Extrait de l'article intitulé “L'idéologie, cancer de la conscience” (1969) de Jean Devignaud (par ailleurs, sans grand intérêt) :
“Marx s'est posé cette question durant sa jeunesse (mais si Marx ne s'était pas posé alors ces problèmes, il aurait été incapable précisément d'en venir à la connaissance des structures économiques, il n'aurait pas été Marx mais quelque professeur perdu dans l'intelligentsia). Du moins, la formule-t-il ainsi : moi qui suis inséré dans la structure de la classe privilégiée, où je suis né et où j'ai été éduqué, comment puis-je échapper à cette classe, donc à ses idéologies, pour atteindre à une connaissance complète du réel ? Suis-je encore idéologue et fils de bourgeois lorsque je m'occupe des vols de bois ? Idéologue de quoi ? La réponse n'est simple qu'en apparence, la voilà : dans la mesure où le contenu de ma pensée (nous dirions en terme phénoménologique : sa visée) est précisément le fonctionnement interne de la société en acte, dans la mesure où je rétablis le circuit coupé par la division du travail social entre le dynamisme créateur de la société globale et ma conscience, j'échappe précisément à ce que cette conscience a de limité. Je ne suis plus ce que j'ai été en tant que fils de bourgeois (ce déterminisme biologique est idéologique), je suis ce que je constitue dans ce rapprochement de ma pensée et de la réalité productrice de la société. Le contenu révolutionnaire de ma pensée m'arrache à ma classe…“