Wolf Huber (Feldkirch, c.1485/90-Passau, 1553),
Le Christ sur le mont des Oliviers, après 1530.
Huile sur bois de tilleul, 60,4 x 67,4 cm,
Munich, Alte Pinakothek.
Si, hors quelques noms célèbres, la peinture germanique des XVe et XVIe siècles reste, du moins en France, largement négligée, voire méprisée, la situation de la musique produite durant cette période est encore pire, comme si Schongauer, Dürer Altdorfer ou Cranach avaient vécu dans un monde privé de sons. On est d’autant plus reconnaissant à l’ensemble vocal Stimmwerck de s’être consacré, depuis ses débuts, à l’exploration de ces répertoires scandaleusement négligés et de nous avoir offert des enregistrements dédiés, entre autres, à Adam von Fulda ou Heinrich Finck. C’est aujourd’hui Leonhard Paminger qu’il met à l’honneur, dans un disque publié chez Christophorus.
On sait peu des choses de la formation musicale de Paminger, un compositeur qui laisse un catalogue impressionnant de plus de 700 œuvres, dont la reprise dans des anthologies françaises et italiennes atteste de la célébrité de son vivant. Né à Aschach an der Donau (aujourd’hui en Haute-Autriche) en mars 1495, il étudie, entre 1513 et 1516, à l’université de Vienne, ville dans laquelle on suppose qu’il a pu côtoyer certains des musiciens les plus en vue de son temps, tels Ludwig Senfl (c.1486-1542/3) ou Paul Hofhaimer (1459-1537), sans qu’il soit possible de déterminer ce qu’ils purent éventuellement lui apprendre et ce qu’il acquit en autodidacte. Toujours est-il qu’en 1516, Paminger s’installe à Passau, où il passera le reste de sa vie, en qualité, tout d’abord, de maître d’école au sein du couvent Saint-Nicolas, regroupant des chanoines réguliers de saint Augustin, puis, à partir d’environ 1529, en tant que recteur de ce même établissement conventuel. Durant toute sa période d’activité, outre ses charges d’enseignant et de compositeur, il s’impose comme un véritable humaniste qui non seulement traduit des pièces de théâtre antique mais participe également de près aux débats théologiques qui éclatent dans le sillage de la Réforme. Paminger semble avoir entretenu des liens personnels avec Martin Luther et Philipp Melanchthon, il envoie ses fils étudier à l’Université de Wittenberg, et rédige deux libelles favorables aux idées luthériennes qui ne seront publiés que l’année de sa mort, survenue le 3 mai 1567.
L’interprétation offerte de ces pages inédites de Paminger par le quatuor vocal masculin Stimmwerck (photographie ci-dessous),
auquel s’est adjoint, pour l’occasion, le contre-ténor David Erler, est splendide de bout en bout. Ceux qui ont pu se familiariser avec l’esthétique de l’ensemble allemand au fil de ses
précédentes réalisations retrouveront ici son impeccable cohésion, son souci de la lisibilité polyphonique, sa capacité à apporter un indéniable souffle en même temps qu’une incroyable
transparence aux musiques dont il s’empare, autant de qualités qui le rapprochent de ses « cousins » de la Capilla Flamenca.
Stimmwerck
Franz Vitzthum, contre-ténor. Klaus Wenk & Gerhard Hölzle, ténors. Marcus Schmidl, basse. Avec la participation de David Erler, contre-ténor.
1 CD [durée totale : 71’38”] Christophorus CHR 77331. Ce disque peut être acheté en suivant ce lien.
Extraits proposés :
1. Sicut lilium inter spinas
2. Pater Noster
3. Disce Crucem
Illustrations complémentaires :
Portrait de Leonhard Paminger, au verso de la page de titre du Secundus tomus ecclesiasticarum cantionum... Quinta vox, Nuremberg, Dietrich Gerlach, 1573. Gravure sur bois, 15,5 x 19 cm, Paris, Bibliothèque nationale de France.
La photographie de Stimmwerck est de Johannes Braus, tirée du site de l’ensemble.