Par Fabienne
Voilà une semaine déjà que le film a fait son entrée dans les cinémas. Un sujet prometteur et humaniste réalisé par un « artiviste » : JR. Un mois après Banksy, le street art reprend ses marques sur les grands écrans !
Nous vous parlions précédemment du film de Banksy (Faites le mur !) pour lequel les critiques étaient unanimes, et les nôtres tout aussi élogieuses… Aujourd’hui (et depuis maintenant une semaine) , c’est au tour de JR, autre artiste de rue notoire, de réaliser un premier documentaire sur une partie de son travail et d’investir les cinémas français avec Women are heroes.
La condition féminine dans le monde sera pour lui un sujet qui va, 3 années durant, successivement le conduire dans une favela de Rio puis dans des villages du Liberia, en Sierra Leone, au Cambodge ou en Inde.
JR n’en est pas à son coup d’essai voilà déjà quelques années qu’il pratique les sujets sensibles à même la rue ! L’artiste parisien aujourd’hui âgé de 27 ans a débuté ses activités en 1999 grâce à un « oubli » de touriste : un appareil photo laissé pour compte dans le métro. Familier du milieu graffiti, c’est tout naturellement que ses photographies ont commencé à investir les murs comme espace d’exposition, des collages qu’il signait alors « Expo 2 Rue » .
En 2006 avec « Portrait d’une génération » , les jeunes de banlieues parisiennes deviennent le sujet d’une exposition dans les beaux quartiers parisiens. Expérience qu’il va poursuivre de façon plus « sensible » de part et d’autre du mur de séparation de sécurité entre Palestine et Israél : « Face2Face » …
Avec Women are heroes, il poursuit cette série intitulée 28 MILLIMETERS et la complète de ce qui jusque là manquait à ses sujets : la parole ! Ce documentaire ajoute à l’image seule les voix de toutes ces femmes qu’il a rencontré et dont les visages et regards ont été affichés dans des formats gigantesques sur les murs, les toits, véhicules et même parapluies.
Pour en savoir un peu plus, c’est parti pour la bande annonce :
Mes projets artistiques sont toujours construits autour de l’histoire des gens et de l’endroit où ils vivent. Je pratique l’art infiltrant ! D’ailleurs, chaque photo s’accompagne systématiquement d’une interview. J’ai réalisé ce film afin de montrer toutes les couches dissimulées derrière chaque image.
© JR • Slum of Kibera, Nairobi – KENYA – Février 2008.
© JR • The Tree – Favela Morro Da Providencia, Rio de Janeiro – Août 2008.
L’artiste est désormais titulaire d’une récompense, JR a ainsi obtenu le TED Prize qui lui sera remis courant 2011. Un prix d’une valeur de $100,000 qui devrait lui permettre de se lancer dans des projets de grande envergure, jusqu’à présent l’artiste a pris soin de s’autofinancer sans faire appel à de quelconques sponsors. Quant a Women are heroes, il fait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes 2010, en compétition pour la Caméra d’Or. Il s’accompagne par ailleurs de la parution de deux livres Women are Heroes (seconde édition, 2011) et une édition 3 Couleurs – Retrospective JR (que vous pouvez commander en suivant les liens).
Notre retour sur « Women are heroes » ?
Il est à voir évidemment, pour la prouesse documentaire et artistique à la fois, nettement moins pour l’aspect « humain » (J’entends par là que ces femmes sont principalement un sujet photo : on ne rentre que très superficiellement dans le détail des histoires de chacune) ou « critique » de la condition féminine de par le monde (nous sommes très loin d’un quelconque débat féministe ou de questions de parité)…
« Le Monde » où justement l’on peut retrouver une critique -un peu acerbe, il faut le dire- du film, on y parle d’
…autocélébration éhontée sur le dos des femmes du tiers-monde.
Un article d’Isabelle Regnier : à lire ici.
Il faut reconnaître qu’aborder le film sans penser la chose comme un making-of d’exposition risque d’assurer quelques déceptions. Les images sont magnifiques, la qualité du travail et de la démarche artistique qui le soutient indéniablement géniaux. Reste que le regard porté sur ces femmes est tellement dénué de complaisance qu’il en deviendrait presque trop froid, « journalistique ». La présentation du travail de l’artiste demeure le sujet principal. Les photos sont cadrées sur les visages et les regards, donc très proches et pourtant la distance conservée avec le sujet d’un point de vue humain déstabilise complètement, perturbe et empêche d’être totalement submergé par leur histoire… Un choix à double tranchant ! Malgré ces premières impressions, aucun regret.
Les femmes « starifiées » par JR ne tombent pas non plus dans le misérabilisme et la plainte, aucune ne veut clairement fuir sa vie, elles abordent leurs situations respectives avec une combativité et une force surprenantes et ce, malgré les épreuves subies. De belles leçons de vie et un courage qui force l’admiration nous sont servis là par JR !
Je vous invite donc à aller vous forger une opinion et à nous en faire profiter dans les commentaires…
Women Are Heroes de JR 1 h 25. Sortie en salles mercredi 12 janvier 2011.