Cette musique est, comme son nom l’indique, pour Egon Schiele. Pour l’artiste ? Non, pour une pièce de théâtre dont il est le sujet. Ainsi, l’on comprend pourquoi figurent des illustrations de ce grand peintre autrichien du XXe siècle. Quatre, dont celle de couverture : Autumn Trees, datant de 1911. Pour le reste, Nude Girl With Folded Arms (Gertrude Schiele), de 1910, Self-Portrait With Chinese Lantern Plant, de 1912, et The Dancer, de 1914.
L’art au service de l’art : la musique pour le théâtre, le théâtre pour le peintre, et la peinture pour la musique, et ainsi de suite…
Après un premier album Handwriting assez éclectique dans ses ambiances tout comme dans ses compositions, Rachel’s se concentre davantage ici autour d’un instrument : celui de Rachel Grimes, à savoir le piano, qui ouvre tout de suite Music For Egon Schiele. Deux autres instruments font leur apparition autour de la pianiste, l’alto de Christian Frederickson et le violoncelle de Wendy Doyle. Toutes les compositions sont l’œuvre de Rachel Grimes, ce qui donne une tonalité assez homogène à l’ensemble, tonalité forcément proche de sa muse du moment, c’est-à-dire celle de l’œuvre très controversée de Schiele (mort à l’âge de vingt-huit ans, trois jours seulement après sa femme enceinte, quelques mois après son compatriote Gustave Klimt).
Douze pièces, pour la majorité d’une durée de trois ou quatre minutes, exception faite de « Promenade » en milieu de parcours (et de la représentation ?) : évidemment, la promenade appelle la tranquillité, donc le temps semble plus éternel, alors que l’ambiance mi-paisible mi-amère se confond avec la mélancolie… Tout cela est assez éloigné du premier album finalement, ne serait-ce que par le nombre d’instruments utilisés (seulement trois, alors que seize musiciens jouaient tel un véritable orchestre sur Handwriting), de même que la pianiste impose davantage à la fois sa plume et sa présence.
Comme sur le premier, toujours, Rachel’s continue à nous plaire avec des citations d’artistes, des œuvres dans l’œuvre, ici celle d’un contemporain et ami du peintre, le compositeur, peintre et théoricien viennois Arnold Schoenberg, dont l’influence sur la musique du XXe siècle fut considérable. Je ne vois pas de meilleur conclusion à ce magnifique album que je vous recommande chaudement et qui vous touchera dès les premières notes.
« One has to realize what restraint it needs to express oneself with such brevity. Every glance can be expanded into a poem, every sigh into a novel. But to express a novel in a single gesture, joy in a single breath : such concentration can only be found where self-pity is lacking in equal measure.
These pieces can only be understood by those who believe that sound can say things which can only be expressed through sound. »