Jeanne Deplus , une lycéenne en première économique et sociale (ES) à Paul-Valéry (Paris) écrit pour Rue89 des sujets sur les jeunes de son âge. Par exemple, ce que recouvre le mot « populaire » que les ados refusent d' expliquer vraiment à leurs parents. C'est un peu long, mais je crois que intéréssant pour parents et pour profs... Merci, Jeanne ! Voilà son article:
Mais qu'est-ce qu'un ado entend lui aujourd'hui par « être populaire » ? Quels sont les critères de cette popularité qu'un jeune acquiert… ou
pas ? J'en ai compté sept.
Le nombre de connaissances et de bises le matin
La popularité se mesure d'abord au nombre de connaissances et à la nature de celles-ci. Camille, Parisienne de 16 ans :
« Les bises effectuées à l'arrivée en cours montrent une plus ou moins grande popularité. Même si on ne leur parle pas de la journée, on les salue, on montre qu'on les connaît.
Au Royal, le grand café de Saint-Mandé [Val-de-Marne], on peut observer un tas de personnes populaires de mon lycée. Ils se retrouvent là pour discuter, mais savent qu'ils vont être vus. »
Maelys, 15 ans, qui habite en Touraine, explique comment « la popularité peut amener à connaître beaucoup de gens » :
« Il faut avoir confiance en soi et être plutôt sociable, ce qui n'est pas forcément le cas de tout le monde. »
C'est parce qu'on a confiance en soi qu'on est sociable, et donc populaire. Dans la vraie vie, précise bien Violette, 17 ans, lycéenne à Stalingrad à Paris :
« Avoir de très nombreux soi-disant “amis” sur Facebook ne reflète pas le niveau de popularité de la personne. Cela peut être indicatif, comme pas du tout. »
La beauté… « qui rend si à l'aise »
Lina, 17 ans, qui vit à Cahors (Lot), et Violette sont d'accord :
« Les gens populaires sont souvent des gens beaux. »
Manu, 18 ans, d'Ouzouer-sur-Trézée, un petit village de 1 500 habitants du Loiret, explique :
« La beauté est utile dans le sens où ça sert d'atout pour aller vers les autres. Les “populaires” sont souvent décomplexés, c'est ce qui les rend si à l'aise. »
Pierre, 19 ans, de Belgique, confirme :
« Une bonne image donne envie de s'intéresser à la personne. Plus la première impression est bonne, plus la personne va attirer les foules. »
Le look, Coco
Comme le souligne Tisun, Parisien de 16 ans, ces personnes dites populaires sont souvent assez superficielles :
« Les marques de vêtements, par exemple, ont une grande importance. Perso, on me regarde depuis que j'ai ma Canada Goose [doudoune à environ 600 euros, ndlr]. C'est un milieu très matérialiste. »
Violette dit d'une fille qu'elle est « stylée » -adjectif souvent équivalent à « populaire » dans le sens où les « populaires » sont… stylés- :
« Dans la mesure où un tas de mecs ont besoin de cette fille, pour la suivre et pouvoir se construire par rapport à elle, que ce soit sa façon de s'habiller, ses centres d'intérêt. »
Pour Charles, 18 ans, la plupart des gens de son âge sont un peu comme des « éponges », c'est-à-dire qu'ils ne s'identifient plus par rapport à leurs goûts personnels mais par rapport aux goûts de la masse, à ce qui est à la mode.
Et les gens populaires incarnent ce « phénomène de mode ».
Eva, 17 ans, nous apprend ainsi qu'« un jeune porte un genre de vêtements pour être reconnaissable » :
« Les gens qui se fréquentent sont souvent habillés pareil. »
On reconnaît donc un « populaire » au fait qu'il est habillé comme les autres « populaires » de son établissement.
L'argent pour le smartphone et les soirées à Paris
Lina :
« Quand t'es riche, t'es bien habillé et t'as toutes les dernières technologies. Donc, on t'admire. En plus, tu peux aller à plein de soirées cool et tout. »
Louise, 18 ans, de Caen, explique :
« Le phénomène des smartphones chez les jeunes montre l'importance de l'argent, du statut social de la personne. As-tu les moyens de te payer un BlackBerry ou un iPhone et le forfait qui va avec ? La popularité se base un peu la-dessus aussi. »
BBM, adaptation BlackBerry de la messagerie instantanée MSN, le prouve en créant un réseau de « BlackBerry teenagers » -excluant les jeunes qui ne possèdent pas ledit portable.
Tisun dit aussi que les personnes populaires « sont de toutes les soirées hype » :
« Et dans Paris, sortir le soir coûte un bon petit budget à un adolescent. »
L'entre-soi
Violette trouve triste que les personnes populaires prennent souvent la grosse tête, imposent leur vision des choses, se renferment généralement entre eux, formant des groupes entre « stylés » peu ouverts aux autres.
Camille raconte son expérience personnelle :
« Dans mon bahut, un groupe de personnes restent entre elles, partagent une manière de penser, une religion, un style vestimentaire.
On les distingue même par leur façon de s'exprimer ou de se tenir. Ils sont considérés comme des gens populaires mais pour moi, ils ne le sont pas. »
Tisun pointe l'hypocrisie de ces groupes -déjà relevée sur la mode :
« Les “populaires” n'aiment pas forcément les centres d'intérêt qu'ils affichent, mais ils s'inventent une personnalité , ou se forcent à faire des choses qui ne les amusent pas forcément. »
« Ne pas avoir besoin d'être gentil pour se faire aimer »
C'est une question posée en conférence de rédaction à Rue89 quand j'ai parlé de ce sujet. Le statut de « populaire » chez les jeunes est-il le même que celui montré dans les séries TV américaines : à savoir, une personne désagréable, souvent connue de tous mais irrespectueuse ?
Lina :
« Ces personnes abusent souvent de leur statut social parce qu'ils considèrent leur popularité comme acquise. Ils n'ont plus besoin d'être gentils pour se faire aimer. »
Jean, Parisien de 17 ans, pense que cela dépend des gens :
« Il y a des “populaires” qui sont humbles, bonne ambiance, d'autres pas. Cela dépend du tempérament de la personne. »
Etre populaire aussi en amour
Pour Eva, « une personne populaire aura plusieurs opportunités » :
« Se sentir admiré et copié facilite la tâche. Le “populaire” aura beaucoup moins de chances de se prendre un râteau. La sureté donne la confiance. »
Attica, Parisienne de 16 ans, admet que la chance sourit aux chanceux, mais au final….
« Une personne populaire sort beaucoup, c'est comme ça qu'elle entretient sa popularité : les rencontres, en amitié, comme en amour.
Elle fait tout pour garder sa bonne image, grâce à laquelle elle aura plus de succès en amour.
Mais peut-on tomber amoureux d'une image ? Plus de relations, certes, mais souvent superficielles. »
Etre populaire, où et quand cela devient-il moins important ?
Attica pense que les choses changent réellement lors de la deuxième année du lycée :
« Au lycée, on apprend à être indépendant donc on cherche moins à attirer les autres vers nous.
Je trouve que la popularité disparaît en première : les classes se mélangent sur un projet scolaire, et on oublie petit à petit la recherche de l'image parfaite face aux autres parce qu'il faut à présent chercher à se construire tout seul plutôt qu'accompagné. »
Jean nous dit que « dans les grandes villes, les gens sont souvent plus antipathiques que dans de plus petites, ou à la campagne, où les gens se soucient moins du “ paraître ”, donc la notion de popularité est plus vague ».
Pierre, n'est pas de cet avis :
« Je pense qu'il y a partout des gens plus populaires que d'autres, ça a toujours existé et ça existera toujours. »
Dans mon lycée de 1 700 élèves environ, la popularité n'existe plus vraiment, ou ne compte plus. Des gens de tous les genres, toutes les couleurs, tous les milieux sociaux discutent ensemble, jusqu'à une certaine limite, certes.
Mais la question de savoir si Untel est populaire ou non est révolue, alors qu'elle était très importante dans mon collège -beaucoup plus homogène socialement, bourgeois.
article complet : http://www.rue89.com/2010/12/27/cest-quoi-etre-populaire-au-lycee-182499