L'écrivain qui m'a le plus fasciné, c'est avant tout Céline. Je suis célinien par l'espèce de verve dont j'ai besoin. Il y a un ambigüité parce que son attitude de collabo l'a mis au ban de la littérature. J'ai des tas d'amis que j'adore, que je révère, des amis israélites qui n'ont jamais voulu lire Céline, je les supplie de le faire. Mort à Crédit, c'est un chef d'oeuvre du XXème siècle. J'ai aussi aimé des romanciers américains comme Steinbeck et Caldwell, parmi les romanciers français, il est évident que Stendhal m'a ébloui. Dostoïevski c'est mieux que Céline encore, c'est époustouflant. Simenon c'est un homme qui m'a impressionné par son savoir faire et sa rapidité.
Je suis un vieux foetus blasé, la vie m'aura servi de leçon, je ne recommencerai jamais plus. Je pense que quand on est mort c'est que l'on a accompli sa trajectoire, ce n'est pas la peine d'avoir envie de la recommencer avant de l'avoir finie. Je crois en Dieu, je n'ai pas d'heure pour prier, mais je parle à Dieu dans les moments difficiles. Ma foi est latente, elle me constitue, elle va elle vient, mais il en reste quelque chose. J'ai été longtemps malheureux parce que je ne savait pas comment m'y prendre pour être heureux, et puis je crois que j'ai fini par trouver le truc. Le truc c'est d'être résigné, accepter la vie, essayer de faire son boulot comme on aime le faire, et puis aimer, aimer le maximum d'êtres.
http://correspondances.saint-chef.dauphine.pagesperso-orange.fr/FREDERIC%20DARD.htm