Interrogé sur RMC et BFM TV à propos du projet d’une refonte de la
fiscalité du patrimoine et plus précisément sur l’idée d’une taxation des plus
values immobilières sur les cessions de résidences principales, François Bayrou
a répondu de la manière suivante (tel que repris par l’AFP) :
« Taxer les plus-values réalisées sur la vente de la résidence
principale, comme envisagé par le gouvernement dans sa réforme de la fiscalité
du patrimoine, serait "une erreur colossale", "Tout cela est fait en vérité
pour supprimer l'ISF" » ! Et il poursuit en justifiant sa position
par un :
« Combien connaissons-nous de jeunes ménages qui ont réussi à
s'établir dans la vie parce qu'ils ont acheté une petite maison, un
appartement, ils l'ont retapé et puis après ils l'ont vendu, ils en ont acheté
un plus grand. C'est un chemin de réalisation et de liberté dans la
vie"
Il dit 2 choses là dedans, d’une part que l’idée que taxer les plus-values
réalisées sur la vente de sa résidence principale serait injuste par rapport à
tous ceux qui ont économisé toute leur vie pour acquérir leur logement, et
d’autre part, l’accusation faite au gouvernement de vouloir supprimer
l’ISF.
Commençons par l’idée de supprimer l’ISF.
L’ISF est un impôt qui fonctionne mal et qui pour un certain nombre de
raisons (voir le rapport de Philippe
Marini sur le sujet) est accusé d’être inquisitorial, « déconnecté du
revenu de ses redevables », et donc « au caractère potentiellement
confiscatoire ».
Faute d’avoir le courage de le réaménager en profondeur, Villepin a créé le
bouclier fiscal afin d’en limiter le caractère confiscatoire, Sarkozy en a
rajouté une couche en abaissant son taux.
On se retrouve dans une situation qui ne satisfait personne, qui est
porteuse de mauvais symboles, complexe, inefficace, couteuse à gérer, et pour
partie injuste ! Il faut y remédier !
Y remédier suppose de simplifier ce système tout en conservant, à minima, la
neutralité budgétaire de l’ensemble et une certaine équité sociale, condition
sine qua non pour que la réforme soit acceptée.
En tout état de cause, cela conduit à revoir les modalités de l’ISF afin de
faire en sorte qu’il ne soit pas déconnecté, comme c’est le cas actuellement,
des revenus du contribuable.
Or les propositions que commentent François Bayrou ont cet objectif. Elles
sont issues du rapport
Chartier intitulé : « REFLEXIONS POUR UNE CONVERGENCE FISCALE
FRANCO-ALLEMANDE » dans lequel celui-ci évoque un certain nombre de pistes
afin de remodeler la fiscalité sur le patrimoine et de la rapprocher des
pratiques allemandes.
Ses propositions, ne prévoient pas la suppression de l’ISF mais son
« allégement » et notamment le relèvement des seuils d’imposition, en
échange d’un certain nombre de mesures parmi lesquelles la suppression du
bouclier fiscal et la taxation des plus values immobilières sur résidences
principales dont la valeur est supérieure à 1,2 million
d’euros !!!!
Je ne vois rien de condamnable dans cette intention, et c’est faire, à mon
sens, un mauvais procès au Gouvernement que de vouloir l’accuser de supprimer
l’ISF puisque ce n’est pas ce qui, à ce jour, est proposé !
Plus gênant, François Bayrou semble ne pas avoir eu connaissance du seuil de
1,2 millions d’euros car sinon il n’aurait pas évoqué le cas des pauvres petits
gens qui achète une maison, qui la retape et qui la revende pour acheter plus
grand !...ceux là ne sont clairement pas concernés !
Enfin, rappelons que le montant de 1,2 millions d’euro est dans la première
tranche d’imposition à l’ISF, ce qui signifie qu’actuellement, il n’y a pas
besoin de vendre son bien pour être taxé dessus, ce qui est autrement plus
injuste pour les « pauvres petits gens qui ont acheté une petite maison et
qui l'ont retapée jusqu'à en faire une demeure cossue d'une valeur de 1,2
million d'euros» !
Sans doute emporté par son désir de se présenter comme l’opposant numéro 1 à
Sarkozy, il me semble que François Bayrou a parlé un peu précipitamment sur un
sujet dont il ne connaissait pas tous les éléments. D'un dirigeant du PS
d'accord, mais de François Bayrou, on est pourtant en droit d’attendre beaucoup
mieux surtout sur un sujet qui se prête aussi bien à tous les discours démago
et populistes.
Ce reproche ne signifie pas pour autant que je suis en total accord avec ce
qui est proposé par le député UMP, sur ce sujet je préférais une solution
simple qui s’appuierait sur un élargissement de l’assiette mais avec une
augmentation des seuils et des taux plus bas.
J’attends avec impatience les propositions de François Bayrou sur le sujet,
mais... une fois qu’il y aura un peu réfléchi !