Condamné à trouver coûte que coûte des recettes pour renflouer un Etat qu’il a lui-même rendu exsangue, le gouvernement envisage de mettre fin à la défiscalisation des plus-values
réalisées par les propriétaires lorsqu’ils vendent leur résidence principale. Dans un mouvement inverse des députés UMP proposent de sortir la résidence principale
de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Schizophrénie ou, pied de nez de la France d’en haut à celle d’en bas, on ne sait plus trop où on habite dans la majorité présidentielle. A défaut de pouvoir supprimer sans trop de vague l’ISF à un an des échéances présidentielles, le gouvernement s’est résigné à conserver le totem mais en prenant le soin de le vider en grande partie de sa substance.
L’ISF nouvelle génération devrait donc être sérieusement amendé. Les hypothèses portent sur une augmentation de 30 à 50 % de l’abattement sur la résidence principale dans le calcul de l’impôt. Certains députés UMP ne cachent pas leur désir d’aller encore plus loin en poussant l’abattement à 100% sur les résidences principales.
Le député Jérôme Chartier, chargé par l’UMP de réfléchir à la convergence franco-allemande en matière fiscale, la nouvelle marotte Nicolas Sarkozy, propose ni plus ni moins d’exonérer d’ISF les contribuables au patrimoine inférieur à 4 millions d’euros.
Nul doute que l’exemple pourtant marginal mais 1000 fois avancé des petits propriétaires de l’île de Ré sera savamment resservi. Pour les grandes fortunes en revanche, ce joli cadeau pré-electoral ne devrait pas défrayer la chronique. Car la France des riches n’est pas un mythe, en 2010, plus de 562 000 foyers français ont acquité l’ISF.
Là où le bât blesse c’est quand cette mesure se télescope avec la réflexion gouvernementale sur la fiscalité du patrimoine. On sait ainsi que pour de très nombreux Français, notamment des classes moyennes, la plus-value générée par la vente de leur résidence principale est une condition sine qua non de montée en gamme en matière de logement.
Or, cette accession à un bien immobilier plus grand ou localisé différemment correspond le plus souvent à la modification de la cellule familiale avec l’arrivée d’enfants puis leur intégration et évolution dans le cursus scolaire. C’est demain cette opportunité qui risque de disparaître. Si tel était le cas, cette modification substantielle contribuerait de façon importante au sentiment de déclassement des classes moyennes et, à une perte de confiance dans l’avenir.
L’indécence, voire la provocation, c’est de poser l’équation selon laquelle les pertes de recettes liées à la réforme de l’ISF (600 millions) seront compensées par la taxation des plus-values sur la vente de la résidence principale de M. tout le monde.
Il semblerait que cette solution ait la faveur de Nicolas Sarkozy ce qui alimenterait le cas échéant le sentiment répandu que le chef de l’état est d’abord l’ami des riches avant d’être le président de tous les Français.
Dès son élection en 2007, le nouveau chef de l’État avait en toute discrétion dans le cadre de l’ISF relevé de 20 à 30 % l’abattement pour la résidence principale. L’exonération intégrale envisagée aujourd’hui en constitue donc le prolongement naturel. Elle devrait certes bénéficier avant tout aux assujettis de la première tranche pour qui la résidence principale représente un quart de l’ISF… mais pas seulement.
Le quotidien Les Échos rapporte que pour les très hauts patrimoines, Bercy envisagerait de rétablir le plafonnement de l’ISF et de l’impôt sur le revenu à 70 % des revenus.
Autrement dit, au moment où la très grande majorité des Français va être appelée à mettre un peu plus la main à la poche, la contribution à la solidarité nationale des plus riches devrait être amoindrie. Et ce, quelques jours seulement après que le Nouvel Observateur ait publié une enquête dans laquelle le magazine détaille les mécanismes de la niche fiscale dite Girardin Industriel. Un dispositif de défiscalisation qui permet en toute légalité à certaines grandes fortunes et à des patrons de CAC 40 de ne pas payer d’impôts, ou quasiment pas.
Par Henry Moreigne pour « La Mouette »
Mise à jour : dans son rapport, le député Charrier propose de taxer les plus-values à partir d’un seuil de 1,2 million d’euros. Il ne s’agit là que d’une proposition.
Merci à Section du Parti socialiste de l'île de ré