Les fêtes de fin d’année permettent de jeter un regard rétrospectif et serein sur l’année écoulée, et notamment sur son travail. Alors regardons un peu l’une des pierres angulaires de l’organisation du travail, la réunion, une spécialité française, une mine d’or ! J’ai sélectionné pour vous quelques typologies de réunions auxquelles j’ai eu la chance d’assister en cette année 2010.
La réunion de concertation
En résumé, quand on sort d’une réunion « de concertation » on a fait acte de présence en signant la feuille d’émargement et on sort en se disant qu’on a perdu sa demi-journée (car la consultation est rarement inférieure à 3h…). Nota : certains spécialistes de réunions ont pour technique de se pointer en réunion, signer la feuille d’émargement et s’éclipser par la suite, souvent en prétextant une autre réunion d’ailleurs ! Professionnels des réunions, ils sont capables d’en enchainer plusieurs en une journée sans rien en retirer d’aucune mais en ayant le sentiment d’avoir « travaillé ».
Le « comité de pilotage »
Censé piloter, il est rarement préparé, accumule des faits sans donner de temps à l’action, encore moins à la prise de décision. Le comité de pilotage donne un vernis « opérationnel » à une énième réunion et satisfait souvent les spécialistes des réunions, qui ont souvent des choses à dire sur comment faire, mais rarement pour le faire eux-même en revanche. Ce n’est pas grave car en effet, dans le comité de pilotage il y a toujours un scribouillard qui fera le compte-rendu et à qui on refile le boulot, c’est plus commode. Le comité de pilotage est le terrain privilégié du « Y’a qu’à faut que, on va », rarement suivis d’actes de la part de ceux qui ont parlé…De ce fait, le comité de pilotage est très prisé des spécialistes de réunions qui peuvent exposer aisément leurs réflexions, points de vue, solutions multiples et variées… dont jamais ils ne se chargeront de la mise en œuvre, évidemment !
La réunion du certificateur
C’est probablement la seule qui soit efficace. Ordre du jour précis, animateur identifié, concertation, échanges et débats, on y avance et on y apprend des choses sur le sujet traité. En début de réunion, les questions et points évoqués à la précédente réunion sont présentés et l’avancée des travaux exposée. Malheureusement, la réunion de certificateur est rare et centrée essentiellement sur des référentiels, ce qui limite fortement son champ d’action. Néanmoins, la méthodologie devrait nous inspirer ; normal, ce sont des certificateurs !
Malheureusement, ce genre de réunion efficace est généralement perturbé par le sachant de service, celui qui sait tout et parle sur tout. Souvent à tort, parfois pour soutenir d’énormes bêtises mais avec l’aplomb suffisant, ces personnages sont légion en France, qui écument les réunions diverses et variées. Les dirigeants intelligents les nomment d’ailleurs parfois pour représenter l’entreprise, ce qui constitue une manœuvre doublement bénéfique : le salarié, souvent peu productif, s’éclate, et le dirigeant s’évite un boulet tout en permettant à son entreprise de toujours être présente aux réunions.
La réunion de service
Suprême moment de la vie au travail, la réunion de service est un petit bijou de l’organisation du travail à la française, d’inspiration pyramidale. Une hiérarchie bien ordonnée, un jeu de rôles millimétré, aucune surprise à la réunion de service. On y perd son temps mais cela permet au chef d’asseoir son autorité. Cette messe du « travail en équipe » permet aussi au chef de prendre l’information de ses subalternes, de la filtrer pour la recracher (souvent mal mais à son avantage et à sa sauce) à son chef juste au-dessus. Une vraie organisation verticale à la française…La réunion de service est aussi le terrain de jeu idéal pour le chef, s’il sait parler : explosion de rhétorique, démonstrations en tous genres sur le «pourquoi » et le « comment », explications sentencieuses (et souvent erronée), humour, secrets et informations de première main, reformulation pseudo-sachante de ce qui vient de lui être dit, tout y passe pour qui sait se faire mousser et rester sur l’écume des dossiers.
La réunion de service permet aussi, de par son format, à chacun d’avancer son point de vue et sa platitude du jour (moi le premier, comme ça on participe, on est « constructif » !).
Souvent trop longue, rarement préparée, la réunion de service est un constat plat, ramollo, un copier-coller du fonctionnement d’un service mais autour d’une même table, pendant une heure, voire plusieurs malheureusement !
Elles sont enfin l’occasion rêvée pour le chef de benner des dossiers et du travail aux subalternes : devant tout le monde, qui oserait dire non et passer pour une feignasse ?
Les réunions du personnel
Sympas les réunions du personnel, on voit des collègues qu’on croise pas souvent, c’est rarement pour se prendre un dossier de plus à traiter, ça rappelle un peu la récré à l’école, limite potache. On y apprend de la part de l’aréopage des chefs, à l’air toujours grave, des informations sur l’entreprise, sur les perspectives, sur l’environnement économique. Faut bien ça de temps en temps pour réunir les équipes non ?! Idéalement, une réunion du personnel devrait toujours être organisée vers 11h30 et suivie d’un apéritif, histoire de souder le personnel !
Bilan sur les réunions
Il n’est pas bon du tout, proche du nul. Au mieux, on apprend des choses, plus souvent on perd son temps ou plutôt, le temps consacré au regard de l’efficacité obtenue est incroyablement disproportionné. En un mot, la réunion est, en sa forme actuelle, inutile et contre-productive.