Lettre de Luc Chatel à François Noncle
Vous attirez mon attention sur le niveau de français pratiqué par le Président de la République, niveau que vous jugez insuffisant voire indigne au regard de ses fonctions de représentation et auquel vous me demandez de remédier. S'il est évidemment des questions plus importantes, je tiens néanmoins à vous apporter une réponse complète sur ce sujet.
D'autres responsables politiques, de tous bords, ont été avant le Président de la République critiqués pour de prétendues entorses à l'égard de l'orthodoxie de notre grammaire
Vous conviendrez avec moi que l'expression orale prête le flanc à des critiques faciles, tant elle est soumise à de multiples contraintes dont nous avons tous deux fait l'expérience en tant qu'élus : adaptation à l'interlocuteur et à un contexte souvent tendu, évolution fréquente et inattendue de la conversation, ... Vous reconnaîtrez d'ailleurs qu'en ces nombreuses circonstances, le Président de la République montre de grandes qualités rhétoriques, telles que la force expressive, la conviction, l'à-propos, la repartie ou la puissance d'évocation.
Un point ne souffre pas, je pense, la contestation : en ces temps de complexité et de difficulté, le Président de la République parle clair et vrai, refusant un style amphigourique et les circonvolutions syntaxiques qui perdent l'auditeur et le citoyen. Juger de son expression en puriste, c'est donc non seulement lui intenter un injuste procès, mais aussi ignorer son sens de la proximité. Ses paroles relèvent de la spontanéité et, au contraire d'un calcul, sont le signe d'une grande sincérité. Lui qui incarne la parole de la Nation et l'a fait, en de nombreuses circonstances, de la manière la plus digne qui soit — ainsi tout récemment à Colombey-les-Deux-Églisês, pour commémorer le quarantième anniversaire de la mort du Général de GAULLE —, se fait comprendre de tous les Français : sur ce sujet et dans une démocratie, c'est, me semble-t-il, l'essentiel.
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l'expression de ma considération distinguée.
Petit complément à l'attention de l'auteur de cette lettre: à Colombey, on a célébré le 40° anniversaire de la mort du Général ou commémoré sa mort mais certainement pas commémoré l'anniversaire de sa mort.