L'exercice est délicat. Chaque année, le président délivre ses voeux aux Français. Sarkozy n'a jamais dérogé à cette règle de la Vème République télévisuelle. Les éditorialistes politiques se jettent alors sur ces quelques minutes de déclarations pour décrypter les intentions du président. Depuis décembre 2006, les propos de Nicolas sarkozy furent édifiants, symboliques des revirements successifs de son action à la tête du pays. Il faut les réécouter pour le croire.
2006, les promesses d'un candidat
Pour 2007, Sarkozy, alors candidat, promettait la réforme. Il commençait surtout par remercier ses « chers amis » d'avoir construit « la première formation politique du pays», une « formation qui porte les valeurs de la droite républicaine et du centre.» En décembre 2006, Sarkozy souhaitait d'abord une bonne année aux militants UMP.
2007, l'enthousiasme malgré l'impopularité
Un an plus tard, élu depuis à peine 7 mois, il remercie de la « confiance que vous m'avez accordée.» Il est encore souriant. « Ce soir, j'ai une pensée pour chacun d'entre vous. » Il s'engageait toujours : « tout ce que j'ai promis, je le ferai ». Il délivra « un message de foi dans la vie.» Il est optimiste : « je voudrai convaincre même celui qui en doute, qu'il n'y a pas de fatalité du malheur.» Il se félicite de l'avoir achevé une première étape, celle de « l'urgence à dépasser les clivages partisans », « l'urgence du choc fiscal et social pour rétablir la confiance et soutenir l'activité », « urgence du pouvoir d'achat, urgence de l'autonomie des universités, urgence de réformer les régimes spéciaux, de libérer et de réhabiliter le travail, urgence du service minimum, urgence de la modernisation de l'Etat qui commence enfin, urgence des réformes qui attendaient depuis 20 ou 30 ans, urgence que la France devienne exemplaire.»
On devine que pour l'électeur sarkozyste peut-être encore enthousiaste en ce mois de décembre 2008, ces quelques phrases résonnent difficilement deux ans plus tard.
2008, la crise lui a coupé les jarrets
En décembre 2008, il digérait à peine la crise de l'automne. « L'année 2008 s'achève, elle a été rude. » La mine est sombre. Sarkozy se tient debout. Il s'exonère, presque à chaque phrase. Il pense « à ceux qui ont perdu leur emploi sans pour y être pour quoi que ce soit. » Devenu gauchiste de circonstance, il avait faussement échangé les pauvres, les chômeurs et les jeunes contre les banquiers et les « patrons-voyous ». « La crise économique et financière mondiale est venue ajouter son lot de peines et de souffrances.» Déjà, Sarkozy réécrit l'histoire des mois écoulés. « Les initiatives que j'ai prise au nom de la présidence française de l'Union européenne pour coordonner l'action de tous les Européens, pour réunir les chefs d'Etat des 20 plus grandes puissances mondiales à Washington ont permis d'éviter que le monde s'engage sur la pente du chacun pour soi. » Il y croit. Sarkozy, sauveur du monde, telle était l'image qu'il voulait laisser aux Français ce soir du 31 décembre 2008. Sa cote d'impopularité, déjà, frôle les 60%.
« Je vous ai toujours dit la vérité, et j'ai agi. C'était mon devoir. » Il fait le job, ou du moins tente-t-il de le faire croire. Les scandales du Premier Cercle ne sont pas encore connus du grand public.
2009, il veut y croire encore
En décembre 2009, il revenait, déjà, d'une semaine au Maroc. Le Bling Bling ne l'a jamais quitté. Il débute par les mêmes propos qu'un an plus tôt : « L'année qui s'achève a été difficile pour tous. » Encore... Il se félicite du plan de relance. Il cherche à déminer la grogne sociale, en rendant « hommage aux partenaires sociaux.» La réforme des retraites est son prochain chantier. Encore une fois, il s'émerveille d'avoir résolu des « problèmes qui paraissaient insolubles comme les bonus extravagants et les paradis fiscaux.» Personne n'y croit, tout le monde s'en fiche. Sarkozy n'a plus d'élan. Le sommet de Copenhague vient de se terminer sur un gigantesque échec. Et le Conseil constitutionnel vient de retoquer son injuste taxe carbone. Il a joué à l'écolo pour rien. Il est dégoûté, et ça se voit.
Pour le plaisir et pour conclure, voici les voeux 2010 détournés par le PCF, rapidement censurés par Dailymotion.