Le Ministère de l'écologie vient d'ouvrir une consultation publique, sur son site internet, relative au projet de décret relatif aux schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SCAE). Certaines dispositions de ce texte devraient particulièrement retenir l'attention... Un nouveau coup dur ?
Le Schéma régional éolien.
Nous savions d'ores et déjà que le développement de l'éolien terrestre et, particulièrement, des zones de développement de l'éolien, serait séèvrement encadré. Les ZDE ne pourront plus en effet n'être créées qu'à l'intérieur de zones favorables à leur tour définies au sein des schémas régionaux climat, air, énergie.
Le projet de décret soumis à consultation publique prévoit
"IV. - Une annexe au schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie, intitulée « schéma régional éolien », regroupe et détaille les principaux éléments relatifs à la définition des parties du territoire favorables au développement de l'énergie éolienne.
Cette annexe, élaborée dans les mêmes conditions, prévues aux articles R.222-3 et suivants, que le reste du schéma, présente les zones favorables qui résultent de la superposition de la stratégie et des enjeux régionaux analysés sur la base des critères suivants: le potentiel éolien, les espaces naturels y compris les ensembles paysagers, la protection du patrimoine naturel et culturel ainsi que les contraintes techniques et servitudes. L'annexe comporte la liste des communes qui relèvent des zones favorables.
L'annexe peut être illustrée de documents cartographiques indicatifs dans les mêmes conditions qu'au III du présent article. "
La définition de cette liste de commune dont le territoire peut portentiellement accueillir des zones de développement de l'éolien promet une belle foire d'empoigne.
Vers des zones de développement du solaire ? (sans doute)
J'ai déjà évoqué à plusieurs reprises sur ce blog et ailleurs le projet du Gouvernement de créer des zones de développement du solaire, étant entendu que la loi Grenelle 2, au moyen de la procédure du "périmètre déterminé" prévoit déjà la possibilité de zones sans énergie solaire.
Le projet de décret prévoit tout d'abord que le schéma RAE devra procéder d'un rapport, lequel devra notamment comporter :
"7° Une évaluation du potentiel de développement de chaque filière d'énergie renouvelable et de récupération, qu'il s'agisse de production d'électricité, de chaleur ou de carburants. Cette évaluation prend en compte la disponibilité et les usages des ressources, notamment au regard de l'article 31 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement. Elle prend en compte également les exigences techniques et physiques propres à chaque filière, la préservation de l'environnement et notamment des milieux physiques, des espaces naturels ainsi que du patrimoine naturel et culturel"
Le rapport dont procèdera le SRCAE n'a donc pas pour seul but d'identifier les leviers de développement des différentes filières d'énergie renouvelable mais aussi - et peut être surtout - de l'encadrer strictement, pour éviter toute réduction de la consommation d'espace agricole, toute atteinte "à l'environnement et notamment des milieux physiques, des espaces naturels ainsi que du patrimoine naturel et culturel". La liste des critères à prendre en considération pour, in fine, définir le potentiel de développement d'énergies vertes est donc assez longue.
Précisons, à toutes fins utiles, que la version de juin 2010 du projet de décret SRCAE prévoyait que le rapport comporte :
"6° Une évaluation du potentiel de développement de chaque filière d'énergie renouvelable et de récupération. Cette évaluation prend en compte la disponibilité de la ressource, les exigences techniques et physiques propres à chaque filière ainsi que la préservation de l’environnement et du patrimoine culturel"
Force est de constater que la version du projet de décret soumise à consultation publique est sensiblement plus contraignante.
Last but not least, le SRCAE devra également comporter un "document d'orientations", destiné notamment à définir :
"3° des objectifs quantitatifs de développement de la production d'énergie renouvelable, à l'échelle de la région et par zones infrarégionales favorables à ce développement, délimitées, pour chaque filière, de manière cohérente et pertinente à partir des évaluations de potentiel de développement prévu au 1 du présent article. Ces objectifs sont définis, pour l'horizon 2020, en cohérence avec les objectifs nationaux fixés par la directive du Parlement européen et du conseil du 23 avril 2009 et par les programmations pluriannuelles des investissements de production de chaleur et d'électricité prévues respectivement par la loi n°2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique et par la loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité. Ils sont exprimés en puissance installée ou en tonne équivalent pétrole, et sont assortis d'objectifs qualitatifs visant à prendre en compte la préservation de l'environnement et notamment des milieux physiques, des espaces naturels ainsi que du patrimoine naturel et culturel et à limiter les conflits d'usage"
Il convient de retenir :
- que ce sont des objectifs "quantitatifs" de développpement qui seront retenus
- qu'ils pourront l'être à l'échelon de "zones infra régionales"..
- que ces objectifs devront être cohérents, certes avec les objectifs fixés par le droit de l'Union européenne mais aussi avec la PPI. Or, on sait que l'objectif de 5400MW de solaire d'ici à 2020 a tendance à être considéré comme un plafond par le Gouvernement..
- que ces objectifs "quantitatifs" sont assortis d'objectifs "qualititatifs" "visant à prendre en compte la préservation de l'environnement et notamment des milieux physiques, des espaces naturels ainsi que du patrimoine naturel et culturel et à limiter les conflits d'usage"
En défnitive, le projet de SRCAE comporte surtout des dispositions destinées à encadrer, potentiellement de manière assez stricte, le développpement des énergies renouvelables. Par ailleurs, à la suite de ces dispositions, nous nous orientons sans doute vers la création de zones de développement du solaire qui ne seront peut être pas définis, à l'instar de l'éolien, par un trait sur une carte, mais par une série de critères destinés à identifier les zones favorables ou non au solaire au sol ou en toiture.
Enfin, il convient de s'étonner que les personnes consultées sur internet n'aient pas été rendues destinataires des mêmes documents que ceux diffusés, notamment aux régions, en juin dernier.
Elles auraient ainsi pu prendre connaissance d'un document fort intéressant intitulé "Lignes directrices pour l’établissement d’un cahier des charges sur l’évaluation du potentiel de développement de la filière solaire (photovoltaïque et solaire thermique". Le plus intéressant se trouve en annexe de ce document qui présente toutes les caractéristiques d'une liste de critères de définition de zones de développement du solaire.
Tout ceci participe d'une complexification du droit et de cette campagne actuelle qui consiste à mettre l'accent sur les risques environnementaux éventuels des énergies renouvelables plutôt que sur leurs mérites.