Réforme de la législation électorale : L’UMP est plus indulgente pour les élus fraudeurs que pour les citoyens ordinaires
Les députés ont examiné lundi trois textes qui réforment la législation sur le financement des campagnes électorales pour les élections législatives, le régime d’inéligibilités et d’incompatibilités des parlementaires. Une évolution bienvenue, mais que des députés UMP- emmenés par Jean-François Copé et Christian Jacob- ont décidé de limiter.
Il s’agit de deux projets de loi et d’une proposition de loi UMP. La législation électorale est réformée sur bien des points. L’âge d’éligibilité est abaissé de 23 à 18 ans (rejoignant la position exprimée par les députés SRC dans une de leurs propositions de loi (lire).
La liste des inéligibilités est complétée, et étendue notamment aux présidents des conseils de prud’hommes ainsi qu’aux cadres dirigeants des métropoles. Une disposition permettra désormais au juge de relever, dès lors que la bonne foi est établie, l’inéligibilité d’un député dont le compte de campagne a été rejeté. Enfin, la dernière partie de cette nouvelle législation touche au régime électoral des futurs députés des Français de l’étranger : conditions pour être électeur, propagande électorale, modalités de vote, déroulement du scrutin.
Lors de l’examen en commission des Lois, un amendement a été adopté, qui crée pour les députés une sanction pénale en cas de déclaration de patrimoine mensongère ou incomplète. Un autre amendement propose de réduire, pour les ministres qui conservent un mandat local, le montant total de leurs rémunérations cumulées. Les députés SRC veulent aller plus loin en matière de transparence financière de la vie politique. Ils défendront en séance des amendements pour limiter à 7500 euros le montant cumulé de dons de personnes physiques à un ou plusieurs partis politiques, ce qui empêcherait de contourner la législation en vigueur avec les « micros-partis ».
Ces évolutions sont bienvenues. En toute cohérence, les députés socialistes étaient a priori favorables à ces textes puisque plusieurs des dispositions figuraient dans leurs propositions de loi que la majorité avait pourtant rejetées il y a quelques mois… Or, plusieurs députés UMP, emmenés par le président de l’UMP et son successeur au groupe parlementaire ont brisé ce compromis en présentant par surprise une série d’amendements qui supprime une nouvelle disposition primordiale (la déclaration patrimoniale effectuée par les élus au début de leur mandat peut faire l’objet de sanction en cas de mensonge ou d’omission ). Ce revirement est insoutenable et pose question. Pourquoi le président du parti majoritaire a-t-il pris cette initiative contre l’avis du président et du rapporteur de la commission, eux-mêmes UMP ? S’agit-il d’un réflexe corporatiste ou de convenances personnelles ? Quelles que soient les motivations de leurs auteurs, ces amendements ne font qu’alimenter les mauvais procès d’intention qui pèsent sur les élus.
Grâce à l’opposition de la gauche et de quelques députés de la majorité, l'UMP a été contrainte de retirer le scandaleux amendement Copé/Jacob qui amnistiait par anticipation les élus coupables d’avoir fraudé sciemment sur leur déclaration de patrimoine. Après un débat de haute lutte, l’incrimination pénale votée à l’unanimité en commission des lois a finalement été maintenue. Mais dans sa hâte à sortir du guépier dans laquelle l’a fourrée son président Jean-François Copé, l’UMP a troqué une indulgence pour une autre. En supprimant toute peine d’emprisonnement pour ce délit, elle a placé les élus au dessus de la loi commune. Pour un citoyen ordinaire, un vol est passible de 3 ans de prison, une escroquerie de 5 ans. Mais quand un élu sera pris en flagrant délit de fraude ou d’escroquerie dans sa déclaration de patrimoine, il n’encourera que 30 000 euros d’amende.
Parce que nous considérons que l’exemplarité d’un élu ne se marchande pas, nous avons voté contre ce nouvel amendement et demandé le rétablissement intégral de la disposition votée à l’unanimité en commission. La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège soit qu’elle punisse.
Pour rappel
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Notre proposition de loi pour une République décente (rejetée en octobre 2010) - lire
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Notre proposition de loi visant à renforcer les exigences de transparence financière de la vie politique (rejetée en octobre 2010) - lire
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Notre proposition de loi visant à abaisser l’âge d’éligibilité à dix-huit ans pour les mandats de Président de la République - lire