PARIS - La campagne publicitaire du groupe nucléaire Areva, un film d'animation qui retrace "l'épopée de l'énergie" de l'Antiquité à nos jours, fait grincer des dents chez les écologistes, au point que certains veulent la faire interdire.
L'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) devait être saisie mardi soir par l'eurodéputée Corinne Lepage et l'avocat en droit de l'environnement Arnaud Gossement, qui travaille avec elle.
Pour M. Gossement, ancien porte-parole de France Nature Environnement (FNE), ce film de 60 secondes, déjà diffusé dans les cinémas, "est un exemple de désinformation".
"Ils mettent sur le même plan, sur le même visuel" des centrales nucléaire, éolienne et solaire, a-t-il expliqué à l'AFP. "C'est une allégation mensongère".
Cela "fait croire, même de manière subliminale, que le nucléaire est une énergie renouvelable, alors qu'on ne peut pas les mettre sur le même plan", ajoute-t-il.
En 2009, les Verts avaient obtenu, après plainte auprès de l'ARPP, la suspension de la précédente signature publicitaire d'Areva: "L'énergie au sens propre".
Le nouveau film, réalisé pour les dix ans d'Areva par l'agence de publicité Euro RSCG avec un budget d'achat d'espace de 15,5 millions d'euros, ressemble à une mini-superproduction.
La caméra fonce à travers les âges et propose, pour chaque période, une illustration de l'énergie utilisée: le vent dans les voiles des bateaux de l'Antiquité, une roue qui tourne au fil de l'eau aux temps des cathédrales, du charbon enfourné dans une locomotive, ou encore l'Amérique avec une station service où sont stationnés des cabriolets rutilants.
Le spot s'achève sur un travelling sur des éoliennes en mer, à quelques encablures d'une centrale nucléaire, elle-même voisine d'une centrale solaire dont les panneaux scintillent au soleil.
La nuit tombe alors sur la terrasse d'un immeuble d'une ville qui pourrait être Rio où des jeunes dansent. "L'énergie est une histoire qui n'a pas fini de s'écrire, continuons de l'écrire avec moins de CO2", dit le slogan.
"Pas un mot sur l'envers du décor de cette superproduction", s'indigne de son côté, l'énergéticien Thierry Salomon sur le blog "Effets de terre", citant la question des déchets ou des risques d'accidents.
Au sein du groupe nucléaire, on se défend d'avoir voulu mettre ces énergies sur le même plan. "Je le conteste", a répondu à l'AFP le directeur de la communication et porte-parole du groupe, Jean-Emmanuel Saulnier.
Le plan sur les trois centrales? "Il se trouve que c'est l'offre d'Areva!", a-t-il expliqué.
"Personne n'a jamais dit que le nucléaire est une énergie renouvelable. Qui pourrait le prétendre?", a-t-il encore insisté. Il "fait partie du mix énergétique, avec ses avantages et ses inconvénients, comme toutes les énergies".
(©AFP / 11 janvier 2011 19h41)