Au cours du temps, écrire ne se tarit que par instants, le rythme est au poignet, là où la main avance, plus sûre même que les paroles pressées contre les tempes, main vive où dort la chance d’enrouler les syllabes que l’esprit métamorphose en mots, visages, amours longues, déroulements souples des digitales qui bientôt verront le jour et nos sourires. La tourbe a beau geler, craquer sous les pas, chaque avance sur le froid élargit la durée du jour, la chute de l’ombre est stoppée ; cascade inverse, l’air des semaines chavire dans le bon sens, l’orbe est avec nous.
La naissance est à l’hiver ; notre souffle brume là devant, halète au futur, la joie en vérité couve sous la neige, les rayures des semelles gravent des rondes enfantines sur les flaques gelées, mes doigts étalés sur les vitres forment une boussole plein sud et c’est parce que je souffle (que je vis) que l’air me répond en nuées caressantes refluant sur mon front.
Il m’arrive parfois de rêver que j’ai pris le mauvais train, ou plutôt que je suis monté dans un train dont j’ignore la destination, il m’entraîne vers la nuit et c’est tout ; d’emblée s’éveille à l’intérieur du rêve déjà, qu’après tout mon corps est en automne, que le temps a fondu, c’est vrai, mais quoi, je n’envie pas ce qui fut (sauf amours et enfants) et c’est au présent que la naissance se pétrit, et me voilà éveillé et en larmes, j’entends un océan qui me lèche les mains, c’est ce peu de temps que je sais, devine, avide, je verrai toutes sortes de printemps, éviterai les miroirs pour ne pas voir ce que mon visage devient, la belle allure du temps compensera et surtout la liberté de dire, l’enfance d’écrire, ces pas enfin sur le mystère de l’affaire intérieure aux questions insondables et splendides. J’irai aux aurores tenter la palette des joies, un œil suffit, une main qui se pose sur le globe levant, bientôt donc à deux doigts des présences heureuses, car bientôt est mieux encore que si cela était, l’attente est grosse de joies, bientôt donc maintenant.