Au bout du compte toutes les histoires qu’elle raconte ne font qu’un seul et même récit qui débute avec l’arrivée de Christophe Colomb sur les terres du Nouveau Monde pour s’achever sur la situation politique et sociale de la Bolivie.
Le film dans le film, donc. Mais où est le vrai film, où est la fiction, et la réalité ?
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Une équipe débarque dans une région montagneuse de Bolivie pour réaliser un long-métrage sur les premiers pas des conquistadors espagnols. Alors que le tournage débute, la population commence à se rebeller contre ses dirigeants qui souhaitent privatiser l’accès à l’eau courante. L’un des meneurs de la révolte, un figurant très important du film, joue le rôle de l’indien rebelle à l’envahisseur.
Une réalisatrice à qui rien n'échappe,semble-t-il...
A ces situations parallèles, historiques et sociales, que quatre siècles séparent, la superposition des personnages qu’interprète magnifiquement Carlos Aduviri, nous conduit imperceptiblement à nous perdre, en toute connaissance de cause, dans cette aventure. On tourne un film, mais sans caméra, ni perchman, ni clapman.
On ne les voit jamais, ou si peu, que le film dans le film ne fait plus qu’un. Sur plusieurs niveaux narratifs, aussi divers qu’anachroniques, c’est une mise en abyme parfaitement maîtrisée.Il fallait y penser et surtout le réaliser de si belle manière. Quand les conquistadors poursuivent les indiens dans la forêt, ils agissent à la façon des forces de l’ordre qui tout à l’heure réprimeront une manifestation .Et les dialogues du scénario, font écho à ceux de la rue qui se soulève devant l’injustice et la répression.Quand le jeune réalisateur s’adresse aux figurants qui refusent d’assurer une scène qu’ils ne comprennent pas, on croit voir et entendre le maire de la ville traiter avec dédain la foule qui défile sous ses fenêtres.
Ainsi tout s’entrechoque, s’entrelace, au point de déstabiliser le metteur en scène et son producteur, trop content d’employer à petit prix, la main-d’œuvre locale. De l’exploitation des hommes qu’il dénonce, il en adapte, inconsciemment une version contemporaine, qui lui revient au visage tel un boomerang. Dans la Bolivie d’aujourd’hui, où la survie d’un peuple est en jeu, l’artiste doit prendre position au-delà de tout script, scénario et autre fiction historique. Pour mener à bien son film (une entreprise économique à part entière) doit-il alors fermer les yeux ?
La réalisatrice et son scénariste Paul Laverty (qui a du signer une dizaine de films avec Ken Loach) font preuve d’une osmose parfaite dans la conduite de leur récit avec des acteurs très convaincants. Il y a bien sûr les deux rôles principaux tenus par Gaël García Bernal, et Luis Tosar, mais les comédiens et figurants locaux ne manquent pas de panache ; ils sont complètement intégrés au film. Ces hommes et ces femmes ne sont plus des personnages de papier. Ce sont les habitants de Cochabamba.
Mais aussi
En 1999 à Cochabamba, dans l’Altiplano bolivien, la population s’oppose au candidat Aguas de Turani à qui fut concédée l’eau de la ville. L’année suivante des barricades sont érigées dans la ville, le président bolivien déclare l’état d’urgence, mais c’est la rue qui l’emporte. Le service d’eau repasse dans le domaine public
De la prise de conscience au cas de conscience, le fossé se rétrécit.