Enzo Barboni
E poi lo chiamarono il magnifico
Avec: Terence Hill, Gregory Walcott, Harry Carey Jr.
A tout bien réfléchir, ce cinéma là, méprisé et vilipendé par la critique bien-pensante de toutes les époques, a au moins le mérite, comparé aux Dalton ci-dessous, de la gentillesse, de l’humanité et de la bonne humeur qui ont totalement disparu de nos écrans aujourd’hui, remplacés par le cynisme, l’ironie méchante et le fameux esprit Canal qui s’est transformé avec les années en humour nouveau-beauf. Partageant des similitudes très souvent remarquées avec Le Pied Tendre de Morris, on pourrait presque dire que El Magnifico est finalement la meilleure adaptation de Lucky Luke jamais réalisée, bien que je m’avance légèrement avec cette affirmation, n’ayant pas encore vu la version de James Huth (à part les centaines de B.A et teasers disponibles sur le net avant sa sortie), ni celle de Terence Hill (mais dont on ne dit pas que du bien).
Pour El Magnifico, Terence Hill, trois ans après On l'appelle Trinita et un an avant Mon nom est Personne est au zénith de sa carrière – et peut-être le seul acteur au monde ayant réussi en terme d’aura internationale à côtoyer l’ahurissant succès mondial de Chaplin – place toujours ses sourires angéliques, sa feinte naïveté et ses yeux grands ouverts au service du bien, de la veuve et de l’orphelin. El Magnifico fonctionne sur le thème du citadin en déphasage avec l’Ouest dur et austère. Sur ce thème pourtant usé jusqu’à la corde déjà au temps du muet (voir Go West du maître Keaton, ainsi que Malec chez les indiens, où l’on retrouve le filet à papillons), Enzo Barboni parvient à dépasser la lourdeur parodique de ses Trinita pour réaliser un agréable film, tout public et à la bonne humeur communicative. Certes, il y a les inépuisables fayots, certes il y a les ridicules chasseurs de primes des Trinita, certes il y a les interminables bastons, mais le scénario est plus fin, plus comestible, plus familial. On apprécie toujours autant cet inépuisable attrait des héros de westerns italiens envers les faibles et les marginaux (les trois bandits socialement inadaptés, le charpentier irlandais et sa ribambelle de gamins) et on remarque un brin gêné ce pur héros aux yeux bleus qui avoue sa peur avant sa transformation en dur à cuire. On apprécie également, n'en déplaise aux puristes, de retrouver Harry Carey Jr. dans ce western. Dans ma mémoire, le scénario était plus du type de ceux des westerns samouraï, c’est à dire qu’on découvrait que l’Anglais, malgré son déphasage avec la société de l’Ouest, parvenait à se sortir du pétrin paradoxalement grâce à ses bonnes manières et à sa candeur. Il n’en n’est rien. Il faudra que le héros se fasse littéralement violer (comme le précise Jean-François Giré en introduction du DVD Sidonis) pour que la métamorphose opère et qu’il se fonde enfin dans son environnement. Si vous ne goûtez guère à Terence Hill mais que vous avez apprécié Mon nom est Personne, essayez donc celui-là!