Quel rapport entre la création du journal Libération, la mort de Bruce Lee, les inaugurations du périphérique parisien et du World Trade Center, La grande bouffe, le scandale du Watergate, les mange-disques et le disque dur ? L’année 1973. Une année choisie au hasard - celle de ma naissance ! - dans les sept décennies (de 1944 à nos jours) où sont retracés mois par mois, les événements nationaux et internationaux, décisifs ou anecdotiques, enthousiasmants ou polémiques, qu’ils soient culturels, musicaux, politique, sportif ou simples faits de société, le tout réinscrit dans les contextes de leur époque. Une invitation à nous réapproprier le passé, notre passé, en le retrouvant presque intact.
Plus que divertissant, un site tel que live2times apparaît nécessaire dans un monde d’hyper réactivité, où le flot d’informations, d’images et de pensées se déverse avec un tel débit qu’il finit souvent par emporter dans son tourbillon de pixels ce qu’il était venu apporter. Dans notre société où même les créations artistiques se démodent aussi vite qu’un téléphone portable de dernière génération ; dans une société où le rythme des saisons lui-même semble trébucher dans cette course effrénée vers… vers quoi finalement ? Le passé plus que jamais est essentiel à la compréhension des réalités fugitives qui nous entourent. Mais aussi parce que seul l’histoire, notre histoire, est à même de nous permettre de prendre du recul, d’entendre les échos et les battements de ce monde toujours plus pressé. Seul le passé peut se dresser comme miroir tangible amenant la réflexion de ce qu’est aujourd’hui et de ce que sera demain.
C’est certainement l’une des ambitions de ce site novateur, mais ça n’est pas la seule.
Mon univers
Le site atteint véritablement son ambition, être à la fois introspectif et communautaire, en invitant l’utilisateur à concilier – réconcilier - l’Histoire avec sa propre existence et en lui permettant de dérouler entre les évènements majeurs du monde son parcours intime. Dans l’espace « Mon univers » est proposé à chacun de recréer sa sphère en sélectionnant les évènements qui l’ont marqués et en les nourrissant de son propre ressenti, de ses propres souvenirs, de son propre vécu et de réinscrire la trame de sa vie dans les mille contextes de l’époque.
Finalement, Live2times est une sorte de Google Earth du temps et de l’histoire où chacun peut retranscrire son parcours.
Rencontre avec Jean-Luc Besset, Fondateur et Président de live2times.
Ma première question est toute simple : pourquoi avoir choisi comme nom live2times ?
J’ai pas mal réfléchi ! A l’origine, je penchais pour quelque chose comme le Temps retrouvé en référence à Proust ou alors le titre d’une chanson des Beatles (Groupe que j’adore), in my life, ou carrément yesterday. Mais cela ne s’est pas avéré possible. Il fallait aussi que se soit simple et à vocation internationale. Le nom live2times, en référence à la chanson des Doors, Love me two times, part de l’idée de vivre deux fois, de revivre les choses, celles qu’on a vécu et celles qu’on aurait aimé vivre. Bref, conjurer l’insoutenable légèreté de la vie qui passe, irrémédiablement, bien décrite par Kundera.
Live2Times, comme une deuxième chance.
Oui, c’est un peu ça.
Pourquoi et comment est venue l’idée de créer un tel site ?
J’ai toujours été nostalgique… En 1989 je regrettais 1987 ! Puis, surtout, je suis passionné d’Histoire. A force de lecture, je me suis peu à peu inscrit dans cette familiarité avec le temps passé, dans cette intimité avec les gens d’une autre époque que la mienne, jusqu’à me sentir contemporain de leur temps, de manière virtuelle.
De manière virtuelle… Justement, pourquoi un site internet ?
Je travaille dans le web depuis plus de treize ans et, très vite, j’ai souhaité construire quelques chose qui ressemblerait à ce qu’est aujourd’hui live2times. Mon premier cahier des charges date de 1999, mais ni les conditions technologiques, matérielles et personnelles n’étaient réunies. Le temps n’était pas encore venu.
Tous les articles du site sont écrits au présent, pourquoi ?
Nous essayons de faire en sorte que l’immersion temporelle soit totale, tant graphiquement que dans la lecture. Donc, nous demandons à nos « envoyés spéciaux temporels » d’écrire au présent et « dos au futur » que nous ne sommes pas sensé connaître.
Lorsque l’on tente d’expliquer ce qu’est live2times, beaucoup de gens pensent à Wikipédia. Quelles différences entre ces deux sites qui tous les deux invitent les internautes à enrichir son contenu ?
Notre vocation n’est pas d’être une encyclopédie ni, pour le moment, d’être exhaustif sur un sujet. Notre ambition est d’offrir un lieu unique, le plus convivial possible, pour voir et comprendre le monde d’hier, s’y balader et partager souvenirs, passions et émotions.
Qu’est-ce qui a été le plus difficile à relever comme défi ?
Convaincre des investisseurs n’a pas été le plus difficile. Ils ont été convaincus par le concept mais aussi par l’équipe que j’ai constitué autour de moi. Le plus critique, mais le plus exaltant, est de susciter et entretenir l’enthousiasme, de faire partager sa flamme, je dirais même que c’est la première tâche dans une entreprise comme celle-ci. Toutes les personnes qui travaillent sur ce projet que ça soit dans l’éditorial, la technique ou le marketing, aiment peu ou prou l’Histoire et ont l’impression – du moins c’est ce que je ressens – de participer à un aventure unique. Le plus difficile est de parvenir à coordonner tout le monde car le travail est immense, abyssal ! Mais tellement enthousiasmant.
On imagine aisément que la somme des articles et pour ainsi dire illimitée. Comment avez-vous pensé la structure du site ?
La priorité - nous sommes quand même sur un site d’Histoire et les faits n’ont de sens que dans leur contexte - c’est le menu chronologique, par décennie d’abord, puis par années et enfin par mois. Un autre axe de navigation est l’axe thématique (politique, économie, sport, musique etc..) qui permet de plonger dans l’Histoire à partir d’un domaine précis. Nous envisageons aussi, dans un avenir proche, une navigation géographique en partant de la cartographie sur internet.
Parlons un peu d’avenir. Comment comptez-vous faire évoluer le site par la suite ?
En fonction des moyens dont nous disposerons, le site évoluera dans différentes directions. Tout d’abord renforcer la partie communautaire déjà présente en apportant à nos membres des fonctionnalités nouvelles pour le partage de souvenirs et permettre la constitution de communautés autour de groupes, de marques, d’événements, de films etc. Ensuite nous souhaitons enrichir le contenu via un meilleur usage de la sémantique et la récupération de données à tonalité historique. J’envisage aussi un partenariat gagnant-gagnant avec la presse à travers une mise en valeur de ses archives. Toujours avec la presse, nous tenons aussi à aller plus loin dans l’Histoire locale et régionale en nous rapprochant de la Presse quotidienne régionale.
Et la littérature ?
Dans la même idée, nous allons valoriser le contenu interne avec des ouvrages « papier » pertinents sur les sujets. Le but est d’apporter une vision encore plus riche et originale de chaque moment de l’histoire. En effet, les romanciers sont en quelque sorte les historiens de l’invisible. En écrivant sur ce qui n’a pas été raconté, ils comblent les trous de l’Histoire. Songez, par exemple, à ce qu‘un James Ellroy nous donne à voir sur l’Amérique des années 50 et 60 ? Tout cela contribue à recréer une réalité sans être pour autant un travail d’historien. Et enfin, Live2times est clairement un site universel dans sa vocation. Le déploiement à une échelle internationale fera partie de nos réflexions dès 2011.