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ROCK N’ROLL Sortons de nos chemins balisés et intéressons-nous pour une fois à un livre. Et quel livre ! Le pavé de Keith Richards, 644 pages retraçant la vie et la carrière d’un des guitaristes les plus célèbre au monde. Keith Richards a traversé et survécu aux époques, aux modes, aux excès en tout genre et il nous livre à l’approche de la septantaine le récit de sa vie : Life…
Pour le petit gars de Dartford qu’était Keith Richards, la musique, l’essence même de la musique se retrouvait dans ces 5 lettres : BLUES. Tout vient de là. Sans le blues, sans cette génération de musiciens américains des années 50 qui inventèrent le rhythm n’blues, les plus belles pages du rock n’roll ne seraient sans doute jamais été ce qu’elles ont été. Et lorsque Keith âgé de 18 ans rencontre un certain Mick Jagger à la gare de Dartford tenant en main des disques de Muddy Waters et Chuck Berry, ça ne pouvait que marcher.
« Est-ce que Mick et moi ça a collé ? Quand on monte en voiture avec un type qui se balade avec ROCKIN’ AT THE HOPS de Chuck Berry et THE BEST OF MUDDY WATERS sous le bras, c’est obligé. C’est comme s’il possédait de l’or en barre. Un putain de magot. »
Keith Richards nous raconte avec précision la création et le succès assez rapide des Rolling Stones. Sans langue de bois à priori, Keith énumère nombre d’anecdotes rocambolesques et sulfureuses qui font découvrir ou replonger le lecteur dans ces folles années. Les premières tournées américaines et européennes, les nombreuses rencontres sur la route, les femmes, la drogue, le succès, la déchéance, la justice, tout y passe. Le style littéraire de Richards est assez cash et direct comme vous pouvez vous en douter, on sent beaucoup d’humour et parfois une certaine dose de fatalisme. « C’est que ça devait arriver ».
La vie de Keith Richards est naturellement faite de nombreuses rencontres. Il prend un malin plaisir à narrer certaines scènes mythiques qui sont vaguement dans le fond embrumé de sa mémoire, lorsque par exemple il passe 2 ou 3 jours avec John Lennon sous acide. Il y a William Burrough qui apparaît plusieurs fois, toujours dans des contextes particuliers liés à la dope. Beaucoup de musiciens et de noms sont cités, parfois on s’y perd un peu, on n’arrive plus vraiment replacé tout le monde. Mais ce n’est pas très important, on suit facilement l’évolution du personnage réel et du groupe. A la fin du livre, on a un peu l’impression d’être le pote de Keith Richards.
Il y a les passages assez terribles, de nombreux décès comme Brian Jones, son fils Tara, ses compagnons de défonce et à la fin ses parents. Les moments où Keith aborde sa dépendance aux drogues dures n’est pas tout rose non plus. Voilà ce qu’il dit de ses périodes de manque :
“Les gens n’ont aucune idée de ce qu’on ressent quand on est en manque. C’est épouvantable, vraiment horrible. Pour donner une idée, c’est un peu mieux que de perdre une jambe dans les tranchées ».
La route, les voyages, les différents domiciles, Keith a beaucoup bourlingué. L’Angleterre, les USA, La Jamaïque, La France (Exile on the Main Street) et la Suisse, tous ces pays où il a vécu, où il a fuit. Et tellement d’aventures avec ou sans son groupe. Il parle naturellement des autres musiciens, on sent un profond respect pour Charlie Watts, une belle complicité avec Ronnie Wood et une relation tellement particulière avec Mick Jagger. C’est indescriptible, il y a des pages et des pages où tous les sentiments se mélangent, évoluent pour arriver au final à une relation qui dure depuis 50 ans et qui lie les Glimmer Twins à tout jamais.
« Mick et moi on n’est peut-être pas des amis – trop de frottement et d’usure pour ça – mais on est proche comme des frères et c’est quelque chose qui ne peut pas être brisé. Comment peut-on décrire une relation qui remonte si loin ? Les meilleurs amis restent des amis. Mais les frères se battent entres eux. Je me suis senti trahi, Mick le sait très bien, même s’il ne mesure pas bien la profondeur de ce sentiment. Mais c’est du passé, tout ça c’est passé il y a très longtemps. Je peux dire cela, parce que ça vient du cœur. En même temps, je ne laisserai jamais personne dire quoi que ce soit contre Mick en ma présence. Je lui trancherais la gorge. »
Le dernier chapitre du livre tire un peu en longueur, il y a beaucoup de détails sur certaines anecdotes qui auraient pu ne pas figurer. Mais Keith est comme ça, entier, intègre, il nous raconte ce qui lui passe par la tête. Vous pourrez ainsi apprendre à cuisiner le repas préféré du musicien grâce aux secrets révélés dans sa recette. On ne sait pas si cette recette saucisse et purée est vraiment bonne, mais ce que l’on sait en revanche c’est que ce livre se dévore. Les heures passées en sa compagnie donnent véritablement envie de se replonger dans la discographie des Stones et permettent de comprendre pourquoi ce personnage est si mythique.