Ces voix sont celles de groupes de gauche et des syndicats dont le discours mondialophobe est figé depuis plus de vingt ans. Comme en 1988, ils jouent les Cassandre et prévoient un déplacement de la production, des pertes d’emplois, une réduction des investissements étrangers, un rétrécissement de l’assiette fiscale, l’érosion de nos programmes sociaux, ainsi que l’abandon forcé de notre souveraineté et des efforts en matière de développement durable. Ils y voient même une atteinte à la démocratie !
Toutefois, en regard des enseignements de l’histoire récente, prétendre que le libre-échange constitue une menace pour notre souveraineté politique ou notre mode vie est non seulement erroné, mais carrément mensonger. Une étude d’économistes de la Banque Royale sur l’impact économique des 20 ans du libre-échange a porté sur les principales critiques et craintes formulées à l’origine. Le bilan est sans équivoque : il n’y a pas eu d’exode de la production, les exportations ont augmenté, les investissements étrangers se sont multipliés, des millions d’emplois ont été créés et les finances du gouvernement fédéral se sont améliorées. Non seulement la libéralisation des échanges n’a compromis ni notre santé économique ni notre liberté politique, mais elle a même contribué à notre prospérité !
Toutefois, les prophètes de malheur font fi des résultats concrets et persistent dans leurs discours alarmistes. Cette fois, disent-ils, il est justifié de s’inquiéter, car, entre autres, l’accord avec l’Union européenne va plus loin que l’ALENA. L’argument est boiteux ! En vérité, si certains groupes se mobilisent contre le libre-échange, ce n’est pas parce qu’ils ont à coeur les intérêts du pays, c’est tout simplement parce qu’ils ont peur de la concurrence. Ils n’ont aucune envie de déployer les efforts nécessaires pour être compétitifs dans une économie ouverte, et usent donc de raisons fallacieuses pour rallier la population à leur xénophobie économique.
Il faut toutefois éviter de tomber dans leur piège. La donne économique mondiale a changé et il est maintenant impératif de renouveler notre vision économique. Autrefois, le fait d’avoir les États-Unis, première puissance économique, comme principal partenaire commercial était rassurant. On savait que notre production trouverait preneur. Mais aujourd’hui, l’économie de l’Oncle Sam va plus mal que jamais. Et vu les décisions prises par Washington et par la Réserve fédérale, il est raisonnable de penser que la descente aux enfers ne fait que commencer, ce qui nuira assurément à nos exportations vers le sud de la frontière. Arriver à un accord de libre-échange avec l’Union européenne ou avec l’Inde n’est pas une dangereuse frivolité, mais bien une nécessité absolue pour favoriser notre croissance économique. Le fait qu’Ottawa y travaille est certainement l’un des plus beaux cadeaux de Noël que la classe politique puisse nous faire.