Pourquoi les bonnes résolutions sont vouées à l’échec, et LA résolution à prendre en 2011

Par Evainlondon

En ce début d’année, comment déroger à la tradition bloguesque ? Voici venue l’heure des vœux virtuels ! Je vous présente donc tous mes vœux de plein de bonheur non-virtuel :  de la joie, des éclats de rire, des voyages, des grasses matinées voire des dimanches entiers à paresser au lit, de belles découvertes, de chaleureux moments en famille et entre amis, des promotions, d’augmentations, plein de sousous, bref, je m’égare ; tenons-nous en là. Après tout, aucun billet de voeux bloguesques ne saurait être aussi réussi que celui de Lili Bé !

Maintenant que j’ai sacrifié à la tradition, j’aimerais évoquer un autre incontournable corollaire du mois de janvier (à part la pluie, les « épisodes neigeux » chers à Météo France et un insondable désespoir devant les trois kilos de foie gras, saumon fumé et bûche de Noël qui semblent avoir lu domicile sur vos hanches / ventre / cuisses… mais je m’égare à nouveau) : les bonnes résolutions. En obsessionnelle que je suis, j’aime dresser une longue et terrifiante liste de résolutions en début d’année ; et, pour faire bonne mesure, cette tâche succède généralement au bilan tout aussi effrayant de l’année précédente. Morceaux choisis pour l’année 2010 :

  1. non, je n’ai pas perdu cinq kilos (les trois des fêtes 2009 + deux autres pour leur tenir compagnie) ;
  2. non, je n’ai pas appelé ma grand-mère une fois par semaine pour prendre des nouvelles de son chat, son lumbago et les dernières (més)aventures amoureuses de la petite-fille de sa voisine du premier étage, « tu sais, celle qui s’est teinte en rousse l’été dernier, alors que je lui avais bien dit que ça ne lui irait pas du tout » ;
  3. non, je n’ai pas réussi à convaincre SuperConseil que j’étais la meilleure chose qui leur soit arrivée depuis le fil à couper le beurre (« Si, si, les clients s’arrachent mes services ! Ca ne se voit pas dans mes chiffres ? Euh… mais la satisfaction client, ça n’a pas de prix ! »), et que cela méritait bien une exception au gel des salaires mondialement imposé par le siège américain
  4. non, je n’ai pas remis les pieds à la salle de sport (cf. point n°1). J’étais trop occupée à me faire des petits plats minceur (euh, non), appeler ma grand-mère (non plus) et à travailler (encore moins).

Après des années d’auto-flagellation, c’est décidé : fini, le bilan des échecs de l’année. A la trappe des fausses bonnes idées. Plutôt que de commencer 2011 comme j’ai fini 2010, à savoir vautrée dans la culpabilité, je vais honorer ma première grande résolution : NE PAS CULPABILISER. Ainsi, plutôt que de compter le nombre de jours écoulés depuis le dernier billet (un décompte sans cesse actualisé dans ma petite tête d’Eva in London), je vais tenter d’analyser le pourquoi du comment de l’échec de mes résolutions 2010. J’ai bien réfléchi à la question en faisant mon brouillon de bilan (que je n’ai pas mis au propre, hein, on a dit qu’on arrêtait de se faire du mal) ; si les bonnes résolutions sont vouées à l’échec, ce n’est pas une question de volonté : c’est une question de temps.
La preuve par A + B :

1. Perdre cinq kilos en mangeant sainement : chercher des recettes appétissantes mais peu caloriques + aller chercher l’agar-agar (selon Cléa, « le secret minceur des Japonaises »), les galettes spécial régime Dukan et une tablette d’excellent chocolat noir à 70% (mon régime à moi prend ce qu’il y a de meilleur chez chacun) + cuisiner les dits ingrédients = 1h30 par jour


(avec cette estimation, je prends le risque de faire hurler tous les cuisiniers parmi vous ; rappelez-vous simplement que la mauvaise foi règne en maître sur ce blog, et suivez-moi sans trop rechigner pour la suite de la démonstration)

2. Appeler ma grand-mère une fois par semaine
: 30 mn par coup de fil, ça fait moins de 5 mn par jour. Ca ne prend pas tant de temps que ça, après tout, de faire le bonheur de quelqu’un. Et si j’arrive à nettoyer la salle de bains en même temps sans qu’elle ne s’en rende compte (« Et là, on voit ses racines blondes, mon coiffeur me l’avait bien dit, ça ne vaut rien de bon, ces teintures industrielles… »), on pourrait presque considérer ça comme un gain de temps.

3. Convaincre SuperConseil de mon exceptionnel talent de consultante : là aussi, c’est le temps qui a péché. Même si l’Angleterre fait preuve d’une maturité sur les horaires qui paraîtrait saugrenue en France (en Angleterre, si vous restez tard plusieurs jours d’affilée, votre chef ne manquera pas de vous convoquer, l’air inquiet : « Ca va, Eva in London ? Tu n’as pas l’air de gérer ta masse de travail, en ce moment. Tu veux qu’on discute d’une meilleure manière de t’organiser ? » ; en France, dans certains lieux tout du moins, vous n’échapperez pas aux haussements de sourcils narquois si vous vous permettez une échappée à 19h30 au lieu de 21h), donc, même si l’Anglais fait confiance à son employé, mon 9h01 – 17h02 n’a pas dû être interprété comme la marque d’une motivation à toute épreuve. Surtout avec 1h30 de pause déjeuner (ben quoi, Oxford Street, c’est loin, et j’avais des cadeaux de Noël à faire, moi). Bref, il m’a sûrement manqué 1h30 de travail supplémentaire par jour, ce qui porterait ma journée de travail de 9h01 (faut pas exagérer, non plus, les benchmarks de salaire peuvent attendre une heure décente) à 18h (avec 1h de pause déjeuner, il y a des choses qui sont non négociables). Soit 9 heures passées dans les rutilants locaux de SuperConseil – mettons 10 heures par jour, transports inclus.

4. Aller à la salle de sport – et y faire du sport – trois fois par semaine : à raison d’une heure à chaque fois – puisqu’apparemment la graisse ne disparaît qu’à partir de 45 mn, hélas ! – cela fait donc 30 m par jour en moyenne. Ajoutons à cela 15 mn d’auto-motivation pour lever les fesses du canapé, 10 mn pour faire mon sac (« Ah, dommage, plus de T-shirt propre, je ne peux pas y aller… ah, si, il en reste un, là, l’orange fluo marqué « I love London », la classe) et 15 mn de douche, si je ne me trompe, on doit être à 20 mn par jour. Ne chipotons pas, ajouté au sport lui-même, on doit bien être à 1 heure par jour.

5. Cultiver ma relation de couple, c’est-à-dire adresser la parole à Prince au moins une fois par jour, et au mieux faire des points réguliers sur notre relation (ah zut, on avait dit plus de bilan) et passer du quality time ensemble = 5 épisodes d’affilée de How I met your mother (y compris pendant le dîner, on ne va pas non plus parler philosophie après une aussi longue journée de travail) = 2 heures par jour.

6. Dormir le temps qu’il faut pour ne pas être accueillie par des « You look tired » en arrivant au bureau : 9 heures par jour. Oui, 9 heures. A 8 heures, je suis fatiguée, et à 7, c’est une journée de travail perdue pour mon employeur.

7. Publier très régulièrement, enfin régulièrement, d’impertinentes et spirituelles chroniques d’une Française à Londres : à raison d’un billet par semaine (pas de ricanement, s’il vous plaît), et de 2 heures par billet + 1 heure pour la mise en ligne (« Mais, pourquoi ça bugue encore ? ») + 20 mn de culpabilisation par jour (« 5 jours que je n’ai pas publié, 6 jours que je n’ai pas publié, 7 jours… ») : en arrondissant, 1 heure par jour.

8. Ne pas perdre contact avec ma famille et mes amis à Paris / Barcelone / Varsovie / Budapest / New York : entre les mails, les coups de fil et les réservations de billets de train, d’avion et que sais-je encore, 1 heure par jour en moyenne – et interdit de faire le ménage en même temps.

9. Ne plus jamais me faire appeler Jackson Five, ou les inéluctables de la journée : se laver les dents, se coiffer, se maquiller, se coiffer à nouveau parce que la première fois n’a fait aucune différence, choisir une tenue de vraie consultante (comprendre : « Une chemise repassée, ça ne doit pas être si dur à trouver ! Si seulement je savais où était ce xxx de fer à repasser, et si je savais repasser, ou si Prince me l’avait repassée cette chemise… déjà 8h40, je vais encore être en retard, et il faut que je parte tôt ce soir pour ne pas rater le cours de kickboxing ! ») : 1 heure par jour. Au bas mot.

10. Ne pas paniquer devant ma to-do list : zéro minute, mais un échec retentissant.

Faisons les comptes : même sans compter le temps de traîner sur Facebook, de parcourir les titres du Figaro.fr sans lire aucun article, de rêvasser, de se balader, bref, de vivre, il me manque déjà deux heures et demie par jour pour tout faire. Et ça n’inclut que vingt minutes de culpabilisation. CQFD.

Alors, en 2011, c’est décidé : j’arrête de culpabiliser. Ou alors je passerai l’aspirateur en même temps.

Et vous, avez-vous pris des résolutions cette année ? Lesquelles ?