Vols annulés : les droits des consommateurs – comment se faire rembourser

Publié le 27 décembre 2010 par Frédéric Duval-Levesque

L’intégralité du débat avec Gaëlle Patteta, directrice juridique à l’UFC-”Que choisir”, lundi 26 avril.

Source : lemonde.fr

- Dans un chat sur Le Monde.fr, Gaëlle Patetta, directrice juridique à l’UFC-Que Choisir, fait le point sur les droits des consommateurs et les procédures de remboursement. L’association de consommateurs a également publié sur son site un guide qui détaille les différents cas de figure et fournit des lettres types pour faciliter les démarches.

Kristof : Comment peut-on obtenir le remboursement d’autres dépenses engagées (billets de train, logement, alimentation, transports en commun) non prises en charge par la compagnie aérienne ?

Gaëlle Patetta : Si le consommateur a acheté un vol sec et que l’annulation du vol concernait un vol européen (vol au départ de l’Europe ou avec une compagnie européenne), le règlement européen de 2004 prévoit que la compagnie aérienne doit prendre en charge les voyageurs jusqu’à ce qu’elle puisse les réacheminer. S’il n’y a pas eu de prise en charge par la compagnie aérienne, ce texte n’a pas été respecté, et donc le voyageur peut demander le remboursement de ses frais. Le consommateur peut aussi demander le remboursement de son billet.

julie92 : Dans le cas d’un voyage à forfait, qui doit rembourser : le tour-opérateur ou l’agence de voyage ?

Gaëlle Patetta : Le code du tourisme indique que c’est le vendeur qui doit informer le client de sa possibilité de résilier le contrat et d’être remboursé. Le vendeur peut proposer un report du voyage, le consommateur peut accepter ou refuser.

Drey : Est-ce que les modalités de dédommagement dépendent de la “nationalité” de la compagnie ? J’ai entendu parler d’un règlement européen qui obligeait les compagnies de l’Union européenne à dédommager leurs clients, mais qu’en est-il des compagnies hors UE ?

Gaëlle Patetta : En fait, le règlement européen de 2004 s’applique en cas de vol européen. Il peut s’appliquer à une compagnie n’ayant pas de licence européenne si le vol était au départ d’un Etat européen, de la Suisse, de la Norvège ou de l’Islande. Quand il s’agit d’un vol non européen, le règlement ne s’applique plus et là, c’est généralement la loi du pays de la compagnie aérienne à laquelle il faut se référer pour savoir s’il y a un remboursement ou une prise en charge.

Kristof : Comment peut-on se faire rembourser un billet d’avion non utilisé quand le service clientèle ne répond pas à nos sollicitations ?

Gaëlle Patetta : Le mieux est de faire un courrier recommandé avec accusé de réception, qui vous permettra d’avoir la preuve de votre réclamation s’il y a des problèmes ensuite. Sur notre site Internet, vous avez des modèles de lettre dont vous pouvez vous servir.

Cathy : Nous avons été bloqués la semaine dernière et aimerions savoir quels sont les moyens de se faire rembourser les jours d’absence à la crèche de ma fille ?

Gaëlle Patetta : Malheureusement, ce ne sera pas possible, parce que là vous demandez une indemnisation pour un préjudice supplémentaire. Le professionnel est exonéré de sa responsabilité, puisqu’il y a un cas de force majeure (l’éruption du volcan), le consommateur ne peut pas demander la réparation du préjudice supplémentaire au-delà du remboursement ou de la prise en charge.

Cette impossibilité de demander la réparation d’un préjudice au-delà du remboursement ou de la prise en charge s’applique à toutes les demandes que pourraient faire les voyageurs, comme les frais de garde d’animaux, les frais d’emplacement de parking supplémentaires, les jours de congés payés qu’ils ont été obligés de prendre, etc.

Guest : Dans le cas d’un vol sec acheté dans une agence de voyage, qui dois-je contacter pour être remboursé ?

Gaëlle Patetta : Quand un vol sec a été acheté auprès d’une agence de voyage, c’est la compagnie aérienne qui est tenue de rembourser ou de prendre en charge le voyageur. C’est donc normalement auprès de ce transporteur qu’il faut faire valoir sa demande de remboursement. Il peut arriver que la compagnie vous renvoie à l’agence de voyage parce qu’elle a adressé l’argent à celle-ci ; dans ce cas, il faudra contacter l’agence de voyage.

Raspoutine : La compagnie empruntée me propose un remboursement sous trois mois maximum. Est-ce légal ? Que faire si au bout de trois mois je ne suis pas remboursé ?

Gaëlle Patetta : Le règlement européen prévoit que le consommateur doit être remboursé sous sept jours. Mais compte tenu des circonstances et du nombre de personnes qui doivent faire des réclamations en ce moment, les voyageurs peuvent, peut-être, être un peu indulgents sur le délai de traitement. Mais dès lors qu’ils ont fait une réclamation, ils devront obtenir le remboursement, et si au-delà du délai de trois mois ce n’est pas le cas, ils pourront s’adresser à une association locale de l’UFC-Que Choisir pour faire pression.

Guy: J’étais bloqué à l’aéroport de Londres. Quelles étaient les obligations de prise en charge de ma compagnie ? Que faire si elles n’ont pas été respectées ?

Gaëlle Patetta : Vous êtes dans le cadre d’un vol européen. Le règlement de 2004 prévoit que la compagnie aérienne doit vous offrir rafraîchissements, nourriture, possibilité de téléphoner gratuitement, et la prise en charge de l’hôtel si le vol de remplacement est prévu pour le lendemain, voire plusieurs jours plus tard.

Si ces obligations n’ont pas été respectées, une fois rentré, vous pourrez demander le remboursement des dépenses que vous avez été obligé de faire pour votre hébergement et la nourriture. Il faudra quand même prouver qu’il y a bien eu un refus de prise en charge du transporteur aérien.

Guest : Comment prouve-t-on qu’il y a refus de prise en charge de la compagnie ? En effet, malgré notre insistance au guichet, jamais nous n’avons pu avoir quoi que ce soit…

Gaëlle Patetta : Cela peut être difficile effectivement de prouver ce refus de prise en charge, surtout si vous n’avez eu aucun interlocuteur. Des attestations d’autres personnes dans la même situation que vous peuvent faire l’affaire. Eventuellement, si vous y avez pensé, un petit film du représentant du professionnel refusant de vous fournir le document peut aussi être efficace. Enfin, regardez sur Internet si d’autres consommateurs n’évoquent pas des refus similaires du même professionnel. Ces témoignages peuvent aussi valoir comme preuves.

Pascal : J’ai été bloqué au Japon la semaine dernière. J’étais parti grâce à une agence de voyage pour un circuit de onze jours. J’ai été obligé de coucher à l’hôtel pendant cinq jours de plus. Puis-je espérer un remboursement, vu que l’hébergement m’a été imposé ?

Gaëlle Patetta : Vous êtes dans le cadre d’un forfait touristique. Le code du tourisme prévoit que le vendeur doit vous prendre en charge sur place jusqu’au moment où il trouve un moyen de vous réacheminer. Si vous n’avez pas été pris en charge et que vous avez dû vous débrouiller seul, vous pouvez demander en rentrant le remboursement de vos dépenses. Il faudra, là aussi, prouver ce refus de prise en charge.

Syl203 : J’ai souscrit une assurance avec mon voyage, ne peut-elle pas intervenir pour me rembourser les frais supplémentaires ?

Gaëlle Patetta : Malheureusement, les assurances annulation voyage ne fonctionnent pas. En revanche, souvent, les consommateurs ont payé leur voyage avec une carte bancaire qui inclut parfois une assurance incident de voyage. Il faut aller vérifier les conditions de cette assurance, car certaines remboursent au consommateur un forfait en cas d’annulation de vol. Il faut par contre prouver les dépenses qui ont été faites.

Guest : Je n’ai pu partir pour une semaine de croisière sur le Nil. Mon voyagiste me propose un bon à valoir dans les six mois mais me contraint à passer par un autre tour opérateur qui propose des voyages différents et plus chers. Peut-on repousser ce délai de six mois et exiger un voyage identique sans compléments financiers ?

Gaëlle Patetta : On peut exiger le remboursement en vertu du code du tourisme. Le mieux est d’évoquer cette possibilité pour obtenir un geste commercial du professionnel, et donc un report avec le même tour opérateur que celui choisi au départ, au même prix. C’est de la négociation. Le professionnel est tenu de par la loi de proposer au consommateur soit la résiliation ou le remboursement, soit le report du voyage. Mais c’est le professionnel qui est libre de fixer les conditions de report et de coût. Mais la décision finale revient au consommateur.

Eskenazi : Les frais de visas peuvent-ils être remboursés par ma compagnie ?

Gaëlle Patetta : Malheureusement, non. Cela entre encore une fois dans le cadre de frais supplémentaires, qui ne peuvent être réclamés au professionnel car on a affaire à un cas de force majeure.

Julie92 : Les professionnels du voyage invoquent, pour ne pas rembourser, l’article L. 211-16. Peuvent-ils le faire si cet article n’est pas présent dans leurs conditions générales et particulières de vente ? De plus, pouvez-vous confirmer que cet article les dispense uniquement de verser une indemnité ?

Gaëlle Patetta : Effectivement, cet article parle de l’exonération de responsabilité des agences de voyage en cas de force majeure. Il n’a cependant rien à voir avec la question de l’exécution du contrat et du remboursement ou de la prise en charge en cas de non-exécution du voyage. L’existence de cet article ne s’oppose donc pas à l’application des autres articles sur lesquels nous nous appuyons pour demander le remboursement ou la prise en charge (L. 211-13 et L. 211-14 du code du tourisme). D’ailleurs, la Commission européenne a confirmé notre analyse juridique dans un communiqué de presse jeudi 22 avril.

Guest : Je suis restée bloquée 4 jours en Crète. Après 4 jours, mon vol étant de nouveau reporté de 2 jours, j’ai dû acheter à une autre compagnie (et beaucoup plus cher) un vol Athènes-Madrid puis Madrid-Paris. J’espère être remboursée du vol non effectué, mais quid de mes vols achetés à prix fort pour rentrer ? Ai-je une chance d’être remboursée ?

Gaëlle Patetta : Vous êtes dans le cadre de l’achat de simples billets d’avion, et le règlement européen qui s’applique ne prévoit pas d’indemnisation supplémentaire au-delà du remboursement du vol annulé. Vous ne pouvez donc pas demander le remboursement du surcoût.