Tout débuterait à l’adoption de la loi organique relative aux lois de finances dite « Lolf » en 2001 et à son application en 2006. L’une des finalités de ce texte, outre le fait d’améliorer l’efficacité de l’action publique, serait de substituer, à une logique de moyens, une logique de résultats.
A partir de là, nous pourrions vite glisser à l’expression « obligation de résultats », qui a sa signification juridique ! et… sa pratique caricaturale !
Piloter l’école par les résultats, fait toujours appel, plus ou moins aux seuls résultats statistiques. Or évidemment, ces résultats ne peuvent guère rendre compte de la réalité du travail éducatif, et de la manière dont l’établissement assume ses missions… Il faudrait parler de la finalité de notre action; et comment traduire l’autonomie, par exemple, ou le respect de l’altérité..? Et, nous ressentons, au delà des indicateurs, qu’il ne faudrait pas que nous renoncions à ce que nous ne savons pas ou ce que nous ne pouvons pas mesurer….
De plus, et c’est fondamental, en droit de l’éducation : l’obligation de résultats n’est pas légitime : tous les moyens ne se valent pas pour faire apprendre. ( par exemple : Piloter par les résultats en EPS, ce serait, prendre le risque de justifier le dopage .. ! )
« Comme le médecin, l’enseignant n’est soumis qu’à l’obligation de moyens. Et je ne devrais pas dire « qu’à l’obligation de moyens », car cette dernière est, en réalité, bien plus exigeante que l’obligation de résultats. L’obligation de moyens, c’est l’obligation d’inventer sans cesse de nouvelles situations capables de mobiliser les élèves et de les aider à se dépasser… » Meirieu
« Dans le pilotage par les résultats, ce qui importe n’est pas le résultat en lui-même mais la réflexion qu’il suscite. Le pilotage par les résultats n’engendre pas une obligation de résultats mais une obligation de moyens, obligation générale de prudence et de diligence. Ce qui importe est le débat généré par la connaissance des indicateurs. L’obligation de moyens peut être définie comme une obligation d’expliquer. Cette analyse est confortée par la Cour de cassation. Depuis 2000, le non-respect d’objectifs par un salarié ne constitue pas, en lui-même, une cause réelle et sérieuse de licenciement. Les juges procèdent à une analyse approfondie de la situation. Ils vérifient, d’une part, l’existence d’objectifs réalistes adaptés au contexte professionnel du salarié et à son niveau de compétence. Ils ne manquent pas de prendre en compte, d’autre part, le comportement de l’employeur qui doit être irréprochable en mettant, notamment, à la disposition de son salarié tous les moyens nécessaires à l’accomplissement de sa mission. » Education & management, n°37, page 10 (11/2009)
Dans le rapport que l’EPLE établit avec sa hiérarchie, nous devrions être plus au clair sur le rôle de chacun, en particulier, lors de la signature du « Contrat d’objectifs » …
- Quel est le rôle et la place de chacun des niveaux, pour définir les appuis, et écarter les obstacles ?…
- Quel accompagnement est-il prévu des services de l’inspection académique ?
- Comment passer d’une logique d’injonction à une logique d’appropriation, et ce à tous les niveaux ?
Il est naturel de penser, que parler ( à tort ) d’obligation de résultats en éducation puisse représenter un véritable choc pour un milieu scolaire et aussi pour un système d’éducation dont la seule véritable priorité au cours des quarante dernières années a été l’accessibilité à l’éducation pour le plus grand nombre.
L’utilisation d’un vocabulaire d’entreprise non adapté ne peut que créer des malentendus et des réactions hostiles .. ! Aussi, il serait nécessaire d’entrer dans une réflexion, pour répondre à quelques questions, comme celles-ci :
- Comment l’Ecole peut-elle se mesurer à la pression consumériste ( c’est à dire en équivalent : l’irresponsabilité sociale …) ?
- L’économie de l’éducation permet-elle de légitimer l’obligation de résultats ?
- Ensuite, qu’en sera t-il de l’obligation de compétence … ? et pourquoi pas évoquer ensuite le « défaut de performance de l’enseignant » … ?
- Ne serait-il pas nécessaire de définir auparavant ( comme en biologie..) une éthique de l’évaluation des résultats en éducation ?