Aujourd’hui, je vous propose un petit tour d’horizon des nouvelles locales des belles régions de France, puis une mise en perspective sur la palpitante activité de nos frétillants députés qui nous mitonnent, tous les jours, d’amusantes recettes législatives que nous devons ensuite nous enfiler comme purgatif.
Et rien de tel que commencer par des régions verdoyantes où il fait bon vivre et profiter du temps qui passe au rythme paresseux de saisons bien marquées, comme par exemple, la Lorraine, où en hiver, et pour bien marquer sa différence avec la région parisienne, il fait doux en été et il neige en hiver.
Cette histoire de neige en hiver, ça va finir par devenir un grand classique du comique saisonnier : même si personne n’y croit vraiment, comme le Père Noël, ça n’empêche pas de trouver ça suffisamment pittoresque pour l’évoquer.
A Metz, comme dans toutes les villes, on construit des trucs, des machins et des bidules à grand-frais pour satisfaire la gloriole d’un maire ou l’autre, qu’on fera payer sur plusieurs décennies à de guillerets contribuables, heureux de disposer d’un nouveau truc, machin ou bidule authentiquement régional.
L’aspect guilleret s’émousse rapidement, cependant, lorsque la neige de saison s’accumule et fait rien qu’à tout péter le toit design en Teflon du centre Pompidou-Metz. Normalement, les « architectes » (guillemets de rigueur) ont tout prévu, y compris la neige : ils ont fait installer un réseau de fils électriques chauffant dans ce fameux toit, histoire de faire dégeler la poudreuse lorsqu’elle tomberait dessus. Et bien sûr, le système n’a pas fonctionné.
Ce petit aspect Construction Polonaise circa 1984 ne doit rien au hasard : le pays, tant au niveau de Paris qu’au niveau de ses régions, se dirige droit vers le paradis communistes que tant d’occidentaux de l’Ouest se bousculaient pour rejoindre (à tel point que, rappelez-vous, il fallut construire un mur).
Quelques explications en image ; là, c’est quand tout va bien :
Et ici, quand il y a de la neige en plus non prévue dans une région où il neige pas mal d’habitude :
Notez la différence entre l’image 1 et l’image 2 : plusieurs millions d’euros sont partis en fumée.
Mais ne nous arrêtons pas là et continuons notre petit tour, en nous arrêtant dans la Vienne, du côté de Saint-Germain, où la discothèque Le Macumba Le Coïmbra a eu l’idée lumineuse d’organiser un ramassage en car de ses clients avant la soirée et un retour pour ces derniers suivant le même principe en fin de soirée.
L’avantage est évident : bourrés ou non, les joyeux clients consommateurs ne s’emplafonneront pas sur les routes. C’est tout bénéfice : le patron de la discothèque peut ainsi dormir tranquille puisque sa clientèle ne va pas dépérir sur les routes de la Vienne. La sécurité sociale n’aura pas à s’occuper de paralysés à vie. L’état n’aura pas à dépêcher des agents de la DDE pour nettoyer la chaussée des petits fragments d’os et de muscles divers qu’ils auraient laissés suite aux dix-huit tonneaux de leur 206 lancée à pleine vitesse sur une nationale sinueuse.
Ce service de car est donc gagnant – gagnant, comme on dit chez les néolibéraux qui tradent des CDS français au prix de ceux du Panama.
Eh bien non. C’est traymal, notamment de demander à ses clients de payer la somme rocambolesque de 3€ pour ce service. Moyennant quelques contrôles de la direction régionale de l’environnement et de l’aménagement du territoire, puis, certainement plus tard, de l’URSSaf, du Fisc, de l’inspection du travail, et de je ne sais quoi d’autre, ce patron sans scrupules sera proprement étrillé.
Il était temps ! Un peu plus, et son système s’étendait à toute la France !
Ce serait comme faire correctement son travail dans un aéroport qui n’est pas sous la neige alors que le reste du pays est paralysé : parfaitement scandaleux ! On commence comme ça, et bientôt, tout le monde essaie de faire au mieux pour que les clients rentrent chez eux vivants, que les passagers voyagent, les consommateurs soient contents et les entreprises fleurissent.
Impensable. Il faut donc, régulièrement, une bonne petite grève histoire de flanquer par terre toute velléité de tentative dynamique. Et comme les syndicats sont compréhensifs et pas du tout mafieux, on obtiendra rapidement gain de cause et tout repartira comme en 40, chansons incluses.
…
Pendant ce temps, à Paris, nos députés ne chôment pas. Si les régions s’amusent et rigolent généreusement de ce rire clair car leur joie et leur bonne humeur ont su garder haut les couleurs d’une France accueillante et joyeuse, à Paris, ça bosse, ça met les bouchées doubles, ça turbine fermement à l’édification musclée d’un monde meilleur, à coup de tatanes dans la gueule s’il le faut.
Et pour arriver à ce monde meilleur, il ne faudra pas y aller par quatre chemins. Dans un premier temps, on pourra par exemple exonérer de poursuite les députés qui bidouillent un tantinet leur déclaration de patrimoine. Eh oui : pendant que Copé, l’un de ces politiciens qui inspirent pourtant naturellement confiance, est allé se dorer les fesses à Cuba et, très probablement, serrer la paluche à Fidel, un grand ami de la démocratie et de la France, Christian Jacob a tenté de s’opposer en loucedé à un texte visant à plus de transparence financière pour les parlementaires.
Manque de pot, ça s’est vu. Gageons que cette petite manip tout à fait honorable n’est qu’un malencontreux malentendu comme il en arrive parfois dans les meilleures familles. Mais j’encourage néanmoins mes lecteurs, dans le respect démocratique et la citoyenneté festive et nécessaire à l’édification de cette société meilleure à laquelle nos députés travaillent, à glisser dans l’urne, à la prochaine élection, un petit bulletin « Bande D’Enculés » que Demaerd Industries se fera un plaisir de fournir à qui le demandera.
Parce que si certains ont effectivement tiqué devant cette péripétie parlementaire, bien peu ont fait les efforts nécessaires pour s’opposer à l’inique loi LOPPSI2 qui, elle, a été votée dans la plus parfaite décontraction.
Rappelons que cette loi donne enfin à la France un système légal permettant d’entrer de plain-pied dans une bonne dictature soft, avec contrôle poussé des informations sur les médias numériques, possibilité de censure sans passage par une autorité judiciaire, camouflage de sites pédopornographiques en lieu et place d’une poursuite des détenteurs de contenus, etc…
Ce qu’il y a de symptomatique dans cette magnifique loi, c’est qu’à présent, les députés savent qu’on leur a totalement lâché la bride et ils peuvent donc partir totalement en vrille : quand il n’y a plus de limites aux bornes, on obtient donc de grands moments de bravoure législative.
Actuellement, c’est Henri Emmanuelli, le repris de justice (un ex-camarade de cellule de Juppé, je présume), qui claque les élastiques, détend ses bretelles et nous propose un petit bouquet hivernal de tuyauterie juridico-léglistativo-embarrassante visant essentiellement à – je cite – « limiter la spéculation et contribuer ainsi à mettre fin à l’économie de casino et au désordre financier international« .
Le tout, en 34 éléments (pas un de plus, pas un de moins) packagés sous une forme pratique à placer, déplacer et emmener partout en voyage, avec une petite poignée ici et un ensemble de coloris adaptés à la saison (existe aussi en version été).
En gros, on retrouve des choses déjà évoquées maintes fois, pas toutes idiotes, mais toutes délicieusement frappées du syndrome d’agitation médiatique, syndrome auxquels nos politiciens sont de plus en plus sujets, et qui les oblige à s’agiter compulsivement devant les caméras et les gros micros mous pour montrer qu’ils existent, sans modifier d’un iota la situation existante.
Ah oui, au fait, l’année prochaine, le déficit — qui va réduire à fond les ballons, d’après Lagarde & Baroin, les mousquetaires du budget — n’empêchera pas la France d’emprunter 184 milliards d’euros. Bah oui, c’est de l’argent gratuit pour acheter des balles de golf : pourquoi se gêner ?
Devant un festival pareil, on est en droit de se poser une question : Tout ceci tiendra-t-il encore six mois ?