Delayed

Publié le 19 janvier 2011 par Toulouseweb
Boeing confirme le 7e retard du 787.
Depuis plus d’un demi-sičcle, le chiffre 7 joue un rôle primordial dans la saga des avions commerciaux de Boeing. C’est un chiffre fétiche, depuis l’époque lointaine du 707, sensé porter chance. Dčs lors, on se demande si le 787 profitera lui aussi de cet effet bénéfique supposé, sachant que le septičme retard du programme vient d’ętre officiellement confirmé : la livraison des premiers avions est reportée au troisičme trimestre de cette année.
Ce n’est pas une surprise, un simple rappel de l’importance des difficultés auquel se heurte le dernier-né de Boeing, qui accuse ŕ présent trois ans de retard par rapport ŕ son calendrier initial. Cet échec industriel, le premier de cette ampleur pour Seattle, entre autres conséquences, illustre quelques-unes des spécificités les plus extravagantes de l’industrie aéronautique. A commencer par le fait que le nouveau long-courrier totalise malgré tous ses malheurs 847 commandes, un résultat commercial remarquable, et qu’il conserve visiblement toute la confiance des compagnies qui l’ont choisi de préférence ŕ l’Airbus A350XWB. Le 787 reste imperturbablement un grand succčs commercial et, plus que jamais, il semble promis ŕ un avenir illant.
Il n’en est pas moins ŕ l’origine de sérieux dommages qui affectent l’image du constructeur. Mais cela sans que l’on puisse en mesurer l’ampleur financičre, les secrets étant jalousement gardés. Ainsi, il se dit que les compensations demandées par les compagnies clientes atteindraient 5 milliards de dollars. Info ou intox ? Impossible ŕ savoir. Mais on ne voudrait en aucun cas ętre ŕ la place de directeurs de flottes qui, sept fois en trois ans, se retrouvent dans l’obligation de modifier profondément leur programme. Le ton est d’ailleurs donné, cette semaine, par les dirigeants d’ANA, compagnie de lancement qui a commandé non moins de 55 appareils. Peu ŕ peu, ils ont haussé le ton et, ŕ présent, exigent des garanties quand au respect du nouveau calendrier. Mais, en pratique, que peuvent-ils espérer ?
Par ailleurs, non moins d’une trentaine de 787 sont ŕ présent sortis d’usine et stockés en attendant la certification, des travaux de rattrapage et, enfin, les premičres livraisons. Bien sűr, le montant des en-cours ne peut qu’ętre considérable. Les commentaires fusent de toutes parts, acerbes ou moqueurs, mais Boeing se révčle trčs bon en matičre de gestion de crise, en męme temps que ses dirigeants témoignent d’un remarquable sang-froid.
Nous l’avons noté précédemment, il est justifié de le répéter, le secteur aéronautique tout entier s’interroge ŕ propos des errements de Boeing mais, ŕ aucun moment, on n’entend la moindre critique venue de Toulouse. Le 787 croule sous les problčmes mais, il n’y a pas trčs longtemps, l’A380 n’était pas mieux. Le 747-8, lui aussi, est ŕ la traîne et son développement coűte plus cher que prévu mais l’A400M, lui, mérite le titre de miraculé.
En regardant au-lŕ du 787 et de l’A350XWB, on peut d’ores et déjŕ se demander si les leçons de ces grandes difficultés seront tirées, le moment venu, pour éviter leur répétition. Mais, pour cela, il faudra faire preuve de beaucoup de patience, compte tenu du trčs petit nombre de programmes de grande ampleur lancés au fil des années. D’ailleurs, c’est peut-ętre lŕ que pourrait se trouver la source du mal. Les avionneurs, en effet, peinent ŕ entretenir leur savoir-faire et ŕ transmettre la mémoire collective. Et les financiers ne font rien pour les aider.
Pierre Sparaco - AeroMorning