Séisme à Haïti, canicule en Russie, inondations au Pakistan, éruptions volcaniques en Indonésie... les forces de la nature ont été particulièrement meurtrières en 2010. C'est ce que confirme ainsi les rapport de Munich Ré ou encore de catnat.net, un site dédié aux catastrophes naturelles, qui souligne que le bilan humain des catastrophes naturelles pour l'année écoulée est le plus élevé depuis au moins 1983.
Si les chiffres diffèrent selon les rapports, il n'en demeure pas moins que les faits sont là. Au total, catnat.net, via sa base de données BD CATNAT, a comptabilisé 788 événements catastrophes naturelles en 2010, un chiffre bien supérieur à la moyenne de ces trente dernières années (630 catastrophes annuelles). Elles ont fait presque 6 fois plus de victimes que la moyenne des catastrophes depuis 1980 : plus de 390.000 morts contre 66.000 en moyenne, et ont été plus coûteuses (130 milliards de dollars de dégâts contre une moyenne de 95 milliards d'après le réassureur Munich Ré).
Tous ces événements nous amènent à nous interroger : quelles sont les raisons de cet accroissement ? Qui sont les responsables ? Qui sont les vraies victimes et que pouvons- nous faire pour éviter ces catastrophes ?
La part de l'Homme
L'homme a souvent une part de responsabilité dans le bilan de ces tragédies, soulignent les experts. Le séisme de magnitude 7 qui a frappé Haïti le 12 janvier, faisant plus de 316.000 morts et quelque deux millions de sans abri, en est un parfait exemple. Ravagée par le tremblement de terre, Port-au-Prince compte presque trois fois plus d'habitants et davantage de bidonvilles qu'il y a 25 ans. Si le même séisme s'était produit en 1985, le nombre total de morts aurait été probablement d'environ 80.000. Ainsi, le 27 février, un séisme bien plus puissant, de magnitude 8,8, a provoqué un tsunami et la mort de "seulement" 486 personnes dans une région du Chili moins peuplée, moins pauvre et dotée de bâtiments plus résistants que Port-au-Prince.
L'année a aussi été marquée par deux épisodes météorologiques exceptionnels. Cet été, la Russie a connu une canicule meurtrière durant laquelle une température record de 38,2 degrés Celsius a été enregistrée à Moscou. La surmortalité due à cet événement a été estimé à 55000 morts par les autorités Russes. De son côté, le Pakistan a été frappé par des inondations catastrophiques qui ont submergé 160.000 km carrés et fait 2600 morts.
Le fait est que, selon de nombreux experts, les épisodes météo extrêmes survenus cette année apparaissent comme des symptômes du réchauffement climatique causé par l'homme. Les chercheurs ont ainsi calculé que sans le réchauffement, la canicule de cet été en Russie ne se produirait qu'une fois tous les 100.000 ans.
Des données préliminaires montrent également que 2010 a été l'année la plus chaude jamais recensée dans 18 pays. Et elle pourrait être l'année la plus chaude jamais répertoriée sur la planète ou au moins l'une des trois plus chaudes, selon l'Organisation météorologique mondiale (OMM).
Malgré le scepticisme de certains, qui se demandent comment la vague de froid peut expliquer le réchauffement climatique, on ne peut donc que se rendre à l'évidence : oui, l'augmentation de ces catastrophes naturelles est malheureusement bien liée au réchauffement climatique, lui-même lié à l'activité humaine qui amplifie ce phénomène : augmentation des émissions de gaz à effet de serre, déforestation, dégradation des sols, bétonisation, destruction de la mangrove...Et la plupart des Etats, dont la France, ont d'ailleurs déjà lancé un plan d'adaptation en vue de se préparer à affronter les multiples conséquences de ce réchauffement.
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Tous les continents sont touchés
Si le séisme en Haïti a été de loin la catastrophe la plus meurtrière, devant la vague de chaleur en Russie et les inondations au Pakistan, des tremblements de terre ont également tué au Chili, en Turquie, en Chine et en Indonésie. L'activité sismique a été intense en 2010. Entre janvier et la mi-décembre, 20 séismes de magnitude 7 ou plus ont été dénombrés, contre une quinzaine habituellement.
Les catastrophes naturelles n'avaient plus été aussi meurtrières depuis 1983, année marquée par la sécheresse et la famine en Ethiopie, selon l'OMS. Swiss Re estime de son côté qu'il faut remonter à 1976 pour trouver un nombre plus élevé de décès liés à de tels événements.
Les catastrophes naturelles ont également causé pour 222 milliards de dollars (169 milliards d'euros) de pertes économiques en 2010. C'est plus que la moyenne, mais ce n'est pas un record. En Islande, le volcan Eyjafjöll a notamment paralysé le trafic aérien pendant des jours en Europe, avec des conséquences notables sur l'activité économique du continent.
Les inondations ont fait 6.300 morts dans 59 pays entre janvier et septembre, selon l'OMS. En début d'année, de fortes tempêtes de neige se sont abattues sur les Etats-Unis, tandis que la Chine et la Russie ont enregistré des chutes de neige record.
En octobre, l'Indonésie a connu en l'espace de 24 heures un séisme meurtrier de magnitude 7,7, un tsunami qui a fait plus de 500 morts, et le réveil du volcan Merapi, dont les éruptions se solderont par plusieurs centaines de morts. Le pays avait déjà eu son lot de catastrophes depuis le début de l'année, enregistrant des centaines de morts dans des inondations, des glissements de terrain et des séismes.
Aux Etats-Unis, l'Agence fédérale de gestion des urgences (FEMA) a déclaré un nombre record de catastrophes majeures dans le pays en 2010: 79, contre 34 dans une année moyenne.
400 à 500 millions de personnes dans le monde vivent dans des grandes villes exposées à un risque sismique majeur. Un séisme comme celui d'Haïti pourrait, selon lui, se reproduire dans une dizaine de villes, par exemple à Alger ou Téhéran.
Les Eco réfugiés ou réfugiés climatiques
L'accumulation de ces catastrophes naturelles a entrainé l'apparition ou la confirmation d'un nouveau type de réfugiés, les éco-refugiés. Ce sont les victimes de la montée des eaux et de la destruction du littoral qui se voient obligées de quitter leur pays pour survivre à une situation dont elles sont les dernières responsables.
De graves menaces pèsent sur leur sécurité physique, tant au cours de leur fuite que pendant la période où elles vivent loin de chez elles. Leur situation explique le pourcentage souvent extrêmement élevé de décès parmi les déplacés, en particulier parmi les personnes plus faibles. Les difficultés rencontrées par leurs proches restés sur place, ou par les communautés qui les accueillent viennent encore aggraver le problème.
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20 millions de réfugiés climatiques en 2008, un milliard en 2050 ?
Ou est notre responsabilité ?
Désormais, nous savons que le réchauffement climatique, confirmé par le GIEC, est une réalité, et que l'activité humaine joue un rôle majeur dans l'amplification du phénomène. Et nous sommes tous, en tant qu'individus, directement ou indirectement responsables de ces catastrophes. Par notre comportement vis-à-vis de l'environnement. Par notre façon, raisonnable ou boulimique, de consommer. Par le choix de produits écologiques. Par le choix des marques respectueuses du développement durable au détriment des autres qui finiront par s'adapter à nos nouvelles exigences ou disparaître faute de clients... Le pouvoir de l'individu est finalement immense. Et ce pouvoir nous devons l'exercer sans tout attendre des Politiques.
L'augmentation du nombre de catastrophes naturelles et de leur intensité ne nous permet plus de fermer les yeux. Elle nous oblige à nous sentir concernés et à nous impliquer.
Faisons juste l'effort de nous poser les bonnes questions et interrogeons-nous chacun sur ce que nous pouvons faire pour améliorer la situation. Et même si nous ne menons qu'une seule action, si celle-ci a du sens, elle portera ses fruits.
" La pire attitude est l'indifférence " nous rappelle ainsi Stéphane HESSEL, Grand résistant et co-rédacteur de la déclaration universelle des droits de l'homme en 1948, dans son dernier ouvrage, "Indignez-vous! ".
Valentin Tesseron
Pour accéder au Tableau de bord des catastrophes naturelles de l'année 2010, rendez-vous sur le site catnat.net
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