Clé de lecture pour la compréhension des sources de l’art moderne, le
mouvement d’avant-garde De Stijl (Le Style) synthétise, dès la fin des
années 1900 et dans les années 1920, une vision esthétique et sociale
qui aspire à l’universel et rêve d’inventer un « art total ». Piet
Mondrian est la figure centrale de ce mouvement. Il mène à
Paris de 1912 à 1938 sa quête d’harmonie plastique. En 1940, il émigre à New York où il décède en 1944.
Quel contraste entre l'homme à la petite moustache précisément taillée, les lunettes rondes et le costume bien coupé d'un expert-comptable et l'idée qu'on peut se faire d'un artiste qui a révolutionné son siècle. Pourtant, c'est la surprise qui nous assaille en regardant le visage de Piet Mondrian, dont il faut aller voir la rétrospective tout à fait éclairante au Centre Pompidou (Paris), jusqu'au 21 février prochain.
Mais comment un peintre passe-t-il du dessin ultra-classique à une version totalement "intellectuelle" des lignes et des couleurs primaires ?
En fait, c'est une oeuvre en évolution constante, du post-impressionnisme à l'abstraction la plus épurée, en passant par la case décisive du cubisme, et surtout replacée dans le cadre du mouvement "DE STIJL" qui a marqué toute la période de l'entre deux guerres. En fait, nous retrouvons aujourd'hui, comme évidentes, les lignes et les couleurs de notre XXème siècle, toute la modernité de l'architecture que j'aime : Charte d'Athènes, Bauhaus, Le Corbusier, qui naissent devant nous. Et nous avons donc autant de mal à nous représenter ce que ces novateurs avaient de révolutionnaire. Alors, il faut bien regarder la date de ces toiles....
"De Stijl", c'est une revue dont le premier numéro paraît à Leyde en octobre 1917, le
dernier à Paris peu de temps après la mort de Theo van Doesburg, son
fondateur et rédacteur, survenue en mars 1931. "Durant les quatorze années de son existence, le mouvement
transdisciplinaire De Stijl offre une transcription formelle, plastique,
picturale et architecturale des principes d'une harmonie universelle, et
la met en oeuvre. La peinture, la sculpture, la conception de mobilier
et le graphisme, l'architecture et bientôt l'urbanisme sont les supports
de cette expérimentation conduite simultanément. Pluridisciplinaires,
les productions du Stijl le sont par nature, outrepassant les
cloisonnements traditionnels et académiques entre arts majeurs et
mineurs, entre arts décoratifs, architecture et urbanisme : « de
l'esprit à la ville"."
En fait, Piet Mondrian fait progressivement une interprétation de plus en plus abstraite du cubisme analytique de 1912 à
1914 à Paris, jusqu'à ce qu'en 1917, (de retour à Paris jusqu'en 1938)
il concentre tous ses moyens sur la construction d'une simple
composition parfaitement équilibrée faite de formes réduites à des
rectangles et quelques couleurs, placées sur une trame orthogonale, et
le tout décliné en séries jusqu'à la fin de sa vie.Une reconstitution de son atelier, rue du Départ, montre à quel point l'homme vit selon les principes (énoncés d'une écriture superbe en un français parfait) qu'il s'est donné, avec les artistes du mouvement De Stijl.
L'exposition est très didactique, adopte une présentation chronologique facile à appréhender, présente les travaux des autres peintres impliqués dans le mouvement ainsi que les applications à l'architecture, en particulier dans le domaine du logement. Une leçon d'histoire de l'art toujours très actuelle.