Le 39 77 prochainement en service

Publié le 21 janvier 2008 par Ludivine Arrivault-Jochem

Un numéro d'appel unique pour l'ensemble du territoire national va être mis en service au début du mois de février. Il permettra de signaler les cas de maltraitance faites aux personnes âgées et handicapées. Jusqu’à présent, 36 départements français n’étaient pas couverts par ce dispositif.

39 77


La maltraitance des personnes âgées : une prise de conscience tardive

Les premiers articles faisant état de sévices sur des personnes âgées datent du milieu des années 70. Mais, ils étaient encore marginaux. En France, c'est principalement au Professeur HUGONOT, médecin gérontologue que nous devons la prise de conscience de ce grave problème. En effet, en 1987, le Pr HUGONOT rend au Conseil de l'Europe un rapport “Violences et négligences” qui fait état de violences financières, psychologiques, etc.

ALMA : un réseau d'écoutants bénévoles

Moins de 10 ans après ce rapport, les centres d'écoute ALMA (ALlo MAltraitance) voient le jour en 1994  sous l'impulsion du Pr. HUGONOT.

Les constatations auxquelles voulait répondre ALMA étaient les suivantes :

  • la maltraitance des personnes âgées existe, mais elle reste secrète, tabou et invisible,

  • elle se développe tant en famille, à domicile qu’en institution,

  • les victimes se plaignent rarement elles-mêmes,

  • seule une action de proximité permet d’étudier et de résoudre les problèmes posés.

Le réseau ALMA fait appel à des retraités bénévoles, formés à l’écoute et aux différents aspects de la maltraitance des personnes âgées.

A quoi ressemble la maltraitance envers les personnes âgées ?

Voici la classification proposé par le Conseil de l'Europe :

les violences physiques : coups, brûlures, ligotage, soins brusques sans information ou préparation, non-satisfaction des demandes pour des besoins physiologiques, violences sexuelles, meurtre dont euthanasie,...

les violences psychiques ou morales : langage irrespectueux ou dévalorisant, absence de considération, chantages, abus d'autorité, comportements d'infantilisation, non-respect de l'intimité, injonctions paradoxales,...

les violences matérielles et financières : vols, exigences de pourboire, escroqueries diverses, locaux inadaptés,...

les violences médicales ou médicamenteuses : manque de soins de base, non-information sur les traitements ou les soins, abus de traitement sédatif ou neuroleptique, défaut de soins de rééducation, non-prise en compte de la douleur,...

les négligences actives : toutes formes de sévices, abus, abandons, manquements pratiqués avec l'intention de nuire,...

les négligences passives : relevant de l'ignorance, de l'inattention de l'entourage,...

la privation ou la violation des droits : limitation de la liberté de la personne, privation de l'exercice des droits civiques, d'une pratique religieuse,...

Aucun professionnels de la gérontologie n'a évolué dans ce monde sans être confronté tôt ou tard à des pratiques maltraitantes de la part de collègues, de membres de la famille ou en ayant soi-même parfois été à la limite d'un propos ou d'un geste inadapté. Travaillez en institution gériatrique est éprouvant physiquement et psychologiquement. Pour qui ne l'a pas choisi c'est d'autant plus difficile.

Pour ma part, j'ai d'emblée, dès mon premier poste en gériatrie, assisté à un acte de maltraitance psychique. Toute jeune professionnelle, tout récemment embauchée et en contrat déterminé qui plus est, je n'ai pas osé, je n'ai pas su parler. Et pourtant, il s'agissait d'un manque de respect manifeste de la dignité de la personne. En effet, pendant une animation donc devant un groupe d'aînés réunis dans le salon, une aide soignante a soulevé la jupe d'une personne âgée car elle trouvait qu'une odeur nauséabonde émanée de cette personne. Personne n'a rien dit, ni moi, ni les personnes présentes, ni l'aide soignante qui était en binôme avec l'auteure des faits.

Dans ma carrière à domicile, j'ai aussi côtoyé des personnes maltraitées par leur enfants. Ce fût l'objet de discussions avec ma collègue, assistante sociale, pour choisir de signaler ou de ne pas signaler, d'attendre pour réunir davantage de preuves ou d'agir immédiatement, de faire selon la volonté de la personne âgée ou non. Car, les personnes ne se plaignent pas. Et si nous entrouvrons la porte pour leur dire ce qu'il nous semble constater, elles demandent de ne surtout rien dire. Par peurs...

Attention, toutefois à ne pas diaboliser les familles et les professionnels. En réponse, à cette maltraitance et pour ne pas stigmatiser des familles déjà fragilisées et épuisées par la situation de leur proches âgés, se développe depuis quelques années le concept de bientraitance ou encore d'humanitude dont je parlerais dans un prochain billet tant ces concepts sont essentiels.