Le film Peau d'âne ( 1970 ) est un bijou qui mérite tous les éloges tant le charme du récit de Perrault a été respecté et mis en images de la façon la plus exquise par Jacques Demy. Une réussite absolue et un vrai enchantement pour le spectateur, le metteur en scène ayant su harmoniser à la perfection la féerie du conte tout en le saupoudrant d'un zeste d'humour contemporain. Décors splendides, costumes somptueux, chansons ravissantes sur une musique de Michel Legrand, anachronismes savoureux, rien ne manque à ce long métrage qui apparaît comme un petit miracle. Il arrive que le cinéma nous offre ce genre de divine surprise...
L'histoire est celle d'une jeune princesse dont le père a fait le serment à son épouse bien-aimée, juste avant qu'elle ne meure, qu'il ne se remarierait qu'avec une femme plus belle qu'elle. Or il ne découvre qu'une seule prétendante qui puisse rivaliser avec la défunte reine : sa propre fille. Pour ne pas se marier avec son père et, sur les conseils de sa marraine la fée Lilas ( Delphine Seyrig ), la jeune fille s'enfuit dans la forêt, cachée sous la dépouille d'un âne, et va vivre là comme une pauvresse, loin des fastes d'antan. Mais le prince charmant l'a surprise dans sa splendeur et, désormais, le souvenir de sa grâce ne cesse de le hanter. Il n'a plus qu'un souhait, la revoir, et fera en sorte de tout tenter pour la rejoindre. Un anneau d'or glissé dans une galette par Peau d'âne le mettra sur le chemin de sa belle et, bien entendu, ils se marieront et auront beaucoup d'enfants.
La présence de Jean Marais dans le rôle du père est là pour rappeler l'hommage que Demy rend à Cocteau à travers ce film qui évoque, bien sûr, La belle et la bête, mais plus spécifiquement ce surréalisme qui frise l'onirisme et plaisait tant au poète-dramaturge. Aussi se laisse-t-on séduire par cette féerie, le symbolisme parfois un peu trop insistant, les robes couleur de temps ou de lune et cette imaginaire qui fait fi de la raison. Car dans les contes, la raison est l'usage des fées, c'est dire que c'est une raison délicieusement déraisonnable, enchâssée de rêve et de fantaisie. Et n'en doutons pas, la morale sera sauve. L'inceste sera évité et remplacé par la fraîcheur d'un amour adolescent, tandis que le plaisir, comme le labeur, finira en chansons et que l'humour fera en sorte d'être présent au bon moment.
Catherine Deneuve, dont c'était là le troisième film avec Demy, après Les parapluies de Cherbourg et Les demoiselles de Rochefort, nous séduit davantage par sa présence évanescente, son profil de camée et sa blondeur idéale, que par son jeu qui n'était pas encore affirmé ; Jacques Perrin est un prince charmant assez pâlichon, mais Delphine Seyrig en fée Lilas est absolument adorable et Micheline Presle magnifique en Reine rouge. Ce film enchanteur dispense un plaisir extrême et nous assure durant 1h40 une immersion totale dans le monde féerique de l'enfance.
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Les demoiselles de Rochefort Lola
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