Il y a deux façons d’aborder ce fait de société : le catastrophisme, avec comme arrière-pensée la privatisation, ou le volontarisme, avec comme principe clair la prise en charge solidaire. La droite a choisi : elle multiplie les diagnostics alarmistes... tout en se gardant d’agir... L’utilisation même du terme "dépendance" témoigne de sa vision négative de l’avancée en âge, conçue comme une charge pour la société. Les Français n’ont pas encore vu les travaux du "chantier de la dépendance", sans cesse reporté. En revanche, les familles et les départements en paient d’ores et déjà les surcoûts.
Ainsi, si la création de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) a constitué un réel progrès pour les personnes, elle n’est plus suffisante aujourd’hui pour couvrir l’ensemble de leurs frais, auxquels s’ajoutent les franchises médicales et divers déremboursements. D’après la Cour des comptes, le reste à charge peut aller jusqu’à 2 200 euros pour une personne en établissement ! De plus, l’APA est aujourd’hui financée aux deux tiers par les conseils généraux, que le désengagement de l’Etat asphyxie progressivement. Ainsi, l’inertie de la droite depuis huit ans a conduit à l’étranglement des dispositifs mis en place par le gouvernement Jospin.
Faire des économies : c’est désormais le premier mot d’ordre du gouvernement. Le rapport de Valérie Rosso-Debord s’inscrit lui aussi dans cette seule logique comptable. L’objectif ultime est l’arrivée massive des assurances privées dans le financement de la dépendance. Qui se traduira, faut-il le répéter, par l’explosion des inégalités devant le vieillissement.
En laissant entendre que les personnes sont responsables individuellement de leur dépendance, la droite remet en cause le fondement de la Sécurité sociale selon lequel chacun contribue en fonction de ses moyens et reçoit en fonction de ses besoins. Tout au contraire, les socialistes partent d’un principe simple : la compensation des incapacités quotidiennes doit être reconnue, au même titre que la santé, comme un droit universel. D’où cette conviction forte : la prise en charge de la perte d’autonomie ne doit pas incomber à chaque individu ou à sa famille, c’est à la société de l’assurer de manière solidaire.
Droit universel
Afin d’y parvenir, il faut d’abord relever le double défi de la personnalisation et de la simplification. Personnalisation, d’abord, car les situations de perte d’autonomie génèrent des contraintes multiples. Il s’agit donc de reconnaître les situations et non de faire entrer les personnes dans des catégories prédéfinies et normées. Simplification, à l’évidence, tant l’empilement complexe des multiples systèmes actuels (invalidité, PCH, APA) génère de l’iniquité et de nombreux obstacles en cas de fragilité. Ainsi, il devient urgent de lever la barrière d’âge à 60 ans.
Au-delà, il faut garantir un panier de soins et de services conséquents. Ce nouveau droit universel à la compensation de la perte d’autonomie doit tenir compte des situations, des désirs de chacun et du rôle essentiel des aidants familiaux. La perte d’autonomie est bien un risque social. Au même titre que la maladie, elle crée une incapacité dont l’individu n’est pas responsable et que la société doit prendre en charge. Mutualisation du risque et solidarité, compensation des incapacités tout au long de la vie, liberté de choix, lisibilité du système, financement solidaire et durable fondé sur une affectation du nouvel impôt citoyen et accompagnement des aidants : tels sont les principes qui guident les propositions concrètes que les socialistes rendront publiques début 2011.