Que faisiez-vous le 12 janvier 2010 ? Difficile d’y répondre. Dany Laferrière lui s’en souvient. Il se trouvait à Port-au-Prince sa ville natale à l’occasion du festival Etonnants Voyageurs. A 16h53 alors qu’il était au restaurant, la terre s’est mise à trembler. Une minute plus tard, la ville était dévastée. Haïti venait de connaître un séisme.Il m’est difficile de parler de cette lecture tant elle est saisissante. Pas de pathos ou de sensationnel mais de la pudeur et de la sobriété. Ce livre ne dresse pas avec chiffres à l’appui des constats. Les visions sombres ou apocalyptiques n’yont pas non plus de place. Dany Laferrière a écrit ce qu’il voyait, ce qu’il ressentait dans un carnet. Présent au moment du séisme, il est revenu à Haïti quelques jours plus tard. Et ce sont autant de portraits, de tableaux justes et ciselés qu’il nous livre. Des textes où le sang-froid de l’auteur est impressionnant et où la réflexion dépasse l’émotionnel. En sa compagnie, on suit le quotidien de sa famille. Il nous invite aux funérailles de sa tante mais aussi à des moments simples où la vie reprend le dessus. Bien sûr, il nous fait partager les craintes, la peur des survivants mais aussi la solidarité et surtout la dignité de toute une population. Une dignité qui ne peut engendrer que du respect. La terre a tué mais la culture permet de se relever. Un livre tout simplement remarquable...
Je m'attendais à entendre des cris, des hurlements. Rien. On dit en Haïti que tant qu'on n'a pas hurlé, il n'y a pas de mort. Quelqu'un a crié que ce n'était pas prudent de rester sous les arbres. En fait, c'était faux, car pas une branche, pas une fleur n'a bougé malgré les quarante-trois secousses sismiques de cette première nuit. J'entends encore ce silence.