Un bébé Sarkozy pour l'élection
Depuis 4 jours, le président français se repose en famille à Marrakech, au Maroc. Il n'a eu aucune difficulté météorologique à rejoindre son lieu de villégiature. La rumeur d'un nouvel enfant refait surface. Pendant ce silence médiatique, on glose sur ses voeux. Henri Guaino lui a préparé une trame pour son allocution, le 31 décembre. Il souhaitera une bonne année à ses concitoyens, avant d'entamer, comme il y a deux ans, une longue tournée, notamment en province. On sait déjà qu'il ira parler tourisme en Martinique (les 7 et 8 janvier), agriculture en Guadeloupe (le 9), ruralité en Alsace (le 18), pêche en Bretagne (en février), et même au forum de Davos (le 27) et au sommet de l'Union africaine à Addis Abeba le 30. Il a également promis une conférence de presse avec des vrais journalistes pour l'interroger. Les sujets seront encadrés : il faudra parler de la présidence française du G20, et de rien d'autre. En attendant, on nous explique, par ministre interposé, qu'il « veut prendre de la hauteur ». Il parlera de « valeurs républicaines ». Il faudrait oublier le discours de Grenoble, où l'immigré fut désigné responsable de l'insécurité.
Il y a un an déjà, une rumeur prêtait à Carla Bruni-Sarkozy l'intention de tomber enceinte juste avant l'élection présidentielle. Elle l'avait confié elle-même au mensuel américain Vanity Fair en 2008 : « J'aimerais avoir des enfants avec Nicolas (...) Ce serait un rêve » Cette fois-ci, c'est le très sérieux Times, de Londres, qui relaye : « Sarkozy prie pour un bébé pour rebondir. Des rumeurs disent que Sarkozy voudrait avoir un enfant pour remonter dans les sondages ». Tout serait donc possible, pour une réélection.
Un cadeau russe pour Noël
Nicolas Sarkozy a pris soin de faire publier un communiqué commun et triomphant, samedi 25 décembre, sur la commande russe de deux navires BPC aux chantiers navals de Saint-Nazaire, des porte-hélicoptères avec des capacités amphibies. « Industrie navale : la France gagne ! » L'Elysée précise qu'il y en a pour 4 ans de travail (5 millions d'heures !). Hip ! Hip ! Hip ! Hourra ! Les chantiers de Saint-Nazaire peuvent être soulagés. On ne connaît pas le montant du contrat, même si le coût de ces navires est estimé entre 400 et 500 millions d'euros pièce.
Mais ce cocorico sarkozyen est un peu facile. Sarkozy nous avait déjà vendu cette commande en juillet dernier, alors que la décision n'était pas prise : « avec nos amis russes, vous allez fabriquer les deux BPC... Le contrat, on est en train de le négocier, mais la décision de le faire, elle est certaine.» avait-il déclaré aux ouvriers des constructions navales de l'entreprise STX, à Saint-Nazaire. Les États-Unis et d'anciennes républiques soviétiques s'inquiètent du transfert de technologie : après la crise géorgienne de l'été 2008, le chef de la Marine russe avait expliqué qu'avec ces navires Mistral, la Russie aurait pu atteindre ses objectifs militaires en quarante minutes au lieu de vingt-six heures. C'est la première fois qu'un pays membre de l'OTAN vend un tel matériel militaire à la Russie.
Effectivement, à lire le communiqué officiel, on comprend qu'il y a transfert de technologie : les bateaux seront construits en commun : « L'offre du consortium prévoit dans un premier temps la construction en commun de 2 navires de ce type, qui devrait être prolongée par la fabrication de deux unités supplémentaires. » Ces deux unités supplémentaires, si elles sont confirmées d'ici là, seront fabriquées en Russie. « Dès le premier navire, les spécialistes russes participeront aux travaux de construction, qui commenceront en 2011. Le montant des travaux pour la partie russe s'élèvera à 20%. Par la suite, la part des travaux réalisés par la Russie augmentera », a précisé le porte-parole des chantiers navals russes OSK. La presse russe officielle explique qu'il s'agit de combler le retard technologique pris par l'armée russe. L'agence Rianovosti évoque ainsi « la situation déplorable de la recherche et de l’industrie dans le domaine des constructions navales qui, depuis l’échec des années 90 – début 2000, sont incapable d’élaborer et de construire des bâtiments en nombre suffisant.» François Fillon, lors de sa visite début décembre à Moscou, avait d'ailleurs prévenu : « Les transferts de technologie ne posent pas de problème ».
En France, Sarkozy a laissé Hortefeux et Juppé occuper la scène médiatique. Le premier s'est fait photographier patrouillant avec des policiers de la BAC en Seine-Saint-Denis, dans la nuit de dimanche à lundi : « l'action de l'Etat ne connaît aucune pause » a-t-il commenté. Même en matière de gaffe, l'action du ministre ne connaît aucune pose : à l'occasion de ce déplacement nocturne, un porte-parole sans doute fatigué a expliqué qu'Hortefeux avait « participé à une opération de contrôle de trafic de drogue dans un hall d'immeuble de la cité Romain Rolland ». Un contrôle de trafic ? On peut légitimement contrôle la circulation ou les identités, mais les trafics de drogue...
Un cauchemar afghan
Alain Juppé, ministre de la Défense, prend son job également très à coeur. Il a passé la journée de Noël auprès de troupes françaises en Afghanistan. Il a même essayé le paquetage des troupes, sur la base opérationnelle de Tora, dans le district de Surobi. Depuis 2001, 52 militaires français ont été tués en Afghanistan, dont deux tout récemment, les 17 et 18 décembre derniers.
Le dispositif français, en Afghanistan, est suffisamment important pour agacer les Talibans, et trop restreint pour exister réellement de façon autonome. Les Français y sont des supplétifs des forces américaines.
Juppé a également rencontré le président Karzaï. Il s'est dit confiant au sujet des deux journalistes français, Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, et de leurs trois accompagnateurs afghans retenus en otages depuis un an. « Le président Karzaï m'a assuré du soutien complet des autorités afghanes et de l'aide qu'elles peuvent nous apporter » a-t-il expliqué, avec l'une des plus belles langues de bois du moment. Jeudi dernier, le comité de soutien aux otages a remis une pétition de 80 000 signatures. Le gouvernement a accepté de montrer aux familles la video des otages reçue ces derniers jours.
Un scandale médical et politique
Le Figaro a révélé l'existence d'une nouvelle note gênante pour la cause du Mediator. En mars 1998, l'Union régionale des caisses d'assurance-maladie (Urcam) de Bourgogne s'inquiétait (1) du coût faramineux du Mediator pour les comptes de l'assurance maladie, (2) du détournement de prescriptions : « Bien que faisant partie d'une liste de substances anorexigènes (arrêté du 25 octobre 1995, Journal Officiel), qui ne doivent être incorporées dans des préparations magistrales, le Mediator ne fait pas l'objet d'une prescription restreinte.» Pour un tiers des prescriptions, cet anti-diabétique était utilisé comme coupe-faim, remboursé à 65% par la Sécurité Sociale ! La date de cette note n'est pas anodine : en 1998, la gauche plurielle est au pouvoir. A l'Elysée comme au gouvernement, on cherche à dé-politiser l'affaire.
Le 23 décembre dernier, Xavier Bertrand avait promis que les patients ayant pris du Mediator seraient remboursés à 100% par la Sécurité sociale des consultations et traitements qu'ils seraient amenés à subir à cause du médicament : « Ma priorité, c'est de dire que pour tous ces patients qui ont pris du Mediator, il y a aura une prise en charge intégrale par l'assurance maladie et qu'il faut donc consulter.» Les complications cardio-vasculaires (hypertensions artérielles pulmonaires ou fuites valvulaires cardiaques) liés au Mediator surviennent dans les deux premières années de traitement.
Le lendemain, le directeur de la Caisse nationale d'Assurance maladie (CNAM) a prévenu que la Sécu se ferait rembourser les frais indument remboursés au titre du Mediator. Sur les 10 dernières années, on estime à 423 millions d'euros le coût du Mediator pour la Sécu. « Les enjeux financiers sont tels que (...) nous avons décidé d'organiser un suivi national et une coordination de l'ensemble des actions des caisses (...). Dans ces contentieux, les caisses feront donc valoir leurs droits » afin que « la Sécurité sociale puisse se faire rembourser des sommes qui auraient été prises en charge à la suite de problèmes consécutifs à la consommation de Mediator.»
Vivement la rentrée !