Ce qui m’agace là-dedans ne peut sans doute pas être retenu contre l’auteur : je trouve pour tout dire le projet un peu vain. Il s’agit en fait de redire avec les mots de Lennon ce qu’on connaît déjà de sa vie. Mais je ne peux me défendre de l’impression que ce que Lennon avait à dire, il l’a dit, et de fort belle manière. Que gagne-t-on à voir expliquer par un simili-Lennon le lien entre la vie de Lennon et l’œuvre de Lennon ? On imagine que la matière brute de cette vie a cuit dans Lennon comme dans un chaudron pour donner une musique nouvelle et profondément personnelle : que découvre-t-on de plus lorsque sur cette métamorphose enchantée le chaudron lui-même fournit son point de vue ? A mon sens, rien d’inoubliable.
J’aime autant voir Lennon par les yeux d’un autre, avec les mots d’un autre : il me semble que lui-même ne peut pas s’ajouter grand’chose. Lennon-Foenkinos ne peut pas, par exemple, ou en tous cas ne tente pas d’approfondir les complexités des relations amicales de John : pudeur ou incapacité bien vraisemblables, mais pas moins frustrantes pour autant. Et quand il parle de sa mère, ou de Yoko, ses mots sont bien plats par rapport aux chansons, ou même par rapport aux photos dans lesquelles, allez savoir pourquoi, on croit tant voir du « vrai » Lennon.
Lennon, David Foenkinos, 2010