"Meilleurs vœux pour 2011 !" Ce sont peut-être les derniers mots que risquent d'entendre les personnes contraintes de vivre à la rue… avant d'y mourir ! Et pourtant, comme d'autres, ces personnes espèrent qu'on leur annonce :
"L'année 2011 est placée sous les meilleurs auspices : les Hommes vivant à la rue sont assurés d'intégrer un hébergement pérenne, les familles vivant à l'hôtel vont enfin pouvoir bénéficier d'un appartement, les logements insalubres vont être assainis, les demandeurs de logement vont rapidement obtenir un logement social, les expulsions locatives vont disparaître au profit d'un accompagnement des personnes en difficultés, les demandeurs d'asile seront pris en charge par les dispositifs d'hébergement et les familles sans papiers vont être régularisées et devenir les nouveaux fers de lance d'un corps citoyen toujours plus solidaire.
Les élus nationaux, territoriaux et locaux vont promulguer les lois adaptées aux personnes les plus précaires, les maires des communes vont respecter la législation en vigueur en appliquant scrupuleusement la loi SRU [Solidarité et renouvellement urbains], un moratoire aux arrêtés stigmatisant les personnes sans abri sera prononcé, des moyens financiers importants seront alloués à la construction d'aires d'accueil et de logements très sociaux."
Voilà, Monsieur le président, Monsieur le premier ministre, Mesdames et Messieurs les députés et sénateurs, Mesdames et Messieurs les maires, les mots que vos vœux pourraient emprunter pour cette année 2011. En leur absence, vous remettrez en cause la cohésion sociale de notre pays et vous omettrez les principes fondamentaux de nos textes fondateurs. Comment voulez-vous, sans ces mots, que les valeurs républicaines trouvent leur place auprès de vos jeunes et moins jeunes concitoyens ? Quelle signification peut prendre cette notion de liberté lorsque la rue et la précarité obligent à suivre le chemin de la survie jalonné par la mendicité ou les distributions alimentaires… c'est la soumission à vie !
Quel sens donner à l'égalité si chaque homme n'a pas la possibilité d'avoir un toit, un travail, un accès aux soins et à l'éducation ? Comment promulguer la fraternité tout en stigmatisant les minorités et tout en fermant la porte de la mixité sociale ? Le non respect de ces droits fondamentaux menace l'équilibre de la société !
Vos vœux, qui prônent la justice, ne doivent pas être vains et identiques à ceux des années précédentes. Vos concitoyens espèrent bien plus. Ils souhaitent notamment de l'audace : celle qui érige l'humanité au cœur des dispositifs au moyen d'une mise en œuvre solidaire. Ils souhaitent aussi de la volonté : celle qui permettra la mise en œuvre des politiques cohérentes. Ils désirent enfin un engagement total, celui qui fera sens en éradiquant la misère de leur pays.
Si tel n'est pas le cas, j'ai bien peur que ces vœux 2011 ne se transforment en condoléances en direction des membres de la communauté des personnes sans abris et précaires, ceux qui risquent fort de mourir prématurément cette année.
Christophe Louis, président du collectif Les Morts de la rue