La stratégie ne peut se passer, aujourd'hui, de l'information. Le maniement de l'information devient dès lors une arme. Car autant autrefois il s'agissait de s'adresser uniquement à l'adversaire dans ce dialogue particulier qu'est la guerre, autant il s'agit désormais de "prendre en compte" un autre acteur : l'opinion publique.
Il n'y a là rien de vraiment nouveau pour le lecteur de Clausewitz. Le peuple n'est-il pas le troisième homme de la merveilleuse triade ? et si on s'interroge souvent sur les rapports entre le stratège et le politique, si on s'interroge parfois sur les rapports entre le politique et le peuple, on évoque très rarement les rapports entre le stratège et le peuple.
C'est désormais indispensable : il ne s'agit plus seulement des officiers de presse d'autrefois, mais d'une dimension particulière, un milieu distinct des milieux connus (terre, air, mer, spatial, ...). La stratégie s'y développe donc. Là encore, il faut distinguer deux types de stratégie : la stratégie civile, celle de "comm", professionnelle. Et la stratégie militaire qui s'y ajoute. Les deux portent le même nom, et pourtant elles sont distinctes. C'est ce qu'oublient souvent les plus brillants chefs militaires, qui ne croient voir que la stratégie de comm, sans comprendre qu'il y a aussi une stratégie militaire à avoir. Qu'il faut la penser et qu'elle mobilise les ressources de leur esprit. Et que le grand stratège, dans les conflits modernes, ne s'occupe pas seulement de tactique, mais aussi des appuis, de la log, de l'environnement civil, et de la communication. Qui n'est pas une affaire de bateleur qui vont s'agiter devant les journalistes pour se faire voir, mais les instruments du combat, à qui on demande des "effets à obtenir".
L'article ci-dessous, écrit par Jean-Luc Cotard, un colonel parti dans le civil, est paru récemment dans la revue "Inflexions" (voir ici). Il vaut le détour en ce qu'il illustre parfaitement cette distinction entre les deux stratégies. Merci à lui.
O. Kempf
De la difficulté de communiquer sur la communication des opérations militaires par Jean-Luc Cotard
Parler d’opinion publique dans une revue inspirée par l’armée de terre conduit naturellement à se demander comment le ministère de la Défense aborde ses relations avec elle. Inflexions aurait pu demander à un historien d’aborder le sujet en étudiant l’importance de l’opinion publique dans le déroulement d’opérations passées telles que celles d’Indochine ou d’Algérie, en insistant peut-être sur l’importance que les militaires attachent au soutien de leurs concitoyens. Elle a préféré demander à la Délégation à l’information et à la communication de la défense (DICoD) d’aborder le sujet en étudiant un cas concret qui permettrait de mettre en évidence le travail de pédagogie du ministère au profit de l’opinion publique.
L’article signé par le colonel Klotz, chef du département Stratégie de la DICoD présente un grand intérêt. Il traite un sujet ardu, celui de la communication qui cherche à obtenir le soutien de l’opinion publique sur les opérations, et plus particulièrement sur les opérations menées en Afghanistan. Ardu, le sujet l’est en raison de la difficulté à décrire des actions qui subissent des effets perturbateurs fréquents et imprévisibles. Nous approchons d’un domaine dans lequel la science n’est pas exacte. Ardu, il l’est aussi parce qu’il cherche à décrire des actions en cours et que l’auteur ne peut tout dire sans aller à l’encontre de l’objectif recherché.
Partant d’une comparaison entre la perception que les Français avaient de l’engagement des troupes françaises en 2001 et celle qui prévaut après l’embuscade d’Uzbeen, à l’été 2008, il montre comment le ministère de la Défense cherche à améliorer la compréhension de l’opinion publique française sur le sujet afin de fournir un soutien stable à l’intervention militaire lointaine, tant du point de vue de la géographie que de celui des préoccupations quotidiennes. Donc en fonction des attentes, les communicants de la Défense cherchent à satisfaire leurs concitoyens en terme d’information, de témoignages. La stratégie retenue est à la fois indirecte, passant par les élus qui pourront mieux comprendre les enjeux des débats sur le sujet, mais qui pourront aussi expliquer à leurs électeurs le pourquoi de l’engagement français si loin des frontières, et plus directe avec l’organisation de voyages de presse ou la mise à disposition d’images. Elle est décrite comme volontairement proactive. L’objectif et de faire comprendre « pourquoi la France s’engage » mais aussi comment. Il s’agit ainsi de « contrer l’élan de l’insurrection et le discours des extrémistes par l’accroissement de la production média apportant les preuves des progrès accomplis ». Le colonel Klotz peut alors détailler les outils de communication et de travail mis en place dans cette perspective.
Alors en quoi cet article est-il intéressant ? Il serait trop facile de dire qu’il fleure bon l’autosatisfaction, voire la langue de bois, que l’auteur est trop timide dans l’analyse du travail de son service. L’exercice est au contraire très riche dans la mesure où, en creux, sans critique aucune, le colonel Klotz fait ressortir, peut-être involontairement, toute la difficulté à parler d’une opération de communication en cours. Il évite de mettre en avant les écueils rencontrés, de critiquer ses prédécesseurs, de porter des attaques à l’égard d’acteurs, militaires ou civils, de cette communication qualifiée de globale, qui n’auraient pas rempli leur rôle. Il est en revanche possible de relire le texte en mettant en exergue quelques non dits ou des manques de précision, puis en analysant la stratégie de communication telle qu’elle est présentée.
Les non dits et les imprécisions
Cet article est très court, trop court certainement. Forcément non-dits et imprécisions apparaissent rapidement. Il convient en premier lieu d’aborder la contradiction entre le titre, qui parle d’un exemple de communication proactive, et le contexte brossé en introduction. Ce dernier montre que le ministère de la Défense réagit à la rupture de perception que fait naître l’embuscade d’Uzbeen. Il apparaît clairement que ce n’est qu’en réaction que la DICoD établit une stratégie de communication. La description et l’énumération d’actions suffisamment novatrices pour qu’elles fassent l’objet d’une satisfaction telle que cette dernière mérite d’être rendue publique, ne peut aller contre cette analyse.
Cette rupture est celle de l’image que les Français avaient de leur armée. La guerre en ex-Yougoslavie, et même les conflits en Afrique, avaient donné aux Français l’idée qu’un soldat de la paix ne combat pas, et donc ne peut mourir dans une action guerrière. Le danger avait été depuis longtemps perçu dans l’armée de terre qui, depuis les événements de Bouaké en 2004, avait infléchi son discours général sur le sujet, notamment au cours de ses campagnes de recrutement. Mais le grand public n’avait pas encore visiblement cette perception. Brusquement les soldats en Afghanistan, leur équipement, voire la politique menée par la France dans ce pays lointain font la une des journaux. Le colonel Klotz parle même d’une « vague de critiques » qui « génère une baisse supplémentaire de l’adhésion des Français à cette opération ». Cette rupture d’image est évoquée comme point de départ de la « communication institutionnelle proactive », mais l’auteur ne s’appesantit pas dessus. L’inquiétude des autorités de l’armée de terre après Bouaké montrait pourtant que cette rupture pouvait était une crainte. Pouvait-on l’éviter ? Peut-on facilement éviter ce que l’on prévoit dans ce domaine ? Sans trop entrer dans le détail, le colonel Klotz aurait peut-être pu évoquer la question.
De façon générale, insister sur le fait qu’à partir des événements d’Uzbeen, la DICoD a mené des actions pour faire comprendre aux Français le rôle de leur pays en Afghanistan, ne reviendrait-il pas à dire que rien n’avait été fait auparavant ? Il manque par ailleurs quelques éléments chiffrés pour expliquer les conséquences de cette rupture, que ce soit en termes de recrutement ou autre. Pourquoi déclare-t-il : « A ce jour, la courbe de l’opinion n’est pas remontée. Elle est toutefois stabilisée » ? Depuis quand est-elle stabilisée ? L’action menée depuis donne-t-elle effectivement satisfaction ? Ceci est d’autant plus dommage que la DICoD possède, de façon autonome mais aussi en liaison avec le service d’information du gouvernement (SIG), de suffisamment d’outils pour donner des tendances.
Implicitement, le colonel Klotz explique aussi que nombreux sont les interlocuteurs, hommes politiques ou journalistes, qui ne connaissent pas les contraintes du métier de soldat et plus particulièrement celle du combat qui n’est en rien une science exacte . S’il cherche selon ses termes à « informer plutôt qu’à séduire », peut-être devrait-il employer les termes de former plutôt que celui d’informer. Car dans ce cas nous ne sommes plus dans le problème particulier de la communication sur les actions menées par la France en Afghanistan, mais bien dans celui plus vaste de formation des élites et des journalistes sur la chose militaire. En revanche, il est intéressant de noter que l’article parle d’une multiplication des reportages sur le terrain, alors que certains journalistes spécialisés se plaignent de restrictions depuis l’enlèvement de deux journalistes de France 3 .
En lisant ce texte, il est possible de voir qu’incidemment l’opinion publique, qui est l’objet du numéro d’Inflexions et dont le début de l’article semble se préoccuper, se transforme en leaders d’opinion, journalistes ou hommes politiques. Ce glissement, qui n’est pas surprenant en soi, se retrouve aussi dans les propos très légitimes d’Hervé Morin, ministre de la Défense, lorsque ce dernier déclare à l’Assemblée nationale en septembre 2008 : « Nos soldats ont besoin de sentir la nation derrière eux. À travers ce débat avec vote du Parlement, tous les Français seront informés sur la nécessité de notre engagement militaire en Afghanistan, où se joue en partie notre propre sécurité . » Pour convaincre les Français, il faut passer par la représentation nationale et les journalistes. Cela suffit-il ? En province, les élus qui ont été choisis par leurs pairs pour être « correspondant défense » reçoivent des documents de la DICoD. Ils assistent parfois à des réunions au cours desquelles ils peuvent entendre le témoignage de « vétérans » . Cela suffit-il pour qu’ils diffusent l’information en leur possession ?
Dès lors que se pose la question de savoir qui il faut effectivement informer, se pose celle de l’organisation et de la stratégie de communication.
L’élaboration de la communication
Le premier titre de paragraphe affiche la stratégie. Elle est globale pour toucher l’opinion publique. Mais les explications sont confuses. La globalité semble dans un premier temps se résumer à une action d’ampleur du ministère : « C’est une opération lointaine qui nécessite une communication globale de la part du ministère. » Est-ce la géographie qui impose la stratégie globale ou bien les enjeux ? Sur quels plans ceux-ci se situent-ils ? Au plan politique ou au plan militaire ? Au plan politique, on pourrait voir un désaveu de l’action menée par le président de la République et de son gouvernement ; au plan militaire, une perte de soutien de l’opinion publique à l’opération. Certes l’« adversaire (…) cherche (…) à affaiblir l’adhésion des Français à l’engagement des armées. (…) Il n’y a pas de soutien stable à une intervention militaire qui ne s’appuie sur une bonne compréhension par l’opinion publique ». Mais l’enjeu est bien la crédibilité de l’action de la France en Afghanistan, et cette action ne se résume pas à la seule présence militaire. C’est pour cela qu’elle doit être globale. Les explications données le sont de façon claire.
Mais la notion de globalité pose un autre problème. Cette globalité de la communication est-elle nécessaire seulement pour le cas de l’Afghanistan, ou bien doit-elle être mise aussi en relation avec la communication des autres théâtres ? Pour le seul aspect militaire des choses, le fait que la rupture de perception de l’action des soldats français ait eu lieu dans à propos de ce pays ne préjuge pas d’une extension du problème à d’autres théâtres. Quid alors de l’image des armées ? Quid des conséquences en terme de recrutement d’efficacité… ? Il est dommage que l’article ne donne pas quelques pistes de réflexion sur ce sujet.
Le lecteur comprend que la globalité des enjeux dépasse largement les seuls intérêts du ministère de la Défense et que ce dernier s’associe au ministère des Affaires étrangères pour rendre cohérent le discours des autorités qu’elles soient politiques ou administratives, civiles ou militaires. Incidemment, on le lecteur se demande pourquoi ce travail interministériel apparaît novateur. Par ailleurs réduire le travail interministériel à deux départements n’est-il pas source de problèmes ultérieurs ? Quel est le rôle du SIG dans le dispositif ? Comment se règlent les éventuels litiges, en termes de communication, entre les deux ministères ? Peut-être aurait-il été intéressant d’avoir sur cette action le point de vue du Quai d’Orsay. A moins que la prise de parole de la DICoD sur le sujet dans la revue Inflexions ne montre qui est la véritable tête du binôme. Peut-être n’est-il pas bon de le souligner.
De la même façon comment, au sein du ministère de la Défense, la communication sur ce sujet s’organise-t-elle ? Existe-t-il une répartition des rôles particulière? Quelle est la part de la cellule communication de l’état-major des armées (EMA Com), des services d’information et de relations publiques de chacune des armées (SIRPA) alors que l’on parle d’opérations. Mais parler de globalité de la communication, c’est aussi faire en sorte que les messages soient relayés en dehors du périmètre tracé par le périphérique. Rien de tout cela n’est expliqué dans l’article. Le travail de relais en province des messages élaborés à Paris est une tâche ardue étant donnés les centres d’intérêt locaux. Inversement, l’excellent travail des documentaristes régionaux n’est pas toujours repris au plan national . Tout cela n’est pas évoqué, peut-être en raison des discussions qui ont lieu en ce moment pour savoir comment organiser la structure de communication future sera organisée. La globalité veut dire que l’on cherche à convaincre tous les publics. Les leaders d’opinion, mais aussi les acteurs et les observateurs étrangers dont les analyses pourront peut-être être reprises par nos propres journalistes. C’est en cela qu’il est possible de caractériser la stratégie définie comme indirecte.
L’objectif est la compréhension de l’action en Afghanistan par l’opinion publique. C’est pour cela que les acteurs militaires sur le théâtre doivent être convaincus des buts à atteindre en matière de communication. Ce n’est pas un hasard si Terre information magazine, par exemple, décide de préparer une rubrique livres spécial Afghanistan dès avril 2010. Nous touchons ici l’importance du principe de cohérence, essentiel à toute action de communication laquelle ne peut se contenter de vivre pour elle-même.
Il est dommage que l’idée de globalité ne soit pas mieux expliquée dans l’article. Elle donne plutôt l’impression, telle qu’elle est présentée, d’une juxtaposition d’actions qui partent dans tous les sens, ce qui est à l’opposé de ce que sait faire la DICoD quand on la pour qui la connaît de l’intérieur.
Après la notion de globalité, celle de pro-activité est avancée pour montrer en quoi la démarche présentée est novatrice. La contradiction évoquée plus haut sur le sujet ne doit pas être oubliée. Malheureusement, pour qui a l’habitude du travail des communicants en opération ou en métropole, il n’y a rien de nouveau en ce domaine. Alors pourquoi mettre en exergue ce mot ? Par effet de mode, ou parce qu’il faut se convaincre qu’on ne subit pas ?
Après le style et le périmètre d’action, il convient de parler des objectifs à atteindre. En fait, ceux-ci sont d’abord esquissés en introduction puis clairement affirmés presque en fin d’article : il faut faire comprendre « pourquoi la France s’engage » mais aussi « contrer l’élan de l’insurrection et le discours des extrémistes ». Néanmoins apparaît comme une sorte de frustration : aucune échéance, aucune étape intermédiaire ou critère de réussite n’est évoqué. La stabilisation de la courbe de l’opinion dont les caractéristiques n’ont pas été explicitées en fait-elle partie ? Mais l’auteur peut-il vraiment faire autrement ? Fournir ces éléments serait donner à un adversaire politique ou à un ennemi les moyens de choisir à moindre frais, les points d’application de son effort.
Un bon tiers de l’article est enfin consacré à la description d’une plaquette qui synthétise le discours et permet de définir un peu plus précisément les « cibles » de la communication globale. Cependant, à insister sur cet objet, l’auteur donne l’impression que le moyen est plus important que la fin. Au point de donner l’impression que sa réalisation a présenté des difficultés de coordination avec les Affaires étrangères. L’accueil favorable qui lui a été réservé par la suite est considéré comme une victoire. Cela en dit long sur la facilité du travail interministériel ! Mais il ne faudrait pas que le travail de la DICoD puisse être simplement perçu comme celui de rédacteur de plaquettes, quelque soit la valeur ajoutée de ces documents. Il est vrai qu’il existait un réel besoin de supports de référence. Qu’on le veuille ou non, les outils de bureautique contemporains ne facilitent pas toujours la recherche d’information lorsque l’on doit préparer une entrevue avec des autorités étrangères ou non. L’argumentaire régulièrement mis à jour et diffusé par messagerie permet, cependant, une grande souplesse et une grande réactivité. Il est moins facilement frappé d’obsolescence qu’une plaquette. En revanche, la réduction la contribution communication de la France aux besoins croissants de l’OTAN en la matière à cette seule plaquette surprend… afflige.
En fait, le lecteur de l’article apprend fort peu de chose sur les mécanismes intellectuels qui ont permis de travailler sur une stratégie de communication adaptée à la situation afghane. Tout au plus, comprend-il que le travail commence avec des sondages et qu’il se poursuit, de façon très classique, par une étude des besoins des publics à convaincre. Il est aussi possible de mettre en exergue de nouveaux outils avec l’accroissement de l’emploi d’équipe images de la Défense qui mettent à disposition des journalistes, mais aussi des sites internet du ministère, de courts reportages. Cet emploi n’est pas nouveau puisqu’il a été utilisé en 2006 en Côte d’Ivoire et en 2008 au Kosovo. L’intérêt n’est pas toujours l’information immédiate, mais un témoignage sur les méthodes de travail des unités à un instant donné. L’intention est alors de fournir si besoin des illustrations pour des reportages ultérieurs, voire même des preuves qui ne seront, de toute façon, jamais meilleures que celles produites par des tiers. Nous abordons alors le principe de la continuité de l’action de communication.
Malgré tout ses efforts, le colonel Klotz n’arrive pas à expliquer de façon convaincante pourquoi la stratégie de communication adoptée est bien constitutive de l’information et pas du tout de la propagande dont les armées sont régulièrement accusées. Pourtant, tous les éléments se trouvent dans l’article. En effet, les efforts dans les actions classiques d’information quels que soient les publics, l’effort d’information dans la durée, malgré tous les accidents qui peuvent se produire, malgré les récriminations des uns et des autres , donnent une cohérence certaine au travail de la France en Afghanistan. Tous les outils y contribuent, en plus de l’action des Français sur le théâtre. Car rien ne serait pire qu’une communication disant l’inverse de ce qu’il est possible d’observer sur le terrain.
Qu’on le veuille ou non, qu’on le regrette ou non, le colonel Klotz ne pouvait pas et ne devait pas tout dire de la stratégie de communication adoptée sur la proposition de son service, qu’il s’agisse de la réflexion ou des méthodes de travail. Mais après tout, malgré les critiques formulées plus haut, il fait parler de la communication sur l’Afghanistan et de l’art de la communication en général. Il martèle ses messages en décrivant la plaquette. Il essaie d’éviter les plaintes et les jérémiades, mais, ce faisant, par ellipse, les met involontairement en valeur quelques difficultés. Il faut reconnaître que les conditions pour rédiger cet article n’étaient pas les meilleures pour l’auteur.
D’une façon générale, il est très difficile pour un communicant d’expliquer ce qu’il fait. Il apprend en effet très tôt que tout le monde pense forcément savoir communiquer et que tout le monde a forcément d’excellentes idées sur ce qu’il conviendrait de faire . Celles-ci sont d’ailleurs d’autant plus nombreuses que les personnes qui les émettent n’ont pas la responsabilité de la communication ou de la stratégie dont elle découle logiquement. Enfin, il sait que commencer à expliquer ce que l’on fait, c’est déjà s’exposer ou faire apparaître des éléments d’organisation, des objectifs ou des modes d’action qu’il n’aimerait guère, lui ou ses supérieurs, voir commenter pour cause d’« opération» en cours. Pour un communicant, surtout de la Défense, la transparence à tout prix est un piège dans lequel il convient d’éviter de tomber. C’est peut-être ce qui a retenu le colonel Klotz. La clarté du discours, la véracité des faits, la cohérence des actions de communication avec celle des opérations conjuguée avec l’effort sur la durée, c’est-à-dire la continuité permettent d’avoir une efficacité certaine. D’une manière générale, ces qualités peuvent caractériser la stratégie de communication du ministère et de l’État sur l’Afghanistan. Elles auraient pu être utilement présentées dans l’article que nous avons étudié. Mais l’exercice est, malgré tout suffisamment réussi pour permettre de mettre en valeur le changement définitif (?) de dimension de la communication autour des opérations. __ J.-L. Cotard__