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Le journal d'Edith, de Patricia Highsmith

Par Carolune

  journal d'edith  

   Vous connaissez sans doute le terrifiant et irrésistible Ripley ? J'inaugure ce blog avec un roman glaçant de sa créatrice, Patricia Highsmith, dont j'ai découvert l'oeuvre dérangeante l'année dernière. Si l'immorale et délicieuse trilogie de Ripley, dont je vous reparlerai bientôt, appartient au domaine du roman policier, le roman que j'évoquerai aujourd'hui, Le Journal d'Edith, se situe au croisement du journal intime, de la chronique sociale et du thriller psychologique. Mélange périlleux, dont Patricia Highsmith tire un roman vénéneux, qui entraîne subtilement le lecteur dans le naufrage du personnage...

   L'intrigue de départ est très simple, et même - et c'est fait pour - d'une banalité affligeante : Edith est une de ces femmes au foyer américaines des années 60, à la vie lisse et parfaite : un mari gentil et riche, un  fils, une jolie maison et tout l'équipement électroménager dont elle pourrait rêver. Un jour, son mari décide d'accueillir un vieil oncle, qui ne peut plus vivre seul. C'est évidemment Edith qui s'occupera de lui, avec abnégation et dévouement, comme d'habitude. En parallèle, son fils commencera à poser de sérieux problèmes, et son mari ne sera plus aussi merveilleux qu'avant. Tout cela ne pourrait être qu'une banale descente aux enfers ménagère, mais Edith tient son journal, dans lequel elle s'efforce de maintenir sa vie au niveau de ses rêves de jeunesse... C'est ainsi que les deux vies d'Edith vont petit à petit se séparer, et  que le lecteur va voir le fossé se creuser entre elles, avec un mélange de pitié et d'angoisse, jusqu'à ce que le roman bascule dans l'absurde et la folie, subtilement, sans que ni Edith ni le lecteur ne le perçoivent...

   Ce roman est d'une extrême habileté : le va-et-vient entre la vie réelle d'Edith et la vie qu'elle s'invente dans son journal est toujours très subtil, et, surtout, la chute du personnage est pratiquement imperceptible, si bien que le lecteur peut presque avoir l'impression d'avoir vécu toute la vie d'Edith dans le même état d'aveuglement et de passivité qu'elle : une forme de terreur diffuse nous gagne petit à petit, sans que l'on sache vraiment pourquoi...et culmine avec la chute de l'histoire, dont je ne dirai pas un mot  !

   La critique sociale est subtile et violente, le traitement psychologique du personnage est magistral, et tout cela vous emporte comme le meilleur des polars... bref, le Journal d'Edith est à découvrir de toute urgence !


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