Cela nous ramène au concept anglo-saxon de la « serendipity », sorte de hasard heureux qui peut se définir comme l’art de découvrir ou de créer quelque chose sans l’avoir précisément cherché. Un état d’esprit qui ne fonctionne que si l’on se fixe un objectif précis et qui exige une attitude mentale axée sur la détermination, la curiosité, l’effort et la patience.
S’il est par ailleurs nécessaire de communiquer en période de crise, il est préférable de se concentrer sur un seul message, ce qui implique d’être au clair en amont sur son objectif, son positionnement et ses cibles. « Tous les grands communicants, rappelle Bommelaer, le savent. Il vous faut trouver les mots clés et la façon forte, unique et originale de faire passer votre message principal ». Ne reste plus qu’à répéter par la suite ce message central. Bref, l’efficacité en ce domaine se conjugue aussi mal avec la propension à la divagation du propos qu’avec une habitude culturelle plus ancrée dans notre pays qui consiste à s’obliger en toutes circonstances à la modestie en s’interdisant d’afficher ses réussites.
Au contraire, être porteur d’un message clair et fort peut utilement aider à conjuguer lisibilité et visibilité, ce qui vaut pour les individus autant que pour les entreprises. A l’âge du storytelling, il est également utile de rappeler que nous n’usons que trop peu souvent de la capacité des histoires à susciter la curiosité et à faire passer des messages. Une « arme de persuasion massive » dont nous n’utilisons ordinairement guère plus de 20 % des possibilités. Ayez donc au moins une histoire pour chaque grande idée que vous défendez, recommande l’auteur.
Profitez-en également pour construire votre propre vision de la crise, pour « faire la différence avec le magma verbal ambiant en adoptant un discours réfléchi et construit sur la récession ». Les leaders les plus habiles en ce domaine ont bien compris que l’essentiel « n’est pas d’avoir raison sur la durée, mais d’avoir une pertinence évolutive et assez souple pour pouvoir s’adapter à des circonstances aussi changeantes qu’évolutives ».
La revanche de la récré
Il y a une satisfaction dans cette affaire : c’est la revanche des pros de la récré sur les bons élèves. Ceux qui réussissent le mieux en période de crise ne sont en effet pas ceux qui, tels les bons élèves, répliquent avec application les recettes de l’école et du passé, mais ceux qui explorent, vont au contact des autres et montrent une capacité singulière à la socialisation (Bommelaer est aussi un spécialiste du réseau ; il est notamment l’auteur de « Trouver le bon job grâce au réseau » et « Booster sa carrière grâce au réseau »). La recherche (Eagly & Carli) montre que les meilleurs managers qui consacrent moins de temps que les autres aux tâches traditionnelles pour mieux se concentrer sur le développement des relations sont aussi ceux qui progressent le mieux dans leur vie professionnelle. La récré dans ce contexte, c’est ce lieu magique où « se nouent les alliances, circule l’information et se passe la vraie vie ».
Quant à la recherche d’emploi, inutile de préciser que, dans une situation où 70 % des postes de cadres confirmés passent par le réseau, c’est un networking bien mené et le plus en amont possible qui permettra de s’insérer au mieux dans les opportunités disponibles. Cela permettra aussi d’éviter ce que Bommelaer nomme les quatre dictatures du marché de l’emploi : celle du CV (vu en vingt secondes sans rencontre), du copié-cloné (on recherche le même), de l’âge (on est désormais reconnu senior à 47 ans) et du diplôme (sans le bon, point de salut).
Nouvelles catégories
Dans ce contexte, le credo de l’auteur, c’est celui de Susan Jeffer : qui ose, gagne. L’auteur rappelle à cet égard le mot de John Kennedy : « Les risques et conséquences qui découlent de l’action ne sont rien comparativement aux risques et conséquences d’une confortable inaction ». Et cela dans un monde et au milieu d’une crise qui nous commandent de cesser de penser et de vouloir agir avec les cadres et les catégories du XXème siècle. « L’histoire du XXIème siècle est d’ores et déjà dominée par l’incertitude et la volatilité, les ruptures et les surprises de tous ordres. Autant donc être prêt à vivre ces nouvelles ruptures. C’est aussi le crédo des spécialistes des nouvelles technologies à Harvard qui intègrent de plus en plus dans les systèmes de management les règles permettant de gérer au mieux l’incertitude.
La tâche paraîtra-t-elle trop vaste qu’un découpage en une série d’actions concrètes et positives permettra de progresser vers le but que l’on s’est fixé. C’est la recommandation d’Albert Bandura dans son livre sur l’auto-efficacité. Plus la personne concernée est persuadée de pouvoir réussir, plus elle agit et atteint ses objectifs. Plus elle réussit, en acquérant ou imitant des comportements adaptés, plus elle se fixe – ou accepte – des tâches de plus en plus difficiles.
Investir dans la confiance
Investir dans la confiance est aussi une piste à privilégier, spécialement dans un pays auquel elle fait cruellement défaut, comme l’ont rappelé récemment Yann Algan et Pierre Cahuc dans « La société de défiance ». A la question : en règle générale, est-il possible de faire confiance aux autres ? la France se classe en effet au 24ème rang sur 26 pays étudiés, juste devant la Turquie et le Portugal. Voilà un avantage stratégique encore largement méconnu, à tel point que Covey la considère comme la priorité n°1 des années à venir. Cela n’exclut pas la confrontation, mais doit à tout le moins conduire à la pratiquer de façon positive, à travers ce que les psychologues nomment l’assertivité.
Pour cela, rien de tel que de redécouvrir le potentiel de « l’intelligence émotionnelle développée notamment par Daniel Goleman. Si un QI supérieur à 140 continue encore à être pris en considération, le « quotient émotionnel » monte en puissance. La clé, c’est l’harmonie sociale. La contribution décisive du QE, c’est en effet de permettre la pleine expression du travail en équipe, bien au-delà de la seule addition des QI individuels (2/3).