la dimension humaine de chaque cas. D'où ce rôle de médiateur, un poste auquel elle peut non pas mener bataille pour un camp, mais essayer de faire transiger les deux parties. Pour, la justice ne se réduit pas à ces notions de gagnant et de perdant, mais au triomphe du "juste". Son but est donc de parvenir à la résolution des conflits, non pas par une mise en oeuvre rigoriste de la loi, mais par des règlements en équité acceptés par chacun des camps en présence. Cette ambition apporte à la série une pointe d'idéalisme pas déplaisante, mais qui peut aussi devenir trop utopique.
La notion de juste flirte certes avec celle de morale. Sur le papier, le risque existe que le propos de Fairly Legal verse dans un ton excessivement moralisateur, avec Kate Reed seule juge de ce qui doit être, cependant l'ambiance générale qui se dégage de ce pilote paraît exclure de tels écueils. Tout d'abord parce que l'héroïne, dotée d'un fort caratère et de certitudes qu'elle n'hésite pas à défendre jusqu'au bout, apporte un dynamisme très rafraîchissant. Elle incarne à merveille une forte tête, charismatique et solide, comme il est toujours agréable d'en trouver dans ce type de séries. Mais c'est aussi une personne pragmatique - et si le pilote se passe admirablement bien, tout exercice du compromis a bien entendu ses limites. De plus, et surtout, Fairly Legal est une fiction de divertissement. Les affaires proposées dans l'épisode l'illustrent bien : aucun dilemme moral potentiel insurmontable, mais plutôt des affaires avec une touche d'excentricité mêlés à quelques classiques indémodables du legal drama, et une tendance certaine à verser dans la facilité pour les résoudre. USA Network nous ayant habitué à des séries qui se concentrent plus sur leurs personnages que sur les intrigues elles-mêmes, il n'y a sans doute pas à s'inquiéter sur ce potentiel glissement moralisateur. Il faudra par contre éviter de reproduire invariablement ce schéma "happy end" qui pourrait vite lasser.
Au-delà de ses intrigues anecdotiques, Fairly Legal apporte logiquement un soin tout particulier à sa dimension humaine. Dotée d'une héroïne au dynamisme accrocheur, instantanément attachante, le pilote va aussi nous présenter toutes ses facettes plus ou moins épanouies, dont une vie amoureuse compliquée dans laquelle son ex-mari semble encore occuper une place prépondérante non définie, mais aussi ce deuil difficile qu'elle est en train de vivre avec son père (la scène finale du pilote étant d'ailleurs très touchante). Gravite autour d'elle une galerie de personnages qu'il est très facile de trouver sympathiques, de l'ex-mari avec lequel Kate nourrit une complicité sans faille qui laisse songeur, jusqu'à l'ex-belle-mère qui doit s'efforcer de gérer ce cabinet comme elle peut et qu'une scène avec un client odieux réhabilite aux yeux du téléspectateur.
Enfin, sur la forme, aucun doute, Fairly Legal est un produit calibré d'USA Network : des couleurs chatoyantes, une réalisation classique qui s'essaie parfois à des effets de style expérimentaux pas forcément très concluants, et une bande-son pop-rock trop envahissante. Concernant le casting, il faut vraiment saluer la performance de Sarah Shahi (L Word, Life) qui se révèle parfaite pour insuffler une énergie pétillante à son personnage. Les autres membres du casting conviennent également tous pour leurs rôles respectifs. On y retrouve Michael Trucco (Battlestar Galactica), Baron Vaughn et Virgina Williams.
Bilan : Léger et dynamique, sexy et sympathique, Fairly Legal trouve sans difficulté ses marques dans le registre du divertissement réunissant tous les ingrédients classiques qui font l'identité de USA Network. Se déroulant de façon aussi prévisible que bien huilée, l'épisode cède souvent à une facilité un peu excessive qui pourrait lasser si ce schéma tendait à devenir répétitif mais qui se laisse suivre sans déplaisir au cours de ce pilote. Les running gags que constituent les références geek ou Oz-ienne apportent même une petite touche décalée supplémentaire à cet ensemble chaleureux. Rien d'innovant, ni d'immanquable, mais un potentiel pour construire une petite série divertissante qui devra cependant mûrir dans les prochains épisodes, en travaillant les intrigues qui permettront aux personnages de s'affirmer.
NOTE : 6,5/10
La bande-annonce de la série :