FN : le discours et les actes (1)

(je propose à tous les blogueurs de gauche qui souhaitent reprendre le flambeau de ce combat qui pourrait nous unir en publiant à leur tour des articles sur le même sujet dans la même logique que celle que je décris ci-dessous – mettre en lumière ce qui n’est pas sur le FN auprès de ces militants et sympathisants, en gros  – de reprendre ce même logo, trouvé chez  le colporteur,  qui me semble parlant, non ? )

L’argument à deux balles de certains, qui court probablement depuis que le FN existe, ou en tous cas depuis qu’il connait une telle visibilité, selon lequel le fait de s’y attaquer frontalement en dénonçant ses pratiques, ses idées, son discours, son racisme, sa xénophobie, et tout ce que ce parti répand de haineux et de malsain serait contreproductif et ferait ses affaires en contribuant à sa médiatisation, cet argument là, je le conspue, je le méprise, je le vomis et le jette aux chiens galeux des bidonvilles de la pensée de bazar, abreuvée de mauvaise bière au kilomètre.

On me faisait déjà le coup au début des années 90, quand le FN commençait à monter dangereusement dans les intentions de vote, et que nous avions créé une petite assoce sur le coin (le sursaut… voir fin de page) avec des potes pour lutter contre l’hydre aux têtes multiples qui se dissimulait sous les oripeaux de la respectabilité locale, tous ces élus ruraux, ses commerçants, ses dignes fonctionnaires de sous préfecture et ses conseillers municipaux responsables de comités des fêtes qui nous excluaient du périmètre de leur foire sous les prétextes les plus fallacieux alors que nous haranguions les passants pour les sensibiliser aux dangers de ce genre de pensée dite populaire, comme si le peuple était un.

Aujourd’hui, le climat s’est dégradé, la crise est passée par là, le débat sur l’ identité nationale a répandu ces idées nauséabondes et de surcroit fausses avec ses amalgames faciles dont ne se prive pas non plus la droite soi-disant moins extrême, preuve d’une contagion dangereuse pour notre démocratie.

L’oligarchie que nous sommes de plus en plus nombreux, à gauche du moins, à dénoncer, se double au FN de népotisme (quoique… à l’ump aussi ! Souvenez vous de l’histoire #jeansarkozypartout) et l’on voit sans surprise la fille succéder au père sans que cela n’émeuve davantage la population, qui pourtant crie haro sur le baudet quand cela se passe ailleurs… à juste titre.

La république irréprochable, c’est valable également pour la gauche, qui devrait l’être encore plus, compte-tenu de son positionnement sur le registre moral. Dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit sans qu’il y ait de hiatus, c’est quand même plus crédible aux yeux des électeurs, non ?

Me reste toujours en travers de la gorge cette promesse du PS sans cesse renouvelée depuis la nuit des temps du vote des étrangers aux élections, qui n’a jamais été tenue et qui, pourtant, serait une si bonne arme contre les votes à tendance xénophobe… Ils vivent ici, travaillent ici depuis plusieurs années ? Qu’ils puissent donc apporter leur voix à la construction politique de notre pays, cela me semble on ne peut plus légitime et contribuerait en outre à davantage d’intégration que celle dont on leur renvoie sans cesse qu’elle leur fait défaut sans jamais leur en donner les moyens. On l’a bien vu avec l’affaire des prières dans la rue, débat médiatique si rapidement refermé pour ne surtout pas ouvrir la boite de Pandore dont l’entra perçu a servi les intérêts de certains…

Pour en revenir au parti d’extrême droite, je ne pense pas que l’on gagnera sur le plan du débat d’idées, les sympathisants de ce parti réagissant davantage par dégoût d’une classe politique de droite et de gauche qui n’a pas toujours montré le bon exemple et qui de surcroît n’a pas été très attentive à ses conditions de vie au quotidien, à ses préoccupations les plus élémentaires : un toit, de la nourriture correcte (non, même désargenté, on ne se fait pas forcément plaisir à manger du mac do et faire ses courses chez Liddl… alors qu’on est parfois, en plus, obligé d’y travailler dans des conditions infernales), du boulot stable et décemment rémunéré dans des conditions correctes, je ne pense pas que ce soit demander le Pérou…

Mais aujourd’hui, ces droits élémentaires sont devenus un luxe inaccessible pour de plus de gens, y compris des classes moyennes qui se voient contraints d’habiter dans des grands ensemble à la promiscuité insupportable et à la sécurité la plus élémentaire difficile…

Toutes les conditions sont donc réunies pour que les français modestes (ou pas…) soient tentés de se diriger vers les extrêmes… Et fassent du vote protestataire une élection réussie… pour ceux qui plus tard (je ne pense pas que tous ceux qui votent pour le FN s’en rendent bien compte…), risquent de les tyranniser bien davantage que ne le fait aujourd’hui Sarkozy.

En effet, intéressons nous quelques instants au programme… frontiste et nationaliste. Lepéniste. Le programme d’une famille qui n’est donc pas que politique et qui a su asseoir sa propre situation personnelle sur la santé du parti. N’y a-t-il pas là un paradoxe pour des gens modestes, voire dépourvus, de voter pour une famille de milliardaires ? Mais bon, puisque Marianne nous dit qu’on peut être milliardaire et de gauche… Pourquoi ne serait-on pas populaire et FroNtiste !

Par delà ce stupéfiant paradoxe, intéressons nous à ses idées et à ses propositions, histoire de les mettre en lumière pour mieux dénoncer les méfaits du programme du FN sur les intérêts de ceux et celles qui votent pour ces gens là, dont les discours ne sont pas vraiment en conformité avec les actes…

Ce sera bien plus utile à mon sens que de se centrer sur les discours, qui dissimulent tant d’attaques et de coups bas pour les intérêts des plus démunis et de tous ces inconscients qui votent pour cette caste de nantis moralement condamnable.

Ainsi, pour seule exemple, l’anecdote de cet argument technique soi-disant implacable des lepénistes, si efficace dans l’imaginaire populaire, qui consiste à brandir la menace de supprimer les allocations familiales pour les étrangers. Mais mon pauvre Robert, c’est déjà fait ! Elles sont assorties pour les étrangers de conditions d’accès si draconiennes qu’on ne peut guère faire mieux en la matière, pensez bien que depuis qu’on parle de ce soi disant motif d’injustice envers les plus démunis perpétrés par des hordes de feignants d’étrangers qui viendraient vivre en France aux crochets des natifs, pillant nos caisses pour, non contents de ne pas travailler, faire vivre leur famille au bled, la CNAF a fait le nécessaire depuis longtemps.

Après, les histoires de fraude, ça existe, mais qu’on me donne l’occasion de penser qu’elles sont plus nombreuses à être commises par des étrangers que par des français pure souche (comme si cela pouvait exister… Misère…) avec des preuves irréfutables à l’appui, et j’y croirai.? Mais pour l’instant, je considère qu’il s’agit davantage de faits délictueux et donc de délinquance organisée qui concerne la justice et pas la politique, sujet principal qui m’occupe ici. Et plus aprticulièrement les sujets ayant trait à la politique sociale.

Je ne résiste donc pas outre mesure à l’impulsion de vous voir partager le texte qui suit, d’une troublante actualité, et cela bien qu’il me faille par honnêteté intellectuelle comparer sa teneur avec le programme actualisé du FN. Mais d’après le peu que j’en ai lu, je ne suis pas inquiet…

Le programme « social » du Front National

Il ne suffit pas de dénoncer le Front National, d’appeler à ne pas voter FN, de manifester contre le FN.

Il faut aussi mettre en lumière la régression sociale que représente son programme pour les travailleurs.

Ci-dessous une analyse du programme du Front National, élaborée lors des présidentielles
par le Centre Confédéral d’études économiques et sociales de la CGT, toujours d’actualité.

Mise en cause de la retraite, apartheid social, augmentation des impôts indirects, cadeaux fiscaux aux entreprises et aux ménages privilégiés, telles sont les vraies orientations du programme social du Front National.

Derrière les clameurs du Front National contre « l’ordre établi » et un parti pris affiché « en faveur des français modestes », se cache en fait un véritable conservatisme. Le parti d’extrême droite s’appuie sur les vieilles recettes capitalistes et des choix de classe dissimulés sous des phrases et des formules séduisantes qui paraissent faire échos aux problèmes que se posent une partie des salariés. Il faut faire la clarté sur ce que propose Le Pen.

1°) Sous couvert de défendre les « droits sociaux des nationaux », le Front National crée en fait les conditions d’une déstabilisation plus grande du système existant.

• la gestion des « droits sociaux des étrangers » s’organiserait dans des institutions sociales spécifiques

• des institutions sociales à caractère privé notamment pour les retraites et la maladie pourraient être créées venant en concurrence avec la Sécurité sociale

• seuls les « gros risques » seraient pris en charge par la Sécurité sociale. Tout le reste étant laissé à la charge des ménages.

Pourtant l’immigration loin de coûter à la Sécurité sociale, contribue à son équilibre financier en raison de la structure de sa population (proportion d’actifs plus grande, faible consommation médicale). L’introduction de la concurrence au sein des régimes sociaux romprait les péréquations que permet le système obligatoire. La réduction des cotisations sociales promise, accompagnerait donc un recul des garanties. Enfin, l’octroi de droits réduits aux immigrés apporterait au patronat une maind’oeuvre bon marché taillable et corvéable à merci. On transformerait la population immigrée en machine de guerre contre les grilles de rémunérations et le SMIC qu’il prétend défendre. Le Front National veut la baisse des rémunérations de tous les salariés et la précarisation de leur situation.

2°) Le FN prend le parti des profits

Le Front National est « favorable à la flexibilité du temps de travail » et s’oppose à une réduction du temps de travail sans baisse de salaires. On voit clairement transparaître le discours patronal. La proposition « d’abroger la loi Aubry » est clairement formulée. Par ailleurs, le Front National attribue le bas niveau des salaires à la « concurrence de la main d’oeuvre du tiers-monde qui s’exerce par le biais de l’immigration et des échanges commerciaux ». Le discours Le peniste fait le silence total en matière de profits. Pire encore, il veut les augmenter davantage en multipliant les cadeaux fiscaux aux entreprises : allégements de charges, suppression de l’impôt sur les sociétés, suppression de la taxe professionnelle…

3°) Le FN prône un repli national qui menacerait l’emploi et la consommation

Ce que propose le Front National, c’est une politique autarcique, qui ne peut que provoquer l’appauvrissement de la France et son isolement. Le débat réel sur le libre échange et le contenu de l’Union Européenne appelle bien entendu d’autres réponses : maîtrise concertée des échanges, régulation des mouvements de capitaux, mesures de taxation contre les spéculateurs. La limitation des importations et la hausse des droits de douane conduirait à majorer le prix des produits consommés. C’est donc une baisse du pouvoir d’achat des Français qui serait inéluctable. D’autre part, ces mesures ne manqueraient pas de susciter des dispositifs de rétorsion de la part de nos principaux partenaires, ce qui limiterait nos exportations et se traduirait par une détérioration de la situation de l’emploi. Le discours du Front National sur « la concurrence sauvage du tiers monde » est d’autant plus démagogique que dans l’ensemble, le commerce de la France est excédentaire vis à vis de la plupart de ces pays, Afrique et Moyen-Orient particulièrement.

4°) Le FN développe un discours ségrégationniste qui dissimule les vraies causes du chômage

Le Front National préconise un impôt sur l’emploi de travailleurs immigrés, une taxe anti-immigré peut-on dire, soi-disant pour favoriser l’emploi des travailleurs français. Cette proposition est dans la droite ligne du discours lepeniste selon lequel les immigrés sont responsables du chômage. Il n’y a pourtant pas de relation de cause à effet entre le chômage et l’immigration. En voulant instaurer une taxe anti-immigré et en même temps supprimer la taxe professionnelle et réduire l’impôt sur les sociétés, le Front National veut dissimuler la vraie cause du chômage qu’est la course à la productivité et au profits.

5°) Le FN entérine un doublement de la TVA et la réduction de la fiscalité sur les ménages les plus riches.

En matière de finances publiques le Front National prévoit des mesures particulièrement régressives :

• hausse de l’impôt indirect et particulièrement de la TVA

• suppression de l’impôt sur le revenu

• suppression de la taxe professionnelle et baisse de l’impôt sur les sociétés

• réduction des droits de succession

• suppression des prélèvements sur les plus-values boursières.

C’est un programme particulièrement inégalitaire puisque dans un contexte où les inégalités s’accroissent, il va favoriser les plus riches (patrimoines, hauts revenus, profits financiers) et faire payer les plus pauvres (impôt sur la consommation). Il y a en a pour tout le monde sauf pour les ouvriers et les ménages modestes. Tout compte fait, les propositions de Monsieur Le Pen aboutissent à doubler la TVA, cet impôt injuste, sur tous les produits.

6°) Le FN sacrifie toutes les dépenses sociales et d’avenir

En matière budgétaire, le Front National a deux priorités : le militaire et les dépenses dites de sécurité. Il prévoit de réduire de 110 milliards d’euros en 10 ans les dépenses publiques. Des sommes considérables seraient consacrées au renforcement de la police et de l’administration pénitentiaire : 10 000 nouvelles places de prisons seraient construites, il doublerait les effectifs de la police. La dérive sécuritaire prend ainsi le pas sur toutes les dépenses d’avenir : éducation, formation, équipement public qui sont sacrifiés. De manière logique même s’il s’en défend désormais, le Front National propose une privatisation massive des entreprises publiques un programme de 300 milliards de francs était prévu en 1993. Le Front National trace ainsi la perspective d’une France sans autre ressort que la peur. Pourtant, la sécurité dépend aujourd’hui de multiples facteurs dont le moindre n’est pas le développement économique, la maîtrise des nouvelles technologies civiles et la qualification de sa population. Le Front National est ainsi le fossoyeur de toute ambition nationale.

7°) Le FN veut « ramener les femmes à la maison »

Le Front National aligne une quantité impressionnante de promesses : calcul des retraites sur les dix meilleures années, création d’une allocation dépendance par exemple, mais veut revenir au nom de « la liberté de choix », sur le droit à la retraite à 60 ans. Aucune recette correspondante n’est naturellement prévue ce qui rend totalement illusoires les promesses. En matière familiale, tout est fait pour inciter les femmes à un retour à la maison alors que leur travail est une condition d’égalité et le gage d’un dynamisme économique. Le Pen rejoint là les idées les plus rétrogrades. Il prône un revenu maternel égal à 1,5 fois le SMIC et l’abrogation du PACS et de l’IVG. C’est une vision réactionnaire de la famille qui est véhiculée, proche de l’ordre moral et des politiques autoritaires. Le Front National a-t-il décidé de reprendre certains thèmes pétainistes ?

Jean-Marie Le Pen ment lorsqu’il affirme démagogiquement être « socialement à gauche ».
Monsieur Le Pen est économiquement et socialement à l’extrême droite. Il est réactionnaire et conservateur. Il est dans le camp des privilégiés.

16.03.2004

Pour écrire ce billet et ceux qui vont suivre sur le même sujet (analyse détaillée des propositions), je me suis appuyé dans un premier temps sur les sources suivantes :

• le programme officiel du FN, ici.
• L’analyse de la CGT qui, bien qu’elle date de 2004, n’en demeure pas moins d’actualité.

• Le site Service public.fr

• Si vous en connaissez d’autres, n’hésiter surtout pas à me le faire savoir en commentaires afin de nourrir mes billets suivants.

La suite au prochain épisode.