Religion et intolérance !

Publié le 05 janvier 2011 par Raoul Sabas

Avant-Propos

Il n'est pas dans mes habitudes de publier in-extenso le texte d'un autre intervenant, mais des circonstances personnelles exceptionnelles, dont l'actualité rendra peut-être compte un jour ou l'autre, m'autorisent d'autant plus à le faire que je crois avoir été un ardent défenseur de la "vraie" philosophie, selon l'expression même de Spinoza.

C'est pourquoi je publie ce texte trouvé incidemment sur Internet et publié par "Les Solidaires" pour établir l'esprit de tolérance de ce "vrai" philosophe pour qui il semblait tout à fait naturel de penser et de faire connaître sans réserve ses idées, quelles qu'elles soient, quitte à heurter des opinions contraires, en matière de superstition religieuse en général, et de superstition musulmane en particulier.  

Je livre donc le texte ci-après à  la réflexion de chacun :

28.04.2009

La religion : une source d'intolérance selon Spinoza

La tolérance religieuse est-elle la solution pour mieux vivre ensemble au sein de la société ? Les avis diffèrent selon les époques et les philosophes. En effet, si pour certains la tolérance religieuse apparaît être le ciment idéal à chaque société, pour d'autres, prétendre son existence même est nuisible à la cohésion interne d'une société, et donc à la bonne marche d'une cité. C'est pour cette idée que Spinoza, entre autre, prend position.

Spinoza (1632-1677), écrit un plaidoyer pour la tolérance dans le chapitre 20 du Traité théologique-politique. En effet, selon le philosophe, « dans une libre république, chacun est autorisé à penser ce qu'il veut et à dire ce qu'il pense ». Ainsi, Spinozapose les bases de sa pensée : la tolérance est indispensable dans une société de liberté. Pour ce dernier, celle-ci est une attitude active de défense de chaque idée, même si elle n'est pas partagée, en vertu du « droit institutionnel absolu de penser », le fondement de toute république. Que dire, d'après Spinoza et son contexte, de la tolérance religieuse ? Est-celle une utopie ou bien une réalité en puissance ?

La tolérance religieuse est inexistante, tel est le parti pris par Spinoza. En effet, la religion et l'interprétation actuelle, dogmatique des Ecritures sont une source d'intolérance. C'est pourquoi, dans ses écrits et ses pensées, Spinoza développe le projet d'une religion moins omnipotente dans les institutions. Pour lui, la tolérance religieuse est impossible avec l'interprétation actuelle des Ecritures, renvoyant par la même la notion à celle de simple idée de raison. De ce fait, il convient de se demander pourquoi l'interprétation des Ecritures, présente dans chaque société sous des formes le plus souvent belliqueuses, est source d'intolérance. Selon Spinoza, ces dernières s'appuient sur les superstitions et les craintes, évidemment source, d'intolérance puisque s'appuyant sur la Passion et non pas la Raison. Donc, selon Spinoza, pour mieux vivre ensemble dans la Cité, il est nécessaire de s'affranchir de la religion pour plus de tolérance. Ainsi, pour ce dernier, la question de la tolérance religieuse comme la solution pour mieux vivre ensemble ne se pose pas : la religion, dans ses fondements dogmatiques, est inconciliable avec la tolérance. Toute tolérance religieuse prétendue n'est qu'une façade, une tromperie. L'utilisation des Ecritures pour ériger un bouc émissaire est une source d'intolérance qui vient desservir le pouvoir inaliénable de penser librement.

Selon Spinoza toujours, les théologiens calvinistes (doctrine théologique chrétienne, protestante, développée par Jean Calvin (1509-1564), un des principaux théologiens du protestantisme) nuisent à la religion, faite selon lui de tolérance et de paix. En effet, ces derniers interprètent les textes sacrés en leur prêtant des significations non originelles. Ainsi, des boucs émissaires, des responsables sont montrés du doigt par le biais « d'inventions » et de « jugements arbitraires ». Pour le philosophe, cette interprétation déviante de la part des théologiens vient du fait qu'il existe dans la Bible certains passages obscurs dont la définition semble insaisissable.

Ainsi, les théologiens profitent de ces passages mystérieux pour les adapter aux préjugés qu'ils désirent communiquer au sein de la population en y introduisant de nouveaux dogmes. D'où le propos de Spinoza dans son Traité théologique-politique : « le temple même a dégénéré en un théâtre où l'en entendit non des Docteurs mais des Orateurs d'Eglise dont aucun n'avait le désir d'instruire le peuple, mais celui de le ravir d'admiration, de reprendre publiquement les dissidents, de n'enseigner que des choses nouvelles, inaccoutumées, propres à frapper le vulgaire d'étonnement. ». Ainsi, selon Spinoza, l'action de certains théologiens, prédicateurs, conduit à une intolérance forte auprès de la population.

Cette critique du pouvoir de la religion comme source d'intolérance et d'absence de république, de démocratie, est lourde de conséquence dans la société dans laquelle vit Spinoza. En effet, la critique du pouvoir religieux revient à contester le fondement de la politique en vigueur: la monarchie absolue de droit divin. Spinoza apparaît ici comme un précurseur des Lumières, mouvement philosophique du XVlllème siècle prônant la liberté d'expression, la tolérance et la raison pour lutter contre le despotisme, l'obscurantisme et le dogmatisme. Pour mieux vivre ensemble dans la cité, il faut s'affranchir de la religion et de la prétendue tolérance religieuse. Comment expliquer la position anti-religieuse de Spinoza ? Le philosophe prône la Raison. Or, la religion, à son approche, fait appel à la Passion, par l'emportement dû aux préjugés, à l'obscurantisme, la crainte, la superstition, la volonté de Dieu, ce « refuge de l'ignorance »....

La raison est le fondement du pacte rationnel de Spinoza, sensé garantir la république et une cohésion au sein de la société, en tant que possibilité de vivre ensemble, grâce aux droits de la nature et aux droits civils. Ainsi, la religion est néfaste à la religion puisqu'elle est source d'intolérance et nuisible à la raison par sa tendance à constamment juger de ce qui est tolérable ou pas arbitrairement. La religion, selon Spinoza, loin d'apporter une solution à la problématique, doit être rendue moins importante au sein de la société. On retrouve encore ici une idée des Lumières, c'est-à-dire la Raison, l’esprit critique et la démarche scientifique pour accéder au bonheur.

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Spinoza combat en faveur de cette tolérance religieuse qui lui semble impossible, laquelle sera atteinte par l'affaiblissement de la religion. Pour lui, une société sans religion omniprésente, fondée sur un pacte social, et donc là`tolérance, garantie de la « vraie vie de l'esprit », c'est-à-dire la pensée. Néanmoins, Spinoza tolère les croyances religieuses, inoffensives, voire profitables à la société si elle ne prennent pas une place trop importante dans la société Lucrèce, déjà en son temps, s’était avancé dans la critique de la religion, source d’intolérance, destructrice de la cohésion sociale et du bien être de la population. Il critiquait déjà à son époque cette « malédiction pour la société ». Mais, par ce raisonnement, Lucrèce n'était-il pas lui-même intolérant ? Et c'est là que réside la difficulté à répondre à la problématique posée : toute prise de parti pourrait être perçue comme une intolérance vis-à-vis des autres opinions. Ainsi, Spinoza apparaît comme un exemple de tolérance et d'acceptation de l'autre.

Les faits donnent d’ailleurs raison à ces philosophes. En effet, les exemples d'intolérance religieuse sont multiples. Le massacre de la Saint Barthélémy, est un des faits marquant des guerres de religion qui sévirent au XVIème siècle en France, en opposant Catholiques et Protestants.

Là encore, la tolérance apparaît comme une réalité paradoxale. En effet, tolérer le protestantisme revient, de la part des catholiques, à affirmer leur propre souveraineté, ce qui va à l'encontre du principe égalitaire de la tolérance.

Néanmoins, la religion, dans chaque société, est la solution idéale pour répondre aux questions irrationnelles de l'Homme. En effet, cette dernière, par les tabous et les interdits, les dogmes aussi, apporte des réponses à la population, garantissant ainsi la cohésion sociale : la population, par anthropomorphisme, prête à Dieu des intentions et une psychologie humaine expliquant les catastrophes naturelles ou encore la mort. D'où la remarque de Spinoza sur les Hommes qui « naissent ignorants des causes et des choses, et ont tous l'appétit de rechercher ce qui leur est utile, de quoi ils ont conscience » (Ethique, I, appendices). Cette ignorance a pour conséquence de remplacer la recherche de la signification d'un évènement, d'une réalité, par la connaissance d'une cause, fondée sur les préjugés, et de ce fait irrationnelle. Par crainte, les Hommes s'en remettent à une autorité qui leur apparaît plus puissante : l'autorité divine transmise par les théologiens.

On aboutit de ce fait à un raisonnement contradictoire, d'un côté, la religion ; selon Spinoza, apparaît comme une source d'intolérance, un mal à éviter pour le bien être ou le mieux être de la société, d'un autre côté, une société sans religion est une société sans cohérence, sans union et donc intolérante. Toutefois, ce raisonnement est désormais à nuancer. En effet, les sciences apparaissent comme une solution tout aussi satisfaisante, voire meilleure car plus rationnelle, pour répondre aux interrogations existentielles, aux craintes de l'individu, à la possibilité de mieux vivre ensemble aussi. Ainsi, une religion trop présente, source de conflits, étant à éviter dans une société, la question de la tolérance religieuse pour mieux vivre ensemble dans la cité ne se pose pas, selon Spinoza. Cette idée est reprise par le philosophe Alexis de Tocqueville en 1840 dans De la démocratie en Amérique, où une religion trop présente dans les institutions est incompatible avec la démocratie.