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Des Amidyves aux amis d'Olivier

Par Oenotheque

Je n’ai pas rencontré personnellement Olivier B. N’ayant ni pu me rendre au dernier Grand Tasting ni à sa dégustation à La Note Rouge au début de l’été. Mais son blog fait partie des endroits où je me suis déjà promené. J’apprécie sa liberté de ton, ainsi que la sensibilité et  l’intégrité que je perçois dans ses écrits. Et j’aime bien entendu ses vins. Des vins à son image, mais qui risquent de bientôt disparaitre. Le 1er janvier, Olivier B., sans s’étendre sur ses motifs, a en effet annoncé qu’il jetait l’éponge, gardait son chapeau mais raccrochait son tablier : il arrête son métier de vigneron ! Blogs, forums, Facebook et Tweeter sont immédiatement secoués d’une vague de stupeur et proposent de généreuses initiatives pour le soutenir. Leur lecture constitue le point de départ de quelques réflexions que je souhaite partager ici. Des réflexions qui ne prétendent à aucun caractère exhaustif ou définitif.

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L’art est difficile, la critique est-elle toujours aisée ?

Le métier de vigneron est un métier exigeant. Il est encore davantage quand on s’éloigne des sentiers battus, des modes, des courants dominants au sein d’une appellation. Chaque millésime remet en cause ce qui semblait avoir été acquis l’année précédente. Le web 2.0 donne la parole à un large public d’amateurs, et c’est très heureux. Mais cela donne aussi à chaque auteur (d’un article comme d’un simple commentaire) une certaine responsabilité.

Il est aisé d’écrire un article ou de s’étendre sur un forum à propos d’une bouteille qui ne nous a pas plu. Parfois, quand le viticulteur travaille en bio et que l’on a décelé de l’oxydation, c’est toute la démarche bio qui est jetée avec l’eau du bain. Des chefs étoilés voient aujourd’hui avec effroi des bloggeurs plonger leur thermomètre dans les plats. Pour qu’une critique ait un minimum d’intérêt, il faut savoir aller au-delà du « j’aime / j’aime pas », mais aussi savoir rester en-deçà de l’affirmation péremptoire d’avis taillés à la hache. Se souvient-on toujours de ce qu’il a fallut de travail et d’investissement personnel avant de rédiger un article critique ? Est-on toujours conscient que cette critique peut heurter ceux qui mettent parfois tant d’eux-mêmes dans leur métier ? Cette réflexion vaut évidemment aussi pour moi, quand j’écris sur un livre ou sur un vin.

Quel est le juste prix ?

Le consommateur est-il toujours prêt à payer le prix qui permet au producteur de vivre décemment de son travail. Les vins d’olivier B. sont vendus globalement 14 ou 30 euros, selon la cuvée (prix cavistes parisiens). Pour qui sait le travail que requiert une démarche comme la sienne, ainsi que la perte de production liée aux rendements faibles, ce prix semble juste. Qui a gouté ses vins ne pourra que confirmer la justesse du rapport « plaisir / prix ».

Mais dans le monde des amateurs de vins, une large proportion préférera, quand bien même ils débourseront cette somme (environ 100 et 200 francs tout de même) les mettre dans une étiquette un peu connue, plutôt bordelaise ou bourguignonne, et sans doute achetée lors d’une foire aux vins en grande distribution*. Par ignorance, bien des amateurs ne mettront jamais cette somme dans un Côte-du-Ventoux. Il en est du vin comme des autres produits alimentaires, mais aussi de la très grande majorité des produits courants, y compris culturels. Seul un patient travail pédagogique d’information peut infléchir cela. Les cavistes, mais aussi les clubs de dégustation et les médias (dont le web 2.0) peuvent et doivent y contribuer.

Le web 2.0 a-t-il de réels impacts dans la vraie vie ?

Question saugrenue, puisque j’y réponds déjà dans mes deux points précédents. Question également saugrenue quand on pointe son nez au-delà du microcosme du vin : les dictatures et les régimes autoritaires et les mettraient-ils autant d’énergie à museler certains de leurs bloggeurs s’ils n’avaient pas d’impact ? Mais force est de constater que ce qui caractérise le web 2.0 s’est bien souvent son instantanéité. Un article de blog qui a du succès recueille généralement des commentaires pendant deux ou trois jours, puis le flux s’amoindrit. Sur Facebook ou Tweeter, la durée de vie d’un post est encore plus brève.

Alors, le mouvement de sympathie qui s’est engagé ici ira-t-il plus loin qu’un simple buzz ? La force de l’émotion n’est pas toujours le meilleur prédicteur de l’action, encore moins de sa pérennité. Mais on se prend à rêver… Olivier B. est le premier surpris de ce mouvement, qui lui fait certainement chaud au cœur. Et il envisage déjà l’avenir autrement (voir son article). Si le web 2.0 ne change pas toujours le monde, il permet tout de même de développer de nouvelles formes de solidarité, et ça, c’est bien appréciable par les temps qui courent !

Difficile de recenser l’ensemble des blogs qui relayent l’information. Et comme ce sont pour l’essentiel des blogs que j’aime bien, je m’en voudrais d’en avoir oublié. Le plus simple est de taper « Olivier B. » sur Google.

* La GD concentre environ 70 % des ventes en France. Son « cœur de marché » se situe en-dessous de 4 € par litre. Le prix moyen des Bordeaux y est en-dessous de 6 €/L. Et lors des foires aux vins, le prix moyen de vente tourne autour de 15 €/bouteille de 75cl.


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