On rappellera que l’une des principales conséquences du blocage des négociations commerciales internationales est l’affaiblissement du pouvoir régulateur de l’OMC erga omnes et ex ante. Le système du libre-échange est en panne et la régulation des échanges commerciaux qui aurait dû aller de pair avec la régulation des finances n’a pas eu lieu.
A défaut d’une régulation internationale, les initiatives sont prises au niveau national et les marchés se tendent sous l’effet de dévaluations monétaires et de mesures protectionnistes. La loi du plus fort resurgit et le pouvoir régulateur de l’OMC n’intervient plus que dans sa forme ex post quand son rôle d’arbitre est réclamé pour régler un différend. La décision de l’OMC de valider les taxes américaines sur les importations chinoises de pneus marque un tournant dans la philosophie qui sous-tend l’organisation ; l’OMC semble donner son blanc-seing aux mesures visant la protection des marchés intérieurs. Faut-il y voir un aveu d’impuissance et une délégation de pouvoir normatif à ses membres ?
Dans ce contexte, l’annonce de Christine Lagarde doit être applaudie des deux mains. L’une des plus grandes naïvetés de l’Union européenne est de croire que la vertu est contagieuse en période de crise et de doutes vis-à-vis de la « machine commerciale ».
Si l’Union européenne veut faire preuve de réciprocité dans les échanges, elle ne doit pas fuir les rapports de force. Un Buy European Act se ferait l’écho du Buy American Act et de diverses initiatives chinoises pour privilégier les produits domestiques. Face à une Chine qui ne fait plus du protectionnisme un modèle transitoire de développement mais une philosophie commerciale, il est temps de développer un patriotisme économique européen et de prendre les partenaires commerciaux de l’Union à leur propre jeu.
Les grandes entreprises sont souvent bercées d’illusions quand il s’agit du marché chinois. Elles sont tentées d’abandonner leurs sous-traitants européens en contrepartie de promesses de parts de marché qui se réduisent souvent à une peau de chagrin. Il est temps d’inventer une solidarité entre entreprises européennes pour éviter que des niches technologiques n’échappent aux européens. Il est temps également de responsabiliser le consommateur vis-à-vis de son pouvoir d’achat. Car finalement, il faut le marteler pour convaincre, le monde n’est plus bipolaire et il appartient à l’Union européenne de régler de manière adéquate le curseur entre libre-échange et protectionnisme.
Il est maintenant temps de promouvoir ce Buy European Act auprès des partenaires commerciaux de la France…