Dans le canton de Genève (mais aussi Zurich et d'Argovie), les travailleurs frontaliers payent leurs impôts en Suisse, et sont donc prélevés à la source (pour ceux qui ne connaissent pas, le prélèvement à la source est effectué par l'entreprise tous les mois sur le salaire de l'employé frontalier, et reversé au service cantonal des impôts. A ne pas confondre avec le barème d'impôt à la source, qui concerne les frontaliers mais également tous les travailleurs étrangers qui résident en Suisse et qui touchent en-dessous d'un certain niveau de salaire annuel, et dont vous pourrez avoir des informations complémentaires sur la page impôts en Suisse sur le site Travailler-en-Suisse.ch).
En 2010, les impôts prélevés à la source auprès des frontaliers se sont élevés à 810 millions de francs suisses, dont près de 220 millions ont été reversés à la France (aux départements et communes concernées). Au total, cette somme représente 3,5% de la masse salariale des frontaliers (exprimée en brut). C'est ce qui ressort d'un excellent article de la Tribune de Genève.
Les communes et départements français ont bénéficié de l'effet taux de change
Les travailleurs frontaliers ne sont pas les seuls à avoir bénéficié du franc suisse fort et de l'effet taux de change, puisque l'augmentation totale de la manne financière due à l'effet taux de change est d'un peu moins de 18% (l'an passé, 1 euro représentait environ 1,5 francs suisses, contre 1,30 fin 2010).
Plus de frontaliers = plus d'impôts
L'augmentation du nombre de travailleurs frontaliers entre 2009 et 2010 a permis au fisc genevois de percevoir 12,5% d'impôts en plus (et aux communes et départements français par effet ricochet). Le département de la Haute-Savoie bénéficie de la plus grosse masse d'argent et touche un peu plus de 76% de la somme, contre 24% pour l'Ain.
L'attribution de la somme se fait en fonction de nombre de travailleurs frontaliers habitant dans la commune (d'où l'intérêt pour les travailleurs frontaliers d'annoncer leur statut).
Dans le département de l'Ain, on comptait en 2010 un peu plus de 13 000 travailleurs frontaliers, et un peu plus de 74 000 en Haute-Savoie. Au final, un travailleur frontalier dans l'Ain "rapporte" à la France 1 800 euros, et un travailleur en Haute-Savoie un peu plus de 1 000 euros.
Sur le plan local, il faut bien comprendre l'enjeu que représente ces fonds, puisque les travailleurs frontaliers payent leurs impôts en Suisse mais habitent en France et bénéficient des infrastructures communales et départementales comme les routes, mais aussi les crèches et les écoles, et dont il faut financer l'entretien et/ou la construction.
Un échange financier qui traduit bien l'état d'esprit dans lequel se trouvent la France et la Suisse
Cet échange me paraît caractéristique de ce qui se passe au niveau des zones frontalières : tout le monde a intérêt à ce que cela se passe bien, et que les échanges, qu'ils soient financiers ou d'une autre nature, se passent dans l'intérêt de tous. Car finalement, bien malin qui peut dire qui est Suisse et qui est Français en zone frontalière française, et qui bénéficie ou pas des infrastructures. Au moins, ce calcul met tout le monde d'accord.
Un "reversement" critiqué
Les personnes qui sont les plus ouvertement anti-frontaliers, principalement à Genève, critiquent bien sûr ce reversement, et on trouve régulièrement dans la presse des commentaires ou des articles qui tiennent plus du fantasme qu'autre chose. C'est par exemple le cas sur Mediapart, avec ces quelques lignes qui résument de manière assez malveillante l'article de la Tribune de Genève.
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