Comme un vent de souveraineté planant à la surface des idées

Par Victor Vieilfault @Vic_Vieilfault

"La nature revient au galop" aime-t-on à clamer sur toutes les ondes qui embrasent nos vies. Tout au long de notre (courte) vie, la sagesse rencontrée nous exhorte à être ce que nous sommes. Le "Quaerere Deum" des moines cisterciens (chercher dieu) s'est laïcisé certes, mais il est un principe toujours actif de notre humanité : de nos jours nous affirmons rechercher "l'unité". Nous voulons marcher sur des chemins de liberté et convoler sûrement vers les cimes de nos rêves les plus fous.

Si la Liberté est à l'homme ce que le souffle est à la vie, la souveraineté est à la nation ce que le coeur est au corps. Car, comme pour chaque vérité, il faut à la liberté un écrin pour la porter et la cultiver. Il n'y a pas d'amour sans parent, il n'y a pas de relations sans langage. Chacune de nos petites vies est mystérieusement emmaillotée dans les draps doux et chauds d'une famille, d'une communauté de vie et d'une patrie. C'est ainsi et nous sommes appelés à en prendre conscience, au risque de poser un regard biaisé sur la réalité et de ne pas pouvoir offrir les mêmes chances à nos enfants.

La souveraineté est en soi un concept juridique très simple à comprendre : c'est le pouvoir pour un peuple de décider par lui-même de ses intérêts vitaux (sécurité, économie, social, justice).

Depuis une trentaine d'années, les gouvernements européens ont décidé d'abandonner des pans entiers de leur souveraineté nationale sur l'autel du dogme bruxellois qui invite généreusement au "partage des souverainetés". Et c'est ainsi que "l'Europe des 27" est devenue ce dindon de la farce que nous connaissons aujourd'hui, seule puissance mondiale à ne plus croire en l'influence de la politique. Les élites non élues de Bruxelles et Francfort ne croient qu'au marché, feignant d'anticiper un ralliement massif et imminent de l'ensemble de la planète à leurs thèses naïves et sans vision.

Mais le choc du réel vient bousculer les apôtres du mondialisme sans frontière et des nations sans peuple. La "souveraineté" est de nouveau au programme des idées et des écrans ! Hier matin, en passant dans le hall de l'université je découvre la dernière annonce : "Conférence sur la dé-mondialisation : quel retour des souverainetés monétaires et économiques?". Les papiers et les sondages sur la fin probable de l'euro se multiplient. Loin de la pudeur imposée par le politiquement correct pendant des années la puissance de la vague populiste qui traverse l'Europe toute entière bat en brèche l'immobilisme béat des élites pommées. Marine Le Pen fait un tabac lorsqu'elle rappelle à juste titre qu'il n'y aura plus de politique sociale en France si il n'y a plus de cadre national, celui qui définit la communauté d'un peuple prêt aux sacrifices communs.

De son côté, l'économiste centriste Christian Saint-Etienne met en garde les dirigeants européens contre leurs naïvetés dangereuses face aux offensives chinoises et américaines qui défendent leurs économies par un protectionnisme évident. Pour lui, c'est presque assuré, l'euro ne peut pas perdurer tel qu'il est construit actuellement. Le différentiel économique entre l'Europe du Nord industrielle tirée par la locomotive allemande et l'Europe du Sud emmenée par la France, ne cesse de se creuser. L'euro faible asphyxie mois après mois les pays du club et med (Espagne, Portugal, Italie, Grèce), et décourage nos exportateurs. Un grand bol d'air est attendu comme le messie ! En bref, la base des PME de ces pays espère avec foi la perfusion de la dévaluation monétaire. Leur survie en dépend directement.

Pour développer sa puissance, l'Europe a besoin de mettre en place des marges de manoeuvre pour ses entrepreneurs et ses acteurs. Respirer tranquillement l'air de leurs paysages méditerranéens, atlantiques et continentaux, c'est tout simplement ce à quoi aspirent les peuples européens. C'est de la culture et du for intérieur que naît l'économie, pas l'inverse.

C'est le soleil qui fait fleurir puis mûrir la vigne accrochée aux coteaux de nos terroirs. Le travail de l'homme ne consiste qu'à permettre à la nature de faire grandir les fruits de la création. C'est en tremblant mais en vibrant avec l'histoire que mes doigts retranscrivent désormais l'écho d'une voix au timbre familier : 

"Il y a un pacte séculaire entre la grandeur de la France et la Liberté du monde". Charles de Gaulle.