Je ne vous l’apprendrai pas : nous vivons dans une époque peuplée d’énormes contradictions. Je ne vous ferai pas non plus une liste, nous en avons toute une personnalisée. L'adage veut que dans l’amour vrai, il ne doit pas y avoir de peur (question d'épanouissement, de confiance, d'intimité et de dévoilement) et que dans la peur il n’y a pas de vrai amour possible, alors que de nos jours à la base de toute relation existent des peurs diverses. Une d'entre elles, notamment, cohabite maintenant avec l’amour. Contracter une infection ou la donner. La peur de recevoir en même temps que de l’amour, la mort. Ou bien la donner. Sans le savoir, bien souvent. Et nous avons appris à gérer cette menace qui nous pend au bout du nez, si l’on s’aventure à prendre le moindre petit risque… Nous vivons tous dans cette même réalité où infections et Sida peuvent rimer avec amour. On ne baise pas aussi librement qu’on aimerait le sous-entendre.
Et parallèlement, nous vivons une époque où il ne fait pas bon être malade, marginal, différent. Un temps où, si jamais le malheur nous frappe le jugement des autres est encore bien pire à subir. Je tends à penser que le VIH/Sida est dans le tiers monde une question de ressources et en Amérique du Nord le résultat d’un malaise. Malaise face à ce que nous ne disons pas, face à ce que nous ne voulons pas voir, face aux différences qui nous séparent– autrement dit, au refus d’admettre et d’affronter le problème. L’ignorance et la peur s’en trouvent renforcées, favorisant d’autant les préjugés, l’insouciance et les comportements à risques. La honte a également pour effet de marginaliser les personnes vivant avec le VIH/Sida et leurs proches. Il est difficile d'avoir de l'indulgence et de la tolérance pour des personnes, pour des gestes, pour des vies que l’on ne comprend pas.
La difficulté avec la tolérance dans cette situation, vient de ce qu'elle apparaît nécessaire et impossible à la fois, parce qu’une grande méconnaissance de cette réalité dresse un obstacle entre les personnes atteintes du VIH et le reste de la société. Et rares sont ceux qui osent le pas. Le premier décembre est la journée mondiale du VIH/Sida, ça serait bien d’y penser.
Parce que dans le meilleur des mondes la tolérance ne devrait être qu'un état transitoire, avant de mener à quelque chose de plus grand et moins stigmatisant : le respect. Parce qu’il est essentiel de briser le mur du silence, de mettre en lumière des réalités qui sont quotidiennes pour beaucoup de personnes qu’on a, comme société, tendance à oublier. Parce qu’à quelque part, chacun d’entre nous contribuera soit à arrêter la propagation du VIH/sida soit à la faire avancer.