Quelle honte, quelle injustice !!!
Nous sommes vraiment tombés bien bas. Alors que nous sommes inondés de merdes cinématographiques d’un bout à
l’autre de l’année dans nos salles obscures, il arrive parfois qu’un véritable joyau du 7ème art atterrisse directement en vidéo.
C’est le sort réservé à "Moon" de Duncan Jones que j’ai eu la chance, que dis-je, le privilège de voir avant-hier. Un vrai bonheur de cinéphile, et surtout une rage contre
un système qui prime le futile et condamne le sensé.
Sam Bell (Sam Rockwell) a un contrat de
travail de trois ans sur la lune. Son labeur consiste à extraire de l’Hélium 3 vital à la consommation énergétique terrestre. Il partage sa vie avec une unité androïde appelée GERTY qui l’assiste
techniquement et qui répond au moindre des besoins de l'unique résident lunaire.
Sa mission touche à sa fin. Dans trois semaines il pourra enfin retrouver sa femme et son fils sur terre. Sam
imagine en permanence leurs retrouvailles. Mais suite à accident à l’extérieur de la base, les événements dérapent.
La vie de Sam bascule et une terrible vérité se fait jour.
Le spectateur est plongé au cœur d’un véritable film de science fiction efficace en tous points, intelligent,
racé, admirable, pensé dans les moindres détails, sans défauts.
On touche du doigt le sublime, la réussite totale. Quel dommage que ce long métrage n’ait pas bénéficié d’une exposition médiatique digne de lui. Je me suis documenté pour écrire ces lignes car j’aime bien connaître une œuvre et jamais je n’avais lu autant d’éloges sur un film. C’est confondant de bonheur.
Un pur concentré de créativité de 1h50 minutes.
Duncan Jones, fils de David Bowie, réalise un film de passionné, d’amoureux de la science fiction. Les
références sont évidentes. En voyant "Moon" on pense immédiatement à "2001, Odyssée de l’Espace" pour la relation entre HAL 9000 et les astronautes, à "Silent Running" concernant
l’isolement et la vie en autarcie, et à une moindre mesure à "Alien".
Le scénario est brillant, précis. Le spectateur est immergé dans un cruel jeu de faux semblants, de pistes
erronées. Quand la vérité éclate, le spectateur est véritablement pris de malaise devant l’injustice de la situation.
Cela faisait des lustres qu’une histoire aussi bien construite ne m’avait pas autant passionné. "Moon" prend
littéralement le spectateur par la main et le générique final jette brutalement ce dernier dans la réalité.
Je ne vais pas vous dévoiler le sel de l’intrigue, le pilier scénaristique de "Moon" mais sachez que le long
métrage a aussi du sens avec des questions contemporaines qui nous ramènent à une certaine étique scientifique et à une morale sacrifiée depuis longtemps sur l’autel de la rentabilité
industrielle.
L’approche de ces questions n’est jamais gratuite et s’insère parfaitement dans un ensemble tout à fait
maîtrisé. Duncan Jones dote son film d’un arrière plan sans s’appesantir lourdement dessus. Sa capacité à provoquer la réflexion est plus qu’étonnante.
Le film explore aussi d’une manière assez innovante les relations entre l’homme et la machine. Avec Sam et
GERTY nous allons au-delà du duo traditionnel asservant-asservi. Les nombreuses séquences qui mettent en présence les deux entités sont l’occasion de véritables moments d’émotion. Ici encore
Duncan Jones surprend son monde en traçant sa voie. Les longs métrages que j’ai cité précédemment ne sont QUE des références.
"Moon" n’est pas avare non plus en péripéties. Ne pensez pas qu’il s’agit d’une œuvre contemplative et
statique. Il se passe beaucoup de choses sur cette base lunaire. Mais le tout reste sobre, modéré et minuté par un rythme volontairement lent par moments. La crédibilité est l’un des mots qui
caractérisent ce film.
Techniquement parlant le parti pris du film n’est pas de nous donner le tournis avec des plans qui bougent
sans cesse (oubliez le style caméra à l’épaule). De longs plans fixes sans bruit sont là pour renforcer l’impression d’isolement et de silence.
Pour concevoir les visuels lunaires, Duncan Jones a fait appel aux techniques qui ont fait leurs preuves dans
les précédentes décennies. L’utilisation des maquettes, au lieu d’effets numériques envahissants, fait un retour fracassant (on devrait toujours se documenter sur une œuvre). "Moon" combine une
esthétique froide des séquences internes (de longs couloirs qui rappellent "Outland") et des extérieurs au cachet historiquement
daté.
Le travail photographique est phénoménal. L’alternance permanente entre tonalités sombres et teintes
extrêmement lumineuses est l’un des points forts du film.
La signature sonore de "Moon" est signée par Clint Mansell. La discrétion, la délicatesse des différentes pistes se confond admirablement bien avec la solitude lunaire et le silence des lieux. L’ambiance créée nimbe l’histoire
d’une aura de mystère indéniablement bien pensée.
Mais LA très grande réussite du film est la performance e-x-t-r-a-o-r-d-i-n-a-i-r-e de Sam Rockwell qui
occupe toute la scène d’un bout à l’autre du film (à part des messages enregistrés et la séquence finale). A coup sûr son meilleur rôle tant l’acteur déploie une palette complète d’expressions,
de regards, d’émotions et de sentiments contrastés. Il faut dire aussi que le scénario lui permet cette profusion mais…chut.
J’espère que "Moon" sera vu par le maximum de cinéphiles car il mérite une attention, un intérêt de tous les
instants.
A vous de vous précipitez dessus.
"Moon" est incontournable.